A L’INSTITUT FRANÇAIS DE MAURICE – Katia Bourdarel : Un champ d’îles

Dès l`ouverture, se dessinent les lignes d`un paysage insulaire. Il y a cette peinture murale impressionnante exprimant le lien de l`homme à la nature-refuge. Des dessins encadrés illustrant des cabanes ornent cet espace peint. Il y a aussi une série de peintures accrochées au mur, des aquarelles, des petites cabanes, construites par les participants de l`atelier de travail, avec de morceaux de bois dont le dessus est peint en noir et le dessous trempé dans de la bougie fondue, symbolisant l`idée du passage. Le travail de Katia surprend par la diversité des supports : peinture (corps sensuels, des nus qui investissent le papier), animation. Le paysage mis en scène est loin d`être un décor. Il faut l`appréhender comme un environnement (pour envelopper les oeuvres, dit la plasticienne). Pour Katia Bourdarel, réintégrer l`île, les lieux de l`île, c`est renouer avec soi-même et les autres. C`est un monde d`idées qu`elle essaie de mettre en images, en puisant dans la mémoire collective, son environnement immédiat et ses souvenirs. Il y a dans ses oeuvres réalisées à Maurice une poétique du paysage, une volonté de construire une île différente (sa propre île) à l`opposé de la vision qu`on a généralement de l`insularité. Cela implique une autre relation à la matière. Le travail prend la forme d`une île, sa véritable identité après avoir sondé les choses, le dedans et le dehors (La peau des choses). A l`image de l`île, les pièces exposées sont faites d`éclats, de fragmentation, de choses fragiles. La matière elle-même dans quoi l`oeuvre chemine implique l`eau, la terre, le feu. Les éléments matériels sont souvent favorisés par la substance aquatique. Les éléments s`unissent, se fondent l`un dans l`autre, s`érotisent. Le portrait de Deepa qui orne l`IFM montre l`union de la femme et de l`eau, le mélange érotique et la force féminine. L`éclatement est présent dans la déformation du visage de la femme reflétée dans l`eau. Il y a là l`affirmation d`une géographie ravagée, déformée par les forces naturelles. Pour rétablir la relation au monde, à son origine, le travail artistique consiste à réactiver les images premières de l`île, celles des cases renvoyant à l`idée du cocon. A la terre (premières traces et origine à révéler) s`oppose l`océan – l`eau qui donne la mort. L`idée de descente dans l`eau pour mourir, la pulsion de mort sont aussi présentes dans certaines oeuvres de Katia Bourdarel, outre ses féeries enchantées. A l`opposé, il y a l`eau de source, fertilisante comme l`acte d`amour et comme une anamnèse pour retrouver la mémoire du lieu premier. L`imagerie de Katia Bourdarel est donc complexe. Les symboles récurrents dans son oeuvre sont empruntés à divers éléments formels. De la texture banale de la ficelle jusqu`à la vidéo, l`artiste construit un univers décalé, né de ses fascinations personnelles, de ses obsessions aussi. Les oeuvres de Katia Bourdarel, inspirées de Maurice, dessinent une trame narrative, une fiction ou se profile un paysage insulaire. Un récit légendaire ou une oeuvre-poème du monde réel et du monde rêvé, la quête d`unité du réel et du rêve.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -