L’affaire de tous

La communication officielle, essentielle en temps de crise, s’améliore un peu. Enfin. Le numéro qu’a sorti le Premier ministre durant la semaine a été tout à fait grotesque. Malgré sa grosse cohorte de communicants grassement payés des fonds publics, sa communication a été, pour dire le moins, foireuse. Que la presse, et partant, la nation, doivent attendre quelques minutes pour entendre ce que le chef du gouvernement a à dire n’a rien de particulièrement scandaleux. Il y a des contretemps qui peuvent survenir, cela se comprend.

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Mais faire attendre les journalistes sur le trottoir et les balader pendant des heures après les avoir convoqués pour une conférence de presse fixée à 14 h 30 jeudi pour ensuite leur dire que ce serait en fait une déclaration sans possibilité de poser des questions pour juste après annoncer que tout était annulé et qu’il y aurait finalement une déclaration enregistrée pour la MBC sans dire à quelle heure exactement, relève d’une désinvolture et d’un amateurisme inacceptables, alors que c’est d’une dangereuse pandémie qu’il s’agit.

Et la fameuse déclaration promise, ce n’était pas à l’heure standard qui est pratiquée dans toutes les démocraties desquelles nous prétendons nous inspirer, qui est celle du journal télévisé du soir, généralement de grande écoute, et qu’utilisent les présidents et Premiers ministres du monde entier dans le but d’atteindre le maximum de personnes.

C’est un peu avant 22 heures qu’on a pu suivre l’allocution télévisée du Premier ministre ce jeudi soir. Une intervention tardive pour annoncer le confinement dès le lendemain à 6 h. Pas étonnant qu’il y ait eu un mouvement de panique vendredi et que les Mauriciens déjà enclins, avec leur syndrome cyclonique, à la thésaurisation de produits, se soient rués dans les grandes surfaces durant la journée de vendredi. Et il y avait exactement le contraire de tout ce qui doit accompagner le confinement. Les gens étaient les uns collés aux autres sans respecter les gestes-barrière ou la distance de protection d’un mètre entre individus.

Le système est désormais mieux organisé et les grandes surfaces ont mis en place un filtrage sur le nombre de personnes et de caddies admis et une limite sur la quantité de produits de première nécessité achetée par un consommateur.

Il est difficile de blâmer les exploitants d’enseignes très fréquentées pour les conditions de sécurité sanitaire prises, puisqu’il était difficile de mettre en place le système entre 22 h la veille, alors que tout était fermé, et et 9 h le lendemain, heure normale d’ouverture.

Et, en matière d’ouverture, il faudrait un peu plus de logique et de rationalité dans les décisions prises. Qu’est-ce qui peut expliquer que l’on ferme les commerces le dimanche, mais que les foires maraîchères ou autres où il n’y a strictement aucune mesure de précaution sanitaire prise soient autorisées? Nous ne voulons pas croire que c’est encore une décision basée sur cette politique clientéliste et ciblée qui a permis de grappiller quelques votes aux dernières élections générales.

La communication va un peu mieux, mais elle est loin d’être à la hauteur de ce qui est de rigueur ailleurs. On ne s’attend pas à ce que Pravind Jugnauth vienne nous entretenir de l’évolution de la pandémie chez nous tous les jours, mais une parole sérieuse, sincère, transparente, rassurante et ferme est quotidiennement requise et des réponses aux questions des journalistes impératives. C’est ce qui se fait partout.

Le gouvernement, dont le ministre de la Santé avait, jusqu’à hier, été porté disparu depuis le couac de mercredi, a fait appel à la Dr Catherine Gaud, praticienne chez nos voisins réunionnais qui a accompagné ceux qui, ici, luttent contre le VIH depuis bientôt 20 ans, pour épauler le comité national de communications sur le Covid-19. C’est un excellent choix et elle en a déjà fait la démonstration en s’exprimant de manière précise, claire et directe ces derniers jours.

Des directives devraient aussi être données aux forces de l’ordre qui sont appelées à veiller au respect du confinement. Elles doivent d’abord être équipées, dans tous les sens du terme, en outils de protection d’abord, mais aussi en kits de discernement et d’efficacité.

Un barrage a vendredi matin été placé juste avant le rond-point-chantier poussiéreux de Jumbo. Rien d’anormal, sauf qu’au lieu d’immobiliser un véhicule à la fois pour le contrôle d’usage, des officiers de la Special Mobile Force ont arrêté au beau milieu de la route le premier du cortège, bloquant ainsi la circulation jusqu’à la gare de Vacoas.

Lorsque des automobilistes ont commencé à protester et à donner des coups de klaxon, il y a eu comme une alliance toxique et virale entre des employés de la MBC, présents pour un reportage et sapés comme des voyous, et des policiers impliqués pour faire la leçon aux protestataires pressés d’aller justement en confinement.

Il y a heureusement eu l’intervention d’un sergent, aux excellentes manières et à l’expression impeccable pour commencer à mettre un peu d’ordre dans cette pagaille qui avait provoqué un très gros embouteillage et la révolte des usagers.

Le combat contre le coronavirus est l’affaire de tous. On est tous concernés par cette urgence. C’est une question de vie et de mort. Ailleurs, les présidents et les Premiers ministres réunissent l’ensemble des formations politiques pour une mobilisation contre la pandémie pour bien montrer que tout le monde est sur le pont, que la mobilisation est vraiment générale.

Le Premier ministre a reçu Arvin Boolell et Ritesh Ramful, c’est bien, mais il faut que des informations exactes soient communiquées sur une base quotidienne et qu’il n’y ait pas de tentatives de maquiller la réalité. Cela amènerait à la raison ceux qui prennent encore cette pandémie à la légère.

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