INONDATIONS ET SÉCHERESSE : Au gré de l’eau

L’eau ne finit pas de troubler l’existence des Mauriciens. Serait-ce le résultat de la mauvaise gestion de cette précieuse ressource ? Les inondations affectent les uns, alors que d’autres souffrent des effets de la sécheresse, quelques kilomètres plus loin. Nous avons suivi deux familles pour illustrer cette situation.
La journée du mercredi 13 février a été un véritable cauchemar pour les familles Ramasawmy et Ackbarally. Alors que Rajen Ramasawmy assistait avec impuissance à l’inondation graduelle de sa maison, Yousouf Ackbarally surveillait son robinet, en priant que l’eau coule enfin. “Quand je me suis réveillé le matin, j’ai eu très peur. Je me suis dit que ma famille et moi pourrions trouver la mort. L’eau montait dans ma cour à vue d’oeil et j’ai su que ma maison allait être inondée. Nous sommes allés nous réfugier chez des parents et nous avons ensuite passé la journée et la nuit à évacuer l’eau”, raconte Rajen Ramasawmy.
Au même moment, à l’autre bout du pays, alors que son village, Souillac, croulait sous les trombes d’eau, Yousouf Ackbarally se demandait s’il allait avoir suffisamment d’eau potable pour que sa famille puisse tenir jusqu’à ce que le robinet se décide enfin à couler. “Ou bizin vey sa robine la, kouma li koule ou bizin ranpli seo, drom, boutey, sinon ou riske pena delo pou kwi e lav bann zafer.” En effet, depuis pas mal de temps, la fourniture d’eau est perturbée dans le village. Selon Yousouf Ackbarally, de 9h à minuit, l’eau ne coule jamais.
Mari difisil.
Le drame pour les Mauriciens est que leur quotidien en est terriblement affecté. La vie des Ackbarally, comme celle de tous les habitants de Souillac, est rythmée par la fourniture d’eau irrégulière. “On ne sait pas vraiment à quelle heure l’eau commence à couler du robinet. On sait seulement qu’arrivé 9h, ça ne coule plus. Nous avons informé la CWA des dizaines de fois. À chaque fois, nous avons la même réponse : on nous dit qu’il y a des travaux de maintenance en cours”, s’indigne Rufaida Ackbarally, soeur de Yousouf.
À Gokoola, les Ramasawmy guettent chaque gros nuage dans le ciel en espérant qu’il ne soit pas porteur de grosses pluies. “Nou pe priye ki pa regagn gro lapli, sitiasion pou vinn mari difisil pou nou si regagn sa bann gro lapli la. Nou pou bizin kit nou lakaz e al abrit kot nou bann fami”, confie Rajen Ramasawmy.
Récurrent.
Les deux familles que nous avons rencontrées soulignent que ce qui leur arrive est récurrent. Voir leur maison être inondée fait partie de la vie des Ramasawmy. “Dès qu’il y a de grosses pluies, ma maison est inondée. Nous devons faire évacuer l’eau, et nos meubles sont abîmés”, précise Rajen Ramasawmy.
De son côté, Yousouf Ackbarally souligne que le problème de fourniture d’eau à Souillac date de plusieurs années. “C’est comme ça depuis longtemps. Je suis allé voir la CWA je ne sais combien de fois; plusieurs personnes du village en ont fait de même. Les forces vives se sont adressées aux députés, mais rien n’a changé.” Pire : l’eau du robinet est sale quand elle coule. “Dès qu’il y a de grosses pluies, vous savez que l’eau sera sale. On a beau la bouillir, il y a toujours de la saleté qui se dépose au fond de la bouteille”, soutient Yousouf Ackbarally.
Incompréhension.
Ces deux problèmes contradictoires ne devraient pas être possibles dans un pays comme le nôtre et sont dus à l’incompétence des autorités. La population a du mal à comprendre cette situation et ne manque pas de le faire savoir. “Les trois dernières années, les pluies se sont faites rares. Il est tout à fait normal que la fourniture d’eau soit interrompue pour conserver nos maigres ressources. Mais depuis la fin de l’année dernière, nous avons eu énormément de pluie, et nous avons eu droit la semaine dernière à des pluies torrentielles. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi la fourniture d’eau est interrompue toute la journée”, s’énerve Yousouf Ackbarally.
Pour sa part, Rajen Ramasawmy ne comprend pas comment sa maison peut être inondée à chaque grosse averse. “Les autorités savent qu’il y a ce problème ici. Les ouvriers sont venus construire un canal d’évacuation qui est censé diriger l’eau pour éviter les inondations. Mais le canal est trop petit pour la quantité d’eau qui descend jusqu’à ma maison et celles de mes voisins.”

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -