Maison Familiale de l’Ouest : L’école qui raccommode la complicité entre enfants et parents

Dans sa stratégie visant à accompagner des enfants en échec scolaires la Maison Familiale de l’Ouest a aussi inclus l’encadrement des parents. Dans cet établissement de Bambous, le système de travail a été adapté aux besoins de ses élèves pour les aider à s’épanouir et à intégrer le marché du travail. L’approche favorise la communication et la compréhension entre les uns et les autres.

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“Avant d’arriver ici j’étais comme un petit oiseau qui avait une aile cassée. Aujourd’hui on me l’a réparée pour que je puisse prendre mon envol”, témoigne Emmanuel 16 ans. Après trois ans à la Maison Familiale de l’Ouest, l’adolescent entame actuellement sa dernière année. Alors qu’il n’avait pu s’adapter au système éducatif conventionnel, ici il a appris la discipline, la rigueur, il a repris gout aux études et sait désormais ce qu’il veut faire. Il est actuellement en stage comme cuisinier au Casela. L’école de Bambous a travaillé tant avec l’enfant qu’avec ses parents pour rétablir la communication entre eux : “Avant, je ne comprenais pas mes parents, et, eux non plus. J’avoue que je n’ai pas été facile, non plus, mais j’ai enfin compris que ce qu’ils me disaient avait un sens. Surtout qu’ils me parlent différemment. Ce qui change beaucoup dans les interactions.”

La concentration est de rigueur

Cette approche visant à la fois parents et enfants a donné à la Maison Familiale de l’Ouest de permettre à plusieurs “petits oiseaux” égarés ou blessés de prendre leur envol dans la vie. “Je suis triste de partir mais ici on m’a appris à devenir responsable, à me calmer et à écouter. J’ai tous les éléments essentiels pour réussir ma vie et j’ai hâte”, explique Emmanuel.

L’importance des câlins.

Sylvana mère de Christopher, 15 ans, et Zachary, 7 ans, que sa vie a changé depuis que son aîné est dans cet établissement qui prend en charge des élèves n’ayant pas réussi à s’adapter dans le système prôné au niveau national. Alors que son fils a enfin appris le français, l’anglais, les mathématiques, les sports et l’agriculture Sylvana, comme d’autres parents, a aussi été accompagnée. Ainsi : “Ma relation a changé avec mes enfants et particulièrement avec Christopher. J’ai appris comment fonctionne un adolescent. J’ai toujours pensé qu’il fallait simplement qu’il obéisse sans poser de question.” Fière et épanouie, elle raconte avec enthousiasme son aventure et ses changements. L’école lui a permis de se retrouver et de s’affirmer.

La salle dediée aux recherches-Le Lab

Grâce aux cours d’alphabétisation à l’intention des parents qui en ont besoin, elle peut désormais lire le carnet scolaire de son fils pour le suivre de plus près dans ses études. Quelque chose qu’elle n’aurait pas imaginé avant. “Mon fils adore son école et étudie pour un métier. Moi, je suis comme une adolescente quand je viens, je rencontre les autres mamans et nous pouvons échanger sur des sujets différents. Je suis accompagnée ici. Imaginez-vous que c’est l’année dernière que  j’ai compris que mon fils de 15 ans a encore besoin de câlins. Comme il est grand, je n’osais pas car pour moi il refuserait. Mais grâce au cours sur les relations parents/enfants et en l’écoutant j’ai réalisé qu’il en voulait toujours.”

Un projet qui s’adapte aux jeunes.

Comme Sylvana, des dizaines de parents suivent ces cours. Certains en couples, d’autres seuls, les pères travaillant ils cèdent souvent la place aux femmes. “Nous essayons de nous adapter à ce nouveau monde. Les adolescents changent et il nous faut évoluer avec eux et nous cours doivent rejoindre la réalité”, explique Nicole Burzoo responsable de l’école.

Pensée positive

L’établissement scolaire prône une éducation plus basée sur les aptitudes de ses élèves et les aide, à renforcer leurs bases pour qu’ils puissent s’intégrer au monde du travail. Le programme est partiellement calqué sur celui des écoles de l’Adolescent Non Formal Education Network (ANFEN) qui s’occupe des élèves ayant des difficultés scolaires à travers le pays. Nicole Burzoo explique : “Les enfants que nous accueillons rencontraient des difficultés dans leurs anciennes écoles ; le niveau parfois trop élevé les désavantageait. Ils ont besoin d’un programme adapté et d’une attention particulière. Les enfants viennent de différentes classes sociales ; des plus basses aux plus aisées. Peu importe le milieu il existe des enfants en échec scolaire.”

