Lallmatie — Exorciser l’épisode Touni minwi

Niché dans l’est du pays entre Belvédère, St-Julien et Bon Accueil, le village de Lallmatie a une histoire particulière. Dès qu’on évoque son nom, on pense au phénomène Touni minwi, un soi-disant loup-garou qui avait créé une psychose dans la région. Il y a également eu les histoires autour de la “calèche de Lallmatie” : deux dames habillées en blanc sur deux chevaux blancs, aperçues la nuit. À tel point que les habitants de la région ont longtemps été considérés comme des parias. Aujourd’hui, le village semble avoir pansé ses plaies et est devenu un lieu très fréquenté.

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Une circulation continuelle, des commerces florissants, des usines, des supermarchés : le village de Lallmatie s’est bien développé au cours des vingt-cinq dernières années. Les nombreux champs de canne à sucre qui bordaient le village ont cédé la place à des bâtiments commerciaux. Lallmatie est devenu un passage obligé pour les habitants des villages environnants. Sa foire est d’ailleurs très connue et très fréquentée par les habitants de la région.

Cette quiétude qui saute aux yeux n’a pas toujours été présente. Après le passage du cyclone Hollanda, Lallmatie a fait la une des journaux avec la psychose qu’avait provoquée le phénomène Touni minwi, alors qu’il y avait un black-out dans la région. Ce mauvais souvenir trotte dans les têtes. “C’était une personne de la région qui faisait cela. Aujourd’hui, il n’y en a plus”, affirme Vijay Newoor, 69 ans, cordonnier. “Ça n’a jamais existé, je suis sorti moi-même pour aller voir. Je n’ai jamais rien vu”, confie pour sa part Parmonon Kathapermall, boutiquier de 69 ans.

Des histoires farfelues.

Ce dernier est un des doyens du village. Cet ancien marchand de pistaches et ses frères ont ouvert la première boutique de Lallmatie, qu’il gère aujourd’hui aux côtés de sa fille. Ils sont très connus dans les parages pour leurs délices sucrés, dont sont friands les clients de Lallmatie et d’ailleurs. Parmonon Kathapermall affirme que le village s’appelait “la mare leti” avant de se transformer en son nom actuel. À côté de la boutique se nichait une ancienne salle de cinéma, très populaire à l’époque. “Dimounn ti pe mont lor dimounn pou aste tiket”, raconte un autre habitant de la région.

Pour revenir à l’épisode du fameux loup-garou, plusieurs témoignages de l’époque parlaient de manifestations effrayantes, le soir venu. “C’était une psychose. Les gens disaient qu’ils avaient vu le loup-garou. Il y avait de nombreuses histoires farfelues. Certains affirmaient que leur bicyclette roulait toute seule. Un motocycliste roule malheureusement dans un trou et vient affirmer que c’est le loup-garou qui l’a fait tomber. Je n’y croyais pas au début, mais à force d’entendre des histoires, j’ai fini par douter. Un intellectuel avait raconté que le loup-garou était venu chez lui et qu’il l’avait serré dans ses bras. Il l’aurait lâché après que celui-ci a commencé à prier. Cela m’avait quelque peu perturbé. Un soir, en arrivant à la maison, je me suis rendu compte que j’avais oublié ma bicyclette près de la croisée. Je n’ai pas eu le courage d’aller la chercher. J’y suis allé le lendemain matin.”

Développement.

La psychose avait sans doute été accentuée par l’histoire de la “calèche de Lallmatie” qui, quelques années plus tôt, avait créé un vent de panique dans le village. Certains habitants affirmaient avoir aperçu deux vieilles femmes habillées tout en blanc montant des chevaux blancs vers minuit.

Tous ces épisodes ont contribué à donner une connotation péjorative au nom du village. Lontan dimounn ti pe dir “baya Quatre cocos” kan zot ti anvi dir “enn dimounn sovaz”. Après l’épisode du loup-garou, certains avaient honte de dire qu’ils habitaient Lallmatie”, nous dit-on. Mais ce temps-là est révolu, affirment les habitants. Lallmatie est désormais un endroit où il fait bon vivre et qui est un exemple pour les villages des alentours.

Selon un villageois, le développement de Lallmatie a débuté avec le bon vouloir de quelques agents politiques. “Ils sont allés collecter de l’argent dans l’île Maurice entière pour créer le Swaraj Bawan, le Bâtiment de l’Indépendance. Ils y ont également créé une foire, qui a attiré les gens des villages avoisinants. Cet espace-là était devenu un centre névralgique. On y fêtait l’indépendance de l’Inde chaque 15 août. Il y avait énormément de gens qui venaient y assister.” Petit à petit, des banques se sont ouvertes dans la région, ainsi qu’une salle de cinéma, transformant Lallmatie en un centre pour toute la région. “Le développement de Lallmatie a débuté ainsi.”

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