Initiative 5-2035 : réduire le taux de diabète à Maurice à 5% en 2035

  •  Dr Nikhil Domun: « Le diabète est une catastrophe nationale. Nous devons agir avant qu’il ne soit trop tard »

Devant le taux élevé de diabète qui touche le pays – Maurice figurant parmi les cinq pays où la prévalence de cette maladie est la plus élevée –, un groupe de Mauriciens et d’amis de Maurice, dont plusieurs professionnels de la santé travaillant à l’étranger, a décidé de lancer une initiative visant à agir concrètement pour faire baisser la prévalence du diabète dans le pays.

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« Le diabète et les maladies chroniques associées représentent une menace pour la sécurité nationale à Maurice : près de la moitié de la population est déjà concernée, avec 40% des adultes qui sont diabétiques ou prédiabétiques. Et 80% des maladies chroniques non transmissibles liées au diabète de type 2 sont évitables », a souligné d’emblée le
 Dr Nikhil Domun, spécialiste en endocrinologie, diabète et maladies métaboliques au Groupe Hospitalier Est Réunion de Saint-Benoît à La Réunion.

Cet ancien interne du CHRU de Brest en France, natif de Rivière-du-Poste, est vice-président de l’organisation Global Foundation for Community Health, qui a lancé le site www.5-2035.org il y a un an.

Il a expliqué au Mauricien qu’il « faut agir concrètement auprès de la population » car le diabète représente un danger réel pour le pays si nous n’agissons pas pour tenter d’enrayer la maladie. « D’où l’Initiative 5-2035 car nous estimons que nous pouvons passer de 40% de diabétiques ou prédiabétiques actuellement à 5% d’ici 2035. »

L’Initiative 5-2035 représente certes un projet et un objectif ambitieux mais il est nourri par le dynamisme et la volonté de ce
collectif de Mauriciens et d’amis de Maurice qui veulent contribuer à faire « quelque chose de positif » pour leur pays. Cette initiative a été lancée par le Dr Shivraj Sohur, Mauricien exerçant à l’université de Harvard, aux États-Unis.

Celui-ci est parvenu à regrouper autour de ce projet un groupe d’amis et médecins mauriciens, dont plusieurs anciens du
Collège Royal de Port-Louis. Ces professionnels sont aujourd’hui répartis dans plusieurs pays et ont lancé la fondation/association dans sept pays, soit Maurice, les États-Unis, le Canada, la France, l’Angleterre, l’Australie et l’Afrique du Sud (des pays qui comptent un nombre important de membres de la diaspora mauricienne).

Dans le concret, le projet 5-2035 vise à mettre en place des CHC (“community health cells”) dans diverses régions de Maurice avec un infirmier/une infirmière. « Ces CHC sont des cellules de santé communautaires qui apporteront aide et soutien aux citoyens. Cette méthode existe déjà à l’étranger », a souligné Dr Domun.

Selon ce dernier, ce projet « va marcher » puisqu’il est basé sur le concept EBM (“Evidence Based Medecine”) et sur l’interaction avec la population mauricienne.
« Nous nous basons sur une démarche qui consiste à répondre à un besoin de santé publique de la manière la plus simple et efficace possible en utilisant un minimum de moyens », dira-t-il.

Ces cellules de santé communautaire auront chacune un CHNP (“Community Health Nurse Practitioner”), soit un infirmier/une infirmière praticien(ne) en santé communautaire. Celui-ci suivra un cursus préparé et dispensé par une spécialiste américaine, afin de pouvoir prendre en charge des patients diabétiques et prédiabétiques et les accompagnera tout au long de leur processus de traitement de la maladie.

« C’est cet accompagnement qui est important car chaque cas est différent et nécessite un suivi régulier et adapté en fonction de l’évolution de chaque patient. Ces infirmiers seront formés à prodiguer des conseils et suivre et contrôler le diabète des patients sur plusieurs mois et années », a expliqué l’interlocuteur.