L’école est financée en partie par des bailleurs, par l’ANFEN et l’Etat apporte aussi un certain soutien. La Forward Foundation de la MCB, a financé une salle avec des ordinateurs pour soutenir le projet. Afin d’encourager une implication totale des parents et des enfants, Rs 500 sont requises comme frais d’inscription. Initialement lancée sous le nom de Maison Familiale Rurale de Médine elle a récemment changé d’appellation et est devenue plus autonome dans ses décisions.

Avancer à leur rythme.

Selon leurs aptitudes les enfants sont répartis en trois niveaux différents. Les deux dernières étapes visant à préparer les élèves pour des stages en entreprise. A travers son cursus de trois ans l’école aspire à préparer ces jeunes pour le monde du travail.

Il est 10h, 21 adolescents attentifs et silencieux, prennent part à un cours d’anglais ayant pour thème : “My identity.” Ils entreprennent ensuite à se décrire dans leurs cahiers en précisant leurs passions, leurs adresses, leurs chansons préférées, etc. Le bruit des stylos se fait entendre et chacun s’applique. “En général, nous préférons en avoir 15 élèves par classe, mais cette année, tout comme l’année dernière, nous avons reçu une grande demande. Avec quinze élèves, il est plus facile de connaître leur prénoms, leur histoires et de passer plus de temps mais nous nous adaptons et faisons le maximum”, souligne la responsable.

Ici, dans la classe du Niveau 1 certains découvrent leur nouvel environnement. Ils ont un niveau basique et l’enseignante reprendra les bases.  “Ils apprendront à calculer correctement, à améliorer leur français et leur anglais. Mais elle ne pourra pas tout recommencer avec eux. Pour qu’ils puissent ensuite intégrer le niveau supérieur ils apprendront aussi à être plus débrouillards”,  explique la responsable. “Pour les maths, par exemple, je leur ai demandé de réaliser un projet représentant un burger de plusieurs couches pour qu’ils apprennent à calculer avec. Le but est d’être amusant et éducatif à la fois, ils retiendront beaucoup plus l’essentiel”, souligne l’enseignante fraichement arrivée.

Les réglements de l’école

Du slam pour apprendre.

Fabien 25 ans, ancien enseignant au Collège Père Laval, a rejoint la Maison Familiale de l’Ouest depuis un an et demi. Il explique : “Je privilégie le slam comme méthode d’éducation pour leur permettre de mieux s’exprimer que ce soit en anglais, français ou en kreol dépendant de leur niveau mais aussi pour développer leur créativité. Le slam aide aussi à mieux lire et écrire. Quand ils ont des récits à faire, c’est un plus.” L’agriculture et le sport font aussi partie de ce qu’il enseigne : “Le contact avec les enfants est important. Je ne connais pas uniquement le prénom mais aussi la vie de chacun de mes élèves. Ce qui me plaît ici c’est de pouvoir participer pleinement au développement de l’enfant.”

10h30 : une pause pour les enfants. L’école située dans l’arrière cours de l’église de St Sauveur offre une petite cour calme et agréable pour la détente. Tout est sur surveillance et les enfants acceptent parfaitement bien les consignes.

Le respect et la communication sont des composantes essentielles à la réussite. L’école accorde une importance capitale à ces valeurs. “Nous sommes une famille. Parlez si vous avez un problème et ayez du respect pour les autres, si vous voulez du respect en retour”, peut-on lire sur le grand tableau blanc à l’entrée. En sus des cours en alphabétisation les parents suivent aussi des formations en communication pour mieux comprendre l’adolescent, ses réactions et comment créer des liens. Des formations avec un psychologue sont aussi au programme pour rétablir la communication entre les parents et leurs enfants.

Pour s’assurer que tout le mode soit impliqué, Joana, travailleuse sociale, se rend chez les parents régulièrement : “Je fais la liaison entre les enfants et les parents, pour que tout se passe bien. Il y a des suivis réguliers pour que nous puissions être toujours au courant des difficultés afin d’intervenir. C’est aussi là que notre école est différente. Parfois, certains parents ne sont pas disponibles, mais nous leur faisons comprendre l’importance d’être impliqués.

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