JOURNÉE MONDIALE DES SOURDS: Briser les barrières de la surdité

Dans le cadre de la semaine internationale des sourds, Le Mauricien est allé se plonger dans l’univers des personnes malentendantes. De la fabrication des prothèses auditive au dépistage de surdité à l’éducation et l’apprentissage de métiers… En 2014, quelle place ont les malentendants dans la société et quelles avancées avons-nous su réaliser depuis l’introduction du langage des signes créole à Maurice en 2004 ? Des réponses que l’on vous propose de découvrir à travers ce reportage…
Pour certains la surdité est de naissance, pour d’autres cela peut venir d’une maladie ou d’infections trop répétées de l’oreille. Notre visite à la Society for the Welfare of the Deaf à Beau-Bassin débute dans la salle ou l’on teste la surdité à travers des appareils qui génèrent des sons. Dans une salle insonorisée, un enfant malentendant fait une simulation afin de mieux comprendre le dépistage. Linaa Muttur, audiologiste et speech therapist, nous explique alors comment elle détecte un problème de surdité : « L’enfant est placé dans une salle insonorisée, puis il met des écouteurs et a un bouton dans sa main. À travers mon appareil je génère des sons à différentes fréquences. Pour vérifier l’intensité de la surdité, j’augmente et baisse le volume. Lorsque l’enfant entend les sons, il appuie sur le bouton. Je procède à l’opération pour chaque oreille. Pour certains enfants qui ont aussi des troubles d’apprentissage, il faut souvent utiliser une méthode de jeux afin de voir si l’enfant entend. À partir de ce procédé nous pouvons savoir s’il y a besoin ou pas d’un appareil auditif. »
Dans une autre salle à côté se trouve une petite salle de jeux, où les enfants peuvent suivre une thérapie qui permet de les apprendre à moduler leur voix lorsqu’ils prononcent des sons. « Il est impératif d’encourager la parole même s’ils n’entendent pas… Dans cette salle, nous les aidons à prononcer des mots et à moduler leur voix. Tout cela est fait en forme de jeux, ce qui facilite énormément la communication et l’apprentissage », indique Linaa Muttur.
Nous nous dirigeons ensuite vers le laboratoire du centre, ici chaque employé a une tâche bien précise. Certains font les moules, d’autres la réparation et d’autres s’occupent de la technologie des appareils auditifs. « La fabrication d’appareils auditifs demande énormément de ressources et d’expertise. Tout commence par le moule, nous le faisons en acrylique et en silicone pour les jeunes enfants ou les personnes âgées. Lorsque nous avons terminé le moule, il faut le chauffer afin qu’il se solidifie. Le procédé prend trois heures. Après cette étape nous introduisons le mécanisme et l’électronique qui permettront d’entendre les sons. À Maurice nous sommes les seuls à faire la fabrication de ces appareils. Nous faisons aussi les réparations », nous explique Indranath Deegun, le Heading Aid Technician. « Vivre dans un pays chaud fait qu’il faut malheureusement changer les appareils au bout d’un an d’utilisation », ajoute-t-il.
Enseignement normal, communication différente
Les enfants atteints de surdité ont leur propre langage, celui des signes… Encore faut-il le connaître et savoir l’intégrer à l’apprentissage. Le centre Society for the Welfare of the Deaf accueille 60 élèves allant de deux ans à 20 ans pour des classes de préprimaire, primaire et secondaire. Pour leur inculquer les valeurs et l’enseignement dont ils ont besoin pour intégrer le monde du travail, 16 enseignants sont à leur disposition. « Nous leur apprenons exactement le même programme que des élèves qui sont dans les écoles normales, c’est juste notre façon de communiquer qui est différente. Nous devons utiliser le langage des signes et en parallèle comprendre leur expression faciale et s’adapter à leur rythme de travail. Ils sont très réceptifs, mais il est aussi très difficile pour eux de dépasser un certain niveau d’éducation scolaire », nous explique une enseignante.
À partir d’un certain âge, les enfants sont envoyés en classe prévocationnelle, où ils apprennent un métier. La coiffure, la couture, le jardinage et la cuisine sont les filières qu’ils peuvent prendre. Certains de ces élèves ont depuis l’année été embauchés par notamment KFC et le Henessy Park Hôtel à Ébène. À travers le programme d’insertion, les jeunes sourds ont pu rentrer dans le monde du travail. Cette étape leur permet d’être plus autonomes et d’acquérir de l’expérience. Cela fait trois ans que la chaîne de restauration rapide KFC a pris l’initiative de faciliter l’embauche et l’intégration professionnelle des sourds à Maurice. À ce jour, ils sont onze à travailler dans les unités de Flacq et d’Ébène de l’enseigne, qui envisage d’étendre le programme à l’ensemble de ses restaurants. « Cet engagement est le fruit d’une visite en Inde, il y a trois ans. KFC possède là-bas plusieurs unités qui ont adopté un concept originaire de la Malaisie, selon lequel on a recours à des salariés sourds et malentendants. Pour facilité l’accès à la communication nous avons tenu à former les employer au langage des signes, et cela a vraiment bien fonctionné. Ce projet a prouvé que les sourds étaient de très bon employés et qu’ils étaient capables de faire exactement le même métier que les autres. Nous sommes plus que satisfaits de cette expérience que nous allons renouveler dans d’autre KFC de l’île », nous explique Raymond Houbert, Operations Manager de KFC.

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