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Les Doigts d’Or : Faire d’un acquis à l’enfance son métier

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Les Doigts d’Or : Faire d’un acquis à l’enfance son métier

Jocelyne Adroit, 65 ans, et Annick Lafrance, 54 ans, sont deux sœurs qui ont trouvé leur bonheur dans l’entrepreneuriat. Jocelyne maîtrise parfaitement le crochet alors qu’Annick est une experte en conception des accessoires en macramé. Un savoir-faire appris de leur défunte mère après avoir abandonné le collège. Aujourd’hui, les deux sœurs opèrent sous leur entreprise baptisée Les Doigts d’Or. Elles aspirent à devenir chefs d’entreprise et d’ouvrir un magasin. Rencontre.

Issue d’une famille très modeste, Jocelyne Adroit raconte qu’elle a été forcée d’abandonner ses études après la Form II. Elle devait alors rester à la maison avec sa mère pour l’aider dans les tâches ménagères. « Après les travaux ménagers, ma mère avait l’habitude de pratiquer le crochet. À cette époque, toutes les femmes au foyer pratiquaient notamment la couture, la broderie, la fabrication de paniers en vakoa, le picot ou le crochet. Mais personne ne le faisait pour vendre. C’était une manière de vivre leur passion et de fabriquer des produits pour la maison », raconte-t-elle. Jocelyne avait alors 14 ans lorsqu’elle s’y est intéressée. Elle était toujours aux côtés de sa mère qui faisait le crochet.

« Je ne faisais que tenir les aiguilles. Mais, en même temps, j’observais attentivement ma mère pour apprendre le crochet. Effectivement, j’ai fini par savoir comment m’y prendre. Parallèlement, je pratiquais d’autres métiers pour apporter ma contribution financière à la maison. J’ai été couturière et jardinière en même temps », dit-elle.

Contrairement à sa mère, Jocelyne avait une tout autre ambition. Elle a su utiliser son savoir-faire pour gagner un peu d’argent. « Quand je fabriquais quelque chose, je la montrais à des proches, amis et voisins. J’ai commencé à recevoir des commandes. Puis, quand j’ai réalisé que mes produits étaient très appréciés, j’allais les vendre dans les foires. J’ai connu des hauts et des bas car les produits étaient des accessoires plus vendus en hiver. Mais je n’ai jamais baissé les bras », explique Jocelyne. Notre interlocutrice s’est inscrite à l’alors Small and Medium Enterprise Development Authority (SMEDA), grâce à sa petite sœur qui était déjà membre. « À la SMEDA, j’ai pu bénéficier de formations pour perfectionner mes produits de même que toutes les facilités disponibles qui m’ont permis de devenir femme entrepreneur », dit-elle.

Grâce à sa détermination et sa persévérance, Jocelyne a même pu ouvrir un magasin dans le supermarché King Savers. « J’avais un petit endroit, où je vendais mes produits. Mais, par la suite, j’ai dû fermer le magasin car le commerce n’était pas fructueux. Toutefois, j’aspire à rouvrir un magasin où je pourrais exposer et commercialiser mes produits car nous ne pouvons dépendre des foires seulement », affirme la femme entrepreneur.
Parmi les produits fabriqués par Jocelyne, nous retrouvons des sacs en crochet, des robes et autres vêtements pour bébés, et des accessoires, comme des chapeaux, entre autres. « Le genre de produits que je fabrique est apprécié de tout un chacun. Que vous soyez enfant, adolescent, adulte, Mauricien ou touristes, les accessoires en crochet vous sauteront à l’œil. Ils ont été confectionnés pour satisfaire tous les goûts », précise-t-elle.

Le macramé pour la petite sœur

Quant à Annick Lafrance, la petite sœur de Jocelyne, elle a été forcée d’abandonner les études après la Form IV pour les mêmes raisons. Elle a alors pris de l’emploi dans une usine. « J’ai travaillé pendant de longues années dans cette usine. Mais j’ai dû démissionner quand j’ai eu mon premier enfant. Pendant que ma sœur Jocelyne apprenait le crochet, moi, j’avais un penchant pour le macramé. J’ai appris à fabriquer toutes sortes d’objets en macramé pour les vendre dans les foires. Puis, quand mes enfants ont grandi, j’ai repris mon emploi à l’usine, sans pour autant abandonner le macramé. Valeur du jour, je travaille à plein-temps à l’usine et je fabrique des objets en macramé à temps partiel », fait-elle ressortir. 

Comme Jocelyne, Annick a acquis son savoir-faire de leur mère. « Ma mère était à temps partiel formatrice dans le centre social de Rivière-du-Rempart. Elle dispensait des cours de formation sur le macramé. Je devais l’accompagner pour lui donner un coup de main. Ainsi, j’ai appris à produire des objets également. Aujourd’hui, je suis contente que ses filles aient pu apprendre quelque chose d’elle. C’est ce qui nous a aidés à devenir femmes entrepreneurs », soutient Annick. Et de poursuivre que sa mère lui a appris à fabriquer qu’un seul modèle mais que son dévouement pour le macramé lui a permis d’épanouir et d’apprendre plus. « Grâce aux formations que j’ai suivies, j’ai non seulement perfectionné mes œuvres, mais j’ai aussi appris à produire différents modèles. Outre le macramé, je conçois aussi des objets muraux et des bouquets artificiels, entre autres », dit-elle.

Contrairement à Jocelyne, Annick ne produit pas en grandes quantités car elle a une clientèle différente. « Je produis principalement pour mes collègues de l’usine, qui passent des commandes de temps en temps, ou encore des amis et voisins. Puis, je participe à toutes les foires des PME organisées par SME Mauritius. Chaque fin de mois, je participe à une foire à Choisy Mall, organisée par le National Women Entrepreneur Council », indique Annick.

Travailler ensemble pour le reste de leur vie

Comme projets d’avenir, Jocelyne affirme que son âge ne devrait pas être une barrière dans son travail. « J’ai certes 65 ans, mais cela ne m’empêchera pas de persévérer. Je continue d’apprendre et je souhaite perfectionner davantage mes produits afin que je touche plus de clients étrangers. Ma sœur et ma fille me soutiennent énormément dans tout ce que j’entreprends. J’aspire à travailler pendant les vingt prochaines années et à gérer mon propre magasin. Et pourquoi pas devenir formatrice et transmettre mon savoir-faire aux jeunes », avance Jocelyne.

Pour ce qui est d’Annick, elle avance que l’usine dans laquelle elle travaille fermera bientôt ses portes. « Aucun des employés ne perdra son emploi. Une partie sera envoyée dans une usine à Beau-Bassin et l’autre, à Flacq », indique-t-elle. Elle ajoute : « En raison de mes problèmes de santé, je ne pourrai entamer de longs trajets. Je vais donc devoir abandonner mon job.

Par conséquent, je me consacrerai à l’entrepreneuriat à plein-temps et j’assisterai ma sœur dans ses projets. Si elle souhaite ouvrir un magasin, je l’aiderai à le réaliser. Ensemble, ce sera plus facile de réaliser nos rêves. » Par ailleurs, Annick aspire à devenir formatrice pour enseigner le macramé aux jeunes. « J’ai été par le passé appelé à dispenser une formation à des écoliers. Pourquoi ne pas renouveler cette expérience », conclut-elle.