La guerre des «gate»

Quelle campagne! Maintenant, c’est la guerre des gate, Serenitygate ou Navingate. Documents contre documents. Les avantages accordés aux proches du MSM sont scandaleux et ne font que confirmer la propension intrinsèque de ce parti à pratique extrême du népotisme. Toujours tout pour les siens.

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Mais là où cela devient grave, même si les documents révélés confirment les pratiques et mœurs extravagantes du dirigeant politique visé quand bien même il se gargarise du slogan “bef travay, souval manzé” et qui viennent s’agréger sur les terribles images du coffre-fort de River Walk, c’est que le secret bancaire est allègrement violé.

La banque visée a vite réagi et on peut comprendre cette diligence par le fait que c’est un secteur qui repose sur la confiance. Le jour où un déposant ou un client a un doute sur l’intégrité et la confidentialité de ses transactions, il peut immédiatement fermer son compte. Le contenu du communiqué oriente clairement les fuites vers les organismes publics à qui, dans le cadre des enquêtes sur Navin Ramgoolam, ces documents ont été confiés.

On ne découvre rien des excès des uns et des autres dans les gate. Mais qu’est-ce qu’on fait après? On passe à autre chose jusqu’au prochain scandale. La Banque de Maurice de l’ex-candidat Renganaden Padayachy n’a rien à dire sur cette affaire. Va-t-elle diligenter une enquête? Non, parce que tout le monde semble savoir d’où proviennent les documents d’Edward Snowden.

Lorsqu’on sait à quel point les institutions ont été vampirisées par le MSM et le ML, on ne doit pas s’étonner que de telles choses se produisent. Cela dit, il y a quand même des limites à ne pas franchir, sinon, c’est toute la réputation de Maurice qui risque de prendre un sale coup. Qui voudra mettre son argent dans un pays où les comptes personnels passent du dossier de l’enquête et de l’instruction pour atterrir dans des officines partisanes?

La campagne c’est aussi les alliances, les candidats et le programme. Nombre d’observateurs n’y avaient pas cru. Non seulement le MMM va seul aux élections générales, mais certains peuvent avoir “toutes les cartes en main” et d’autres des “cartes maîtresses”, mais ce sont bien les mauves qui ont été les premiers à annoncer leurs candidats, à présenter leurs 20 mesures prioritaires et à mener une campagne comme on le voit dans les démocraties qui se respectent.

En face, il y a eu au MSM/ML l’exercice d’éviction, assez cynique dans le procédé, de tous ceux qui ont, pourtant, été tolérés dans leurs dérives et leurs irrégularités toutes ces années et ceux qui ont été réduits au silence pour ne pas bousculer la majorité du chef et gérer ses ambitions de tout faire pour obtenir sa légitimité et qui ont eu leur récompense sous forme de prébendes juteuses puisées de la poche des contribuables.

Puis, il y a eu les candidats annoncés, présentés, et qui ont dû déguerpir parce que les personnes qu’ils ont bernées en 2014 ne veulent plus les voir. Et comme tout se filme maintenant et que le clip est immédiatement répercuté et partagé, il a fallu rapidement déloger les indésirables. Comme si d’autres circonscriptions étaient devenues des poubelles pour candidats rebuts. Il y a d’autres, tellement gaffeurs dans leur prise de parole publique, qu’ils ont été virés le lendemain même.

Quant au PTr, il est fidèle à sa réputation. La devise du leader, qui ne semble pas avoir changé, étant: ne fais pas aujourd’hui ce que tu peux faire demain, dans une semaine, dans un mois ou jamais. Après la situation burlesque qui a duré ces quinze derniers jours, suite à l’annonce de la dissolution, avec des candidats auto-proclamés se rendant dans les circonscriptions qu’ils ont choisies et provoquant confusions et protestations, ce n’est que demain, à quelques heures du Nomination Day, que la liste complète des 60 candidats sera connue.

Ils ont, en plus, aussi pris la précaution de dire que cette liste pourrait être modifiée le mardi même, jour du dépôt de candidatures. Ils savent parfaitement de quoi ils parlent. Il y a, en effet, des précédents où un candidat évincé a organisé une manifestation bruyante le jour du dépôt de candidatures et il a fait un tel vacarme qu’un ticket lui a été offert à la dernière minute.

Le mépris de l’électorat pour les deux formations en coalition multipartite ne s’arrête pas à la manière dont elles désignent et imposent leurs candidats à la dernière minute. Il s’étend au programme. À part le MMM qui a détaillé ses priorités en attendant de faire des propositions concrètes dans un programme formel à venir, les autres prennent franchement les votants pour des débiles et des tarés à qui, chaque jour, il faut annoncer, à défaut d’un vrai projet, un sucre d’orge par-ci et donner un bribe par-là. C’est un exercice d’infantilisation inacceptable. Indigne d’un République moderne.

La pari du MMM est audacieux et même peut-être un peu fou, mais il a le mérite d’être courageux, digne et honorable. Jusqu’à maintenant, c’est sérieux, c’est propre, c’est décent et c’est respectueux de l’électorat. Sa reconstruction, voire sa refondation, est probablement en marche et elle ne devrait pas s’arrêter avec cette élection.

Maintenant, à l’électorat de voir qui il veut installer à la tête du pays. Et qu’on se le dise, cinq ans c’est long. Faut pas venir se plaindre après. Comme en 2014. Lorsque, après avoir déjà voté, les électeurs ont découvert avec stupeur et effroi le grand nombre de médiocres qu’ils ont envoyés chauffer les strapontins de l’Assemblée nationale.

Si l’électeur mauricien croit qu’il mérite mieux, il doit savoir ce qu’il lui reste à faire. Non pas voter comme des moutons décérébrés avec des votes à monnayer, mais faire le choix de personnes de qualité capables de rehausser le débat public à tous les niveaux. Pour ne plus avoir honte lorsqu’on se branche sur la Parliament TV.

 

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