Lutte contre l’évasion fiscal : Maurice à l’épreuve des FATCA/CRS

  • L’OCDE annonce des ‘peer reviews’ pour 2020 avec l’octroi d’un ‘rating’ à Maurice pour le Common Reporting Standard
  • La MRA fait part de sa satisfaction devant le Response des opérateurs

Le CRS (Common Reporting Standard) et la FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act) ont été introduits dans le cadre de la lutte contre l’évasion fiscale, notamment dans le sillage de la crise financière globale de 2008. Pour ce faire, il fallait donc traquer les transactions financières de tous les citoyens hors de leurs pays. Les juridictions doivent maintenant se conformer à ces deux lois pour continuer à faire du business avec les Occidentaux. Maurice a dû se conformer à ces deux nouveaux règlements, non sans difficultés au départ et les contraintes ont été nombreuses, sans oublier le coût de conformité. Mais aujourd’hui le bilan se présente comme étant positif.

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Pour la FATCA, les institutions financières locales traitant avec des individus américains sont tenues d’effectuer un reporting précis à la Mauritius Revenue Authority (MRA) sur l’état financier de ces clients chaque année. C’est la MRA qui effectue l’échange d’informations vers les autorités fiscales américaines (soit l’Internal Revenue Service pour la FATCA).

La MRA doit soumettre des informations requises par les autorités fiscales américaines (IRS) concernant les transactions financières des citoyens américains, avant le 30 septembre chaque année. Pour respecter ce délai, les institutions financières mauriciennes doivent soumettre à la MRA ces mêmes informations avant le 31 juillet. C’est le cas également sous le CRS. Cela fait maintenant quatre ans que le reporting se fait sous la FATCA et le bilan est positif, selon la MRA. « C’est un succès, nous avons un taux de conformité élevé », explique Kareemah Patel, du FATCA/CRS Unit de la MRA. « Tout le monde est conforme; je pense que c’est à cause de la pénalité, personne ne veut payer un impôt supplémentaire ! Maurice est très conforme, et chaque institution financière nous envoie ses informations à temps, puis nous les transmettons à l’IRS. »

Elle insiste d’ailleurs sur la confidentialité de ces informations. « Quand nous recevons des informations de telle nature provenant des institutions financières, nous ne parcourons pas les données et nous ne les utilisons pas. Nous les transmettons simplement aux autorités fiscales compétentes, et nous nous assurons qu’elles ne traînent pas dans les mains de tout le monde, même au sein de la MRA, » dit-elle. A cet égard la MRA a créé des unités spéciales pour gérer ces informations confidentielles. « Même dans le département informatique tout le monde n’a pas accès à ces informations. Nous avons une équipe spécifique dans le département informatique lui-même qui s’occupe de CRS et FATCA et ce sont les seules personnes à avoir accès à ces informations. L’information doit rester confidentielle à tout instant », précise Kareemah Patel.

Toutes les institutions financières qui gèrent des actifs des individus et sociétés (banques, management companies, fonds d’investissements, compagnies d’assurances, conservateurs de titres (custodians), asset managers, etc) doivent se soumettre à ces réglementations internationales. Il y a des milliers d’institutions concernés à Maurice, notamment dans le global business.

S’agissant du CRS, les institutions financières transmettent leurs informations sur les états financiers des non-résidents à la MRA qui, à son tour, dirige les informations au ‘corresponding tax authority’. En 2020 ou 2021, « ils vont démarrer des ‘peer reviews’, l’année dernière, nous étions classés comme ‘compliant’. L’OCDE va nous évaluer encore une fois, pour voir comment nous avons implémenté le CRS à Maurice et va nous donner leur ‘rating’. Bien sûr, nous voulons également être conformes au CRS. Ainsi, dans le cadre de ces ‘peer reviews’, la MRA effectuera des contrôles de conformité avec institutions financières pour voir si les procédures de due diligence sont correctement effectuées », poursuit Kareemah Patel.

Le CRS est entré en vigueur à Maurice le 1er décembre 2015 et la première année de ‘reporting’ pour Maurice était 2017. La différence entre la FATCA et le CRS c’est que la première nommée est basée sur le ‘citizenship’ et le second sur le ‘tax residency’. Imposée par les États-Unis, la FATCA est unilatérale et ne concerne que les citoyens américains et CRS, inspiré de la FATCA, a été initié par l’OCDE qui est multilatéral et concerne tous les non-résidents d’une juridiction et implique donc un ‘multiple jurisdictional reporting’. À fin octobre 2018, l’on comptait déjà 104 pays signataires pour le CRS.

Quoiqu’il en soit, ces dernières années, la phase d’implémentation et les conditions strictes à respecter sous la FATCA et le CRS ont été une réelle épreuve pour la communauté financière à Maurice. La FATCA par exemple a eu des implications assez importantes sur notre secteur global business en particulier, car on peut estimer qu’environ 25% des compagnies offshores incorporées à Maurice ont des actionnaires américains. Par ailleurs, une bonne partie de notre business offshore est liée aux États-Unis. Cela, sachant qu’environ 30 à 35% des investissements effectués par les Américains dans des pays comme l’Inde, l’Afrique et la Chine transitent par la plateforme financière locale, selon un fiscaliste.


Candice Muller : « When you strive to be transparent, you attract business »

Candice Muller, avocate sud-africaine, basée à Maurice depuis huit ans, s’est spécialisée depuis 2015 dans le CRS et la FATCA. Elle anime des présentations et formations sur le sujet pour les compagnies faisant appel à elle pour s’assurer qu’elles soient en conformité avec ces deux lois. Selon elle, Maurice est bien placée en termes de conformité à ces deux lois internationales : « Mauritius is seen a safe global tax environment. Mauritius did not drag the heels in signing the convention. Mauritius is always at the forefront in wanting to be compliant with OECD and also to be transparent ; and when you strive to be more transparent you attract business to your jurisdiction.»


La conformité, enjeu grandissant

La conformité à la FATCA et au CRS implique des coûts pour les institutions financières, surtout que les compagnies concernées ont dû revoir leurs procédures avec les nouveaux clients et le ‘due diligence’, pour s’assurer que les informations demandées soient obtenues afin de pouvoir les fournir à la MRA dans les délais prévus. En outre, la conformité de manière générale est un domaine qui prend de l’ampleur avec la sur-réglementation enclenchée depuis la crise financière. Selon le ‘Cost of Compliance Report 2018’ de Thomson-Reuters, deux tiers des sondés s’attendent à voir leur ‘compliance cost’ gonfler cette année et 43% se voient dans l’obligation d’augmenter leur équipe dédiée à la conformité au sein de leurs sociétés respectives. Mais un quart des sociétés externalise tout ou une partie de leurs opérations de compliance. Et 58% des firmes interrogées estiment qu’elles passeront davantage de temps à communiquer avec leurs régulateurs. En outre, la rémunération du « compliance staff » va augmenter dans les prochains mois, selon deux-tiers des sondés.

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