GUSTAVE MOREAU : Couleur symboliste

À rebours des réalistes et impressionnistes qui rejetaient l’art académique ainsi que ses représentations galvaudées de scènes historiques et mythiques, Gustave Moreau fut de ceux qui préférèrent réinventer cette approche à travers ses créations. Ce peintre français est né à Paris 6 avril 1826.
Être moderne ne consiste pas à chercher quelque chose en dehors de tout ce qui a été fait. Il s’agit au contraire de coordonner tout ce que les âges précédents nous ont apporté, pour faire voir comment notre siècle a accepté cet héritage et comment il en use. Cette citation de Gustave Moreau résume à elle seule tout le travail du peintre. Un des principaux représentants en peinture du courant symboliste, imprégné de mysticisme.
Renaissance.
Lors de voyages en Italie, Moreau passe des mois à copier les oeuvres du Titien, de Léonard de Vinci et les fresques de Michel-Ange de la Chapelle Sixtine. Il emprunte beaucoup aux maîtres de la Renaissance et intègre également des motifs exotiques et orientaux dans ses compositions picturales. C’est à l’occasion de ce voyage qu’il se lie d’amitié avec Edgar Degas.
Il commence à exposer ses toiles dans les Salons annuels. Œdipe et le Sphinx, exposé en 1864, suscite de vives critiques, élogieuses ou méprisantes. L’interprétation du mythe grec par Moreau est influencée par Œdipe et le Sphinx. Il représentera le moment où Œdipe affronte le monstre ailé dans un passage de pierres à l’extérieur de la ville de Thèbes.
L’apparition.
C’est surtout avec  L’apparition en 1876 qu’il remporte un vif succès. Gustave Moreau n’invente rien mais l’univers onirique de ses oeuvres est surprenant : ses dessins et ses aquarelles sont peuplés de figures mythologiques regroupées pour un étrange cérémonial.  Il réalise ainsi Cantique des Cantiques (1852), l’une de ses toiles les plus monumentales. Ce chef-d’oeuvre est exposé l’année suivante mais passe presque inaperçu aux côtés des scandaleuses Baigneuses de Gustave Courbet.
Notons que Cantique des Cantiques est à l’origine un chef-d’oeuvre de la poésie hébraïque attribué au roi Salomon. Le sujet choisi par le peintre illustre l’épisode du viol de la Vierge de Sulam par des soldats ivres. Pour cette oeuvre, Moreau réalise un nombre considérable d’études d’ensemble et de détails d’une facture sensuelle et nerveuse.
Mythes.
Gustave Moreau s’efforcera de traduire les éclairs intérieurs qui sont en lui.  Il a revivifié les mythes antiques et bibliques. Par une accumulation audacieuse de détails et un usage sans précédent du trait et de la couleur, l’artiste cherche aussi à préserver le mystère de sa création. Il n’est pas étonnant dès lors que les surréalistes se revendiquent par la suite comme ses héritiers.
L’artiste se passionne pour la Bible, moins par souci de se conformer à la tradition de la peinture d’Histoire que par attirance pour les grands mythes fondateurs de l’humanité. Aussi est-ce un prétexte à une vision érotisée de l’Orient, immortalisée par ses hypnotiques Salomé.
Il est nommé professeur aux Beaux-Arts en 1892, et ses talents de pédagogue marquent la plupart de ses élèves – parmi eux, Matisse, Marquet et Rouault. Si Moreau emprunte  les figures endormies de Michel-Ange pour les insérer dans son oeuvre, il ne faut pas oublier les ajouts d’éléments exotiques dans celle-ci. Il était très intéressé par les découvertes archéologiques effectuées au Proche-Orient, en Égypte, au Mexique.
Artiste de l’obsession.
Moreau a fonctionné comme un artiste de l’obsession et pouvait travailler et réfléchir sur un sujet pendant de nombreuses années.  Le peintre a défendu une conception qui est à l’opposé du poncif de femme fatale. Lorsqu’il expose, pour la dernière fois, au salon, en 1880, Moreau présente son Hélène de Troie. Dernier tableau livré au public dans le lieu officiel de divulgation artistique ; tableau disparu puisqu’on en perd la trace en 1913. L’oeuvre apparaît comme un symbole elle-même d’une sorte de mystère artistique.
En 1987, à la veille de sa mort, Gustave Moreau dira avoir souffert toute sa vie de l’opinion injuste d’avoir été trop littéraire pour un peintre. Il reste convaincu que “la divination, l’intuition des choses appartiennent à l’artiste et au poète seuls”. Moreau, tout en se réclamant peintre d’histoire, donnera néanmoins un nouveau souffle à ce genre devenu moribond.

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