GORAH-ISSAC REVISITED : Le mystère de la mission Jokhoo à Madagascar en octobre 1997

Avec les quatre inculpations provisoires logées contre Shakeel Mohamed en Cour de Port-Louis, le Central CID poursuit son exercice de révision des principaux volets de l’enquête policière sur la fusillade meurtrière de la rue Gorah-Issac à Plaine-Verte dans la nuit du 26 octobre 1996, avec trois activistes de l’alliance PTr/MMM, Zulfikhar Bheeky, Babal Joomun et Yousouf Moorad, abattus par balles. L’une des prochaines étapes de la réouverture de ce dossier concerne la mission spéciale confiée à l’ancien directeur général du National Security Service Dev Jokhoo, alors au rang de chef inspecteur, pour se rendre à Madagascar en octobre 1997 en vue de rencontrer Toorab Bissessur, qui avait affirmé avoir été en possession d’informations cruciales au sujet des activités criminelles, dont des meurtres et des braquages, attribuées à l’Escadron de la Mort. Mais dans l’immédiat, les limiers du central CID, sous la supervision de l’assistant commissaire de police Heman Jangi, comptent compléter l’interrogatoire Under Warning de Shakeel Mohamed sur les quatre charges provisoires logées contre lui, hier après-midi (voir détails plus loin). Il a été remis en liberté provisoire, suite à une Bail Motion soutenue par Me Gavin Glover, Senior Counsel, contre deux cautions de Rs 100 000 et de Rs 20 000 et des reconnaissances de dettes de Rs 1 million et de Rs 100 000.
À ce stade, si la convocation de l’ancien directeur général du NSS pour interrogatoire Under Caution est donnée comme une certitude dans la conjoncture, aucune indication quant au timing n’a transpiré des milieux autorisés du Central CID. En octobre 1997, suite à des informations communiquées par le leader de l’opposition Paul Bérenger et l’ancien président de la république Cassam Uteem au Premier ministre d’alors, Navin Ramgoolam, celui-ci devait prendre la décision de dépêcher le CI Jokhoo à Madagascar pour aller à la rencontre de Toorab Bissessur. Le choix du CI Jokhoo n’était nullement au goût de Paul Bérenger, qui aurait préféré voir le chef de la National Intelligence Unit d’alors, Premdath Gooljar, effectuer cette mission délicate en vue de démasquer l’Escadron de la Mort, qui tenait le pays en otage.
Néanmoins, la controverse du rendez-vous du CI Jokhoo avec Toorab Bissessur au Hilton d’Antananarivo en octobre 1997 ne s’arrête pas là. Officiellement, le CI Jokhoo serait rentré bredouille car Toorab Bissessur aurait exigé le versement d’une somme de Rs 2 millions et le respect d’une série de conditions contre sa coopération. C’est du moins ce qu’avance l’ex-Premier ministre.
De son côté, Toorab Bissessur, qui a été interrogé au début de 2001 avec la relance de l’enquête sur l’affaire Gorah-Issac, soutient qu’il avait fait des révélations sur les différentes opérations et les plans à venir de l’Escadron de la Mort. De ce fait, lors de son prochain déplacement au Central CID, Dev Jokhoo sera interrogé sur le mystère de cette mission spéciale à l’hôtel Hilton à Madagascar. Il n’est pas à écarter que Navin Ramgoolam soit également entendu sur les mesures prises à l’époque suite aux informations qui lui furent communiquées.
Quatre charges provisoires
Par ailleurs, le Central CID met actuellement au point une liste d’anciens enquêteurs du Central CID et autres Homicide Squad, qui pourront être interrogés Under Warning pour le délit de « Compounding a Murder ». Parmi, l’on retrouve des anciens surintendants de police et autres enquêteurs. L’une des premières questions à être élucidées porte sur les raisons pour lesquelles Shakeel Mohamed n’avait pas été interrogé Under Warning le 16 janvier 2001. Le chef de file du Labour à l’Assemblée nationale avait été confronté à des allégations de Khadafi Oozeer dans l’affaire Gorah-Issac.
Contrairement à l’interrogatoire du 16 janvier 2001, pour la séance d’hier Shakeel Mohamed a été inculpé de quatre charges provisoires, soit « conspiracy to commit murder », « procuring revolver used in the commission of murder », « possession of revolver carried off, abstracted by means of a crime » et « giving instructions to commit larceny of van whilst being armed with offensive weapon ». Objectant à la motion de remise en liberté en liberté provisoire de Me Glover, l’assistant surintendant de police Suryaduth Ruhomah, le Main Enquiring Officer dans cette affaire, a évoqué plusieurs raisons, dont la possibilité de faire pression sur des témoins pour qu’ils se rétractent.
Hearsay Evidence
L’ASP Ruhomah a confirmé que Khadafi Oozeer, un ancien membre de l’Escadron de la Mort, avait impliqué Shakeel Mohamed. Il avait soutenu qu’une des victimes, Babal Joomun, n’était pas en bons termes avec Shakeel Mohamed. Il avait ajouté que c’est Shakeel Mohamed qui lui aurait remis des armes et munitions et donné des instructions pour utiliser un van volé pour la fusillade mortelle à la rue Gorah-Issac en 1996. L’officier de police devait indiquer que le dénommé Khadafi Oozeer s’était rétracté par la suite.
Contre-interrogé par Me Glover, l’ASP Ruhomah a affirmé que l’affaire Gorah-Issac a pris une nouvelle tournure après la déposition de la veuve de Babal Joomun, qui vit désormais en Angleterre. Cette dernière aurait fait part de confidences que lui avait faites son mari avant la fusillade mortelle. Il a concédé qu’outre la déposition de la veuve de Babal Joomun, personne d’autre n’est venu de l’avant avec des preuves. Il a rappelé que les détails de la déposition de Khadafi Oozeer sont considérés comme de la Hearsay Evidence. Il a fait état d’un mail de la veuve de Babal Joomun, envoyé à Shakeel Mohamed, exonérant ce dernier de toute responsabilité dans l’affaire Gorah-Issac.
Appelé à la barre, Shakeel Mohamed a déclaré qu’il est prêt à « surrender » son passeport et se plier aux conditions qui lui seront soumises. Il a indiqué qu’il a été toujours à la disposition des autorités pour les besoins de l’enquête, et ce depuis 1999. Il a de plus nié toutes les quatre charges portées contre lui.
Peu après 19 heures, hier, la magistrate Kumari Manjula Boojharut, siégeant à la Bail and Remand Court, devait rendre son Ruling en faveur de la remise en liberté provisoire de Shakeel Mohamed avec le versement des cautions possible que ce matin.

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