HÔPITAUX—MÉDECINE: La présence des étudiants en consultation gênante pour des patients

Pris au dépourvu et gêné par la présence de plusieurs étudiants en médecine en entrant dans le cabinet de consultation d’un médecin à l’hôpital Jeetoo, un patient a refusé de dévoiler ses parties intimes, dont il souffre. Il croyait que le médecin leur allait demander de se retirer pour l’examiner, mais celui-ci a écrit sur son dossier « Patient refused to be examined ». Le public accepte facilement les internes aujourd’hui mais se montre quelque peu réticent vis-à-vis des étudiants car la maladie est une affaire personnelle et intime. Une incompréhension due au manque de communication des autorités sur cette pratique. La formation en médecine à Maurice date en effet de quelques années seulement. Ces étudiants peuvent-ils participer à toutes les consultations y compris celles concernant les parties du corps les plus secrètes ?
Même s’il existe un protocole d’accord entre le gouvernement et les écoles de médecine concernant le volet de formation dans les hôpitaux, les patients n’ont pas tort de se poser certaines questions : la notion de confidentialité est-elle respectée ? Un patient peut-il objecter à être examiné devant ces étudiants ? « Je n’ai jamais refusé d’être examiné par ce médecin », soutient ce patient de l’hôpital Jeetoo. « Mo finn dir dokter-la ki mo pena oken problem si ena zis li ek infirmier ki ti la pou examin mwa me pa devan tou sa dimoun-la », raconte le patient au Mauricien, en ajoutant qu’il était à son deuxième rendez-vous à cet hôpital pour le même problème de santé et qu’il n’a jamais eu de tracasseries à chaque fois qu’il s’y est rendu dans le passé. Il se souvient qu’il y avait sept jeunes au total dans le cabinet du médecin lors de son dernier rendez-vous et a deviné qu’ils étaient des étudiants par le badge qui figurait sur leur tablier.
Le patient souligne qu’à aucun moment le médecin n’a jugé nécessaire de les présenter pour le mettre à l’aise et maintient qu’il aurait dû lui demander son accord compte tenu de la nature de sa maladie. « J’ai attendu un moment croyant qu’il allait faire partir ces étudiants. J’ai été déconcerté quand il a pris mon dossier pour écrire que je refusais de me faire examiner. C’est complètement faux », fulmine-t-il.
Les étudiants mauriciens et étrangers poursuivant leurs études en médecine à Maurice entreprennent le stage pratique dans le service hospitalier publique. Il y a un Memorandum of understanding entre les écoles de médecine et le ministère de la Santé concernant cette formation. Parmi les patients, certains acceptent plus facilement la présence de ces aspirants-médecins que d’autres. « Kouma zot pou aprann si zot pa vinn get pasian dan lopital. Seki zot aprann dan liniversite pa parey seki zot trouve dan lopital », commente une mère de famille. D’autres se disent gênés à se confier devant ces étudiants à l’instar de ce patient de l’hôpital Jeetoo qui a refusé de se dévêtir pour être examiné par le médecin. La présence des étudiants en milieu hospitalier n’est pas anormale car à l’étranger ils assistent au déroulement des consultations. « Ce sont des médecins en devenir on doit leur faire confiance », pensent plusieurs médecins qui déplorent par là même l’attitude de certains patients, trop exigeants, selon eux.
Toutefois, les vieux routiers de la profession médicale insistent sur le respect des clauses de confidentialité patient-médecin traitant. Selon eux, le médecin encadreur devrait faire preuve d’une capacité de discernement s’agissant des cas pouvant être traités devant des inconnus sans que la présence de ces derniers ne porte atteinte à la dignité des patients concernés et les cas requérant plus de “privacy” et la présence seulement des professionnels incluant le personnel infirmier au moment de la consultation. « Il faut prendre des cas assez légers devant ces étudiants », sont-ils d’avis. « Le médecin formateur a en main les dossiers de chaque patient et doit être en mesure d’évaluer les cas pour lesquels une présence étrangère pourrait être gênante pour le patient. Dans de telle situation, tout confrère doit demander l’accord du patient même si le service est gratuit », fait clairement comprendre un spécialiste à l’hôpital Jeetoo. « Et si ce patient refuse, ce confrère n’a pas le droit de refuser de l’examiner », ajoute ce médecin. Manifestement le problème dont souffrait ce patient qui avait refusé de dévoiler ses parties intimes en présence des étudiants ne pouvait être classé dans la catégorie « cas assez légers ». « Ce patient peut déposer une plainte à l’hôpital s’il estime qu’il n’a pas eu le traitement qu’il fallait », poursuit ce spécialiste.
Le responsable d’un autre hôpital attribue cette incompréhension et cette hésitation des patients envers les étudiants en médecine à une absence de communication de la part du ministère de la Santé qui n’a pas jugé utile d’en informer le public. « Les écoles de médecine sont encore nouvelles chez nous et il fallait préparer le public à accepter ces jeunes étudiants dans les cabinets de consultation car cela ne fait pas encore partie de notre culture. Bisin met pasian-la an konfyans se ka ki plis inportan », soutient ce responsable.

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