Le petit

— Pourquoi tu avais besoin de me voir tout de suite comme ça ?

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— C’est pour te parler d’une affaire grave… mais avant, pour qu’il n’y ait pas de malentendu, laisse-moi bien t’expliquer le contexte.

— Une affaire grave… tu me fais peur, toi. Qu’est-ce qui se passe comme ça ?

— Attends : hier, j’étais dans un food court quand j’ai entendu, par hasard, une conversation téléphonique.

— Tu écoutes les conversations des gens dans les food courts maintenant !

— Je savais que tu allais dire ça, c’est pourquoi il faut que je t’explique bien ce qui s’est passé. J’étais en train de manger des boulettes, quand j’ai entendu, de l’autre côté de la cloison, la voix de ta cousine X qui parlait au téléphone.

— Ma cousine X. Tu ne causes pas avec elle, mais tu écoutes ses conversations dans un food court.

— Je ne l’écoutais pas, mais elle causait tellement fort que je n’ai pas pu ne pas entendre ce qu’elle disait.

— C‘est vrai qu’elle cause fort. Qu‘est-ce qu’elle disait comme ça ?

— Tu sais bien que je ne veille pas les affaires des gens. Que je ne suis pas ce genre de palabreuses qui passent leur vie à causer des autres.

— Pourquoi tu me dis ça ?

— Parce qu’en écoutant, sans faire exprès, ta cousine j’ai appris une chose et je voudrais t’en parler.

— Une chose quelle chose ? Une chose grave ?
— J’en ai bien l’impression.
— Une chose qui me concerne ? Mais dis une fois de quoi il

s’agit, foutour va !
— Non, ça ne te concerne pas toi, mais ça concerne un

membre de la famille de ta cousine.
— Kisenla ?
— Je ne savais pas que ta cousine avait un enfant gravement

malade comme ça, moi.
— Comment tu peux dire que ma cousine a un enfant gra-

vement malade ?
— Je viens de te dire que je l’ai entendu dire, elle-même.
— Qu’est-ce que tu as entendu comme ça ?
—Elle parlait au téléphone à son mari, je crois.
— Pourquoi tu dis que tu crois qu’elle parlait à son mari ? — Parce qu’elle l’appelait “mo gâté”. Je ne pense pas qu’elle

appelle une autre personne que son mari mo gâté, non ?
— Qu’est-ce qu’elle lui a dit comme ça ?
— Elle disait qu’il fallait à tout prix avancer la visite du petit

chez le docteur. Je crois qu’il avait eu rendez-vous pour lundi de la semaine prochaine.

— Et alors ?

— Et alors elle a dit que le petit n’allait pas pouvoir tenir jusqu’à la semaine prochaine. Qu’il fallait s’organiser pour faire avancer le rendez-vous avec le docteur!

— Quel docteur ?

— Ça, je n’en sais pas. Tout ce que je sais, c’est qu’elle a demandé à son marin de contacter Y qui, paraît-il, connaît le docteur, pour faire avancer le rendez-vous.

— Ah, elle lui a dit de contacter Y ?

— Oui. C’est terrible toi. Quelle maladie qu’il peut avoir comme ça cet enfant ?

— Tu te trompes.

— Non je te dis j’ai tout entendu. Elle a ajouté qu’elle n’allait pas pouvoir passer une autre nuit à entendre le petit hurler et qu’ils avaient trop tardé pour le faire opérer…

— Écoute-moi un coup…

—… quel âge il a ce pauvre enfant. On dirait qu’il souffre terrible- ment, puisqu’il hurle toute la nuit. Il vaut mieux faire l’opération le plus vite possible, toi. Pourquoi ils ont tardé comme ça ? Parfois les parents sont un peu négligents, je te dis…

— Mais laisse-moi t’expliquer…

— C’est horrible toi, ce pauvre petit qui souffre comme ça. Qu’est ce qu’il a comme maladie ? Ayo, je suis bien chagrine pour lui…

—… laisse-moi te dire que…

— … ta cousine a dit à son mari qu’il ne fallait pas laisser le petit sortir de la maison. D’après ce que j’ai compris quand on le laisse aller dehors il se sauve…

—… mais évidemment.
— Ah, tu étais au courant, alors…
—… il faut que je te dise que…
—… elle a raconté que la dernière fois on l’a retrouvé près

de la rivière. Il aurait pu se noyer toi…
—… aio, foutour va, laisse-moi t’expliquer une affaire… —… attends laisse-moi finir, donc. Tu sais que ta cousine et moi on ne chasse ensemble. Mais dans le malheur il faut être solidaire. Dis à ta cousine que mon mari a un bon contact dans l’administration de la clinique qui peut faire avancer le rendez-vous. Si on peut l’aider dans ce moment difficile, on le fera sans hésiter. Tu sais comment on est quand il s’agit d’aider son prochain… même si on n’est pas bien avec lui… Mais dis-moi pourquoi tu ris ?

— Je ris parce que c’est trop comique…

— Je te propose d’aider ta cousine pour le rendez-vous de son petit et tu trouves ça comique ! ?

—… oui, je trouve ça comique… je vais dire à ma cousine que tu peux l’aider à avancer son rendez-vous chez le vétérinaire.

— Pourquoi tu parles d’un vétérinaire ?

— Parce que le petit dont la cousine parlait au téléphone avec son mari…

—… il a une maladie que seul un vétérinaire peut soigner ? Aio, toi comment ce petit a pu attraper ça ?

— Tout simplement parce que ce petit est… un chien.
— Quoi ?
— Oui. Ma cousine parlait de son petit chien qu’il faut faire

stériliser parce qu’il est en chaleur !

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