Si le projet est lancé, son but à terme sera de développer plusieurs cellules de santé communautaire à travers le pays de manière à atteindre le ratio 1 000 citoyens par CHNP.

« Ce sont des méthodes de médecine qui ont déjà fait leurs preuves dans plusieurs pays bien avancés et c’est dommage que Maurice ne puisse bénéficier de ces recherches et avancées à ce jour, d’autant plus que nous sommes parmi les cinq pays avec la plus forte prévalence de diabète et des maladies associées. Il est important de rappeler que ces maladies sont responsables de milliers de décès ou de causes de handicap ou de détresse familiale », a poursuivi le Dr Nikhil Domun.

Actuellement, la Global Foundation for Community Health est dans un processus de lancement de la base de la fondation/association sur le plan national à Maurice. Cette structure doit recruter des volontaires comme Community Health Leaders, soit des District Managers et Precinct Officers, entre autres.

« Globalement nous avons prévu de recruter neuf District Managers à Maurice et un pour Rodrigues. Et ensuite, chaque District Manager aura sous sa responsabilité plusieurs Precinct Officers pour agir directement auprès des citoyens », a fait ressortir le médecin.

« Nouvelle façon de prendre soin »

« Notre message à la population mauricienne, c’est que “Ensam nu capav”. Nous demandons aux compatriotes de s’inscrire comme membre sur notre site www.5-2035.org. Nous devons montrer que les Mauriciens sont extrêmement intéressés par cette nouvelle façon de prendre soin de leur santé. Si nous parvenons à avoir un grand nombre d’inscrits, cela nous permettra de plaider efficacement auprès des institutions et d’autres organisations internationales pour
faire bouger les choses concrètement. Il est donc primordial que les Mauriciens adhèrent à notre site. Il s’agit de leur santé », a dit le docteur Domun.

Ce dernier s’intéresse à ce projet de cellules de santé communautaire pour lutter contre le diabète depuis fin 2018. « J’ai été contacté par le Dr Sohur qui m’a expliqué qu’un groupe de Mauriciens sont décidés à agir pour faire reculer le diabète à Maurice, car cette maladie en elle-même, plus ses effets sur la santé de la population, est une catastrophe nationale. Nous devons agir avant qu’il ne soit trop tard car nos concitoyens sont dans la souffrance et en tant que patriotes et médecins, nous nous devons d’apporter notre aide », a affirmé le Dr Domun.

Pour financer ce projet, le groupe de Mauriciens envisage de solliciter plusieurs organisations internationales, dont le National Health Institute des États-Unis, et des organismes d’aide européens.

Freiner l’expansion

Selon le Nikhil Domun, le diabète de type 2 est provoqué par plusieurs facteurs : la génétique, la sédentarité et une alimentation déséquilibrée, entre autres.

« Avec l’évolution de l’économie au fil des dernières décennies, les Mauriciens ont amélioré leur pouvoir d’achat et la sédentarité s’est installée. Et le terrain génétique préexistant a fait exploser le diabète parmi la population. Aujourd’hui, près de la moitié de la population est devenue diabétique ou prédiabétique. C’est grave. Il faut mettre un frein à l’expansion de la maladie dans le pays », insiste le médecin.

Et de soutenir qu’il faut absolument retarder le diabète à Maurice et que les cellules de santé communautaire pourraient y contribuer efficacement.

Dans le cadre de la présentation de leur projet à Maurice, les membres soutenant l’Initiative 5-2035 ont déjà eu des échanges avec plusieurs responsables, dont ceux du ministère de la Santé, de l’Université de Maurice et du Mauritius Research Council.

« Nous attendons actuellement une lettre de soutien de la part du ministère de la Santé pour qu’on puisse lancer le projet pilote et tester le modèle 5-2035 afin que nous puissions apprendre, nous améliorer et nous adapter à la population en général ». Il dit avoir hâte de commencer le projet afin d’aider les Mauriciens à améliorer leur santé et leur qualité de vie.

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