MCIT : L’ICAC réagit enfin à l’affaire de Protection Money

Il a fallu attendre que Harish Boodhoo, qui avait dénoncé l’affaire de Protection Money en 2007, adresse une lettre le 28 mars dernier à l’Independent Commission against Corruption pour que cet organise fasse enfin savoir que « the files have been referred to the DPP with the recommendations of the Commission » et que « upon advice of the DPP, same have been referred to the Commissioner of Police for disciplinary action to be instituted ». La lettre qui est signée du directeur des enquêtes C. Ghoorah ne mentionne aucune date quant au mouvement des dossiers de l’ICAC au DPP et du DPP au commissaire de police ni ne mentionne-t-elle les noms des cinq officiers qui sont sous le coup dune procédure disciplinaire.
Cette affaire, qui avait provoqué un grand coup de tonnerre en 2007, avait commencé avec une longue lettre de Harish Boodhoo à la presse et une déposition consignée à l’ICAC le 23 novembre de la même année sur les méthodes utilisées par la Major Crimes Investigation Team (MCIT) et qui constituaient un vrai système mafieux. Toute l’affaire avait été portée au Parlement par le leader de l’opposition le 27 novembre 2007.
C’est feu Prem Raddhoa qui avait dirigé la MCIT et la CID de Curepipe jusqu’à son décès le 1er octobre 2007. Il avait été réhabilité par Navin Ramgoolam après le retour de ce dernier aux affaires en juillet 2005 alors que son prédécesseur, sir Anerood Jugnauth, l’avait envoyé au garage de la SMF après ses nombreuses frasques et les méthodes musclées utilisées dans certaines enquêtes et qui lui avaient même valut des condamnations par les tribunaux.
Dans ses questions à l’Assemblée nationale le 27 novembre 2007, Paul Bérenger était revenu sur le « protection money » exigé de commerçants, de bookmakers et autres opérateurs économiques, de l’introduction d’un Debt Recovery Scheme dont le cas le plus cité alors était celui du jockey François Heroldt, de la mise en place d’une industrie de « laké fer blan » avec comme principaux agents des membres de la MCIT, de trafic dans les exhibits comme dans l’affaire des Rs 12 millions de bijoux en or saisis par la MCIT à St-Pierre le 5 août 2007, de l’affaire de Mare Longue marquée par l’arrestation de 11 suspects et la sasie de gandia pour une valeur de Rs 300 000 mais qui fut ensuite étouffée.
C’est un Premier ministre bien embarrassé qui avait dû répondre à ces accusations, d’autant que le commissaire de police d’alors, Ramanooj Gopalsingh, que Navin Ramgoolam avait choisi d’ignorer, sous prétexte qu’il était proche de son prédécesseur, Paul Bérenger, avait déjà décidé de référer toute l’affaire à l’ICAC.
Le chapelet des récriminations du leader de l’opposition contre la MCIT était interminable. Il devait parler de cet agent travailliste qui est allé voir la MCIT pour se plaindre du jockey François Heroldt qui lui devait apparemment Rs 200 000. Paul Bérenger avait alors raconté que « les MCIT Boys sont intervenus et ont emmené le jockey au poste de police de Trou-aux-Biches et l’ont interrogé jusqu’à deux heures du matin. Il y a eu des négociations et l’argent a été payé au poste de police. Des entrées existent dans le Diary Book du poste et il y a eu des appels téléphoniques ».
Une seule arrestation connue
En sus des détails donnés sur les affaires de Mare Longue et de St-Pierre, le leader de l’opposition avait décortiqué le système de Debt Collector mis en place par la MCIT en citant le cas de ce propriétaire de quincaillerie de Curepipe qui éprouvait des difficultés pour récupérer son argent auprès d’une contracteur. « La MCIT entre en jeu et terrorise le contracteur et le tour est joué, l’argent est payé ! » avait expliqué Paul Béranger. Navin Ramgoolam s’était alors contenté de répondre que « il ne faut pas oublier que les allégations sont sans fondement ».
Le leader de l’opposition reviendra aussi sur une question posée par son prédécesseur Nando Bodha le 15 décembre 2006 et qui portait sur un document intitulé La fête au Champ de Mars et qui détaillait les trafics en cours dans le monde hippique et sur le « départ soudain » de Bala Kamatchi qui, sous les menaces et les pressions, n’a pas fait plus de 24h à la tête de la MCIT et sur la dissolution de la Brigade des Jeux. Malgré son dossier à charge et une demande de commission d’enquête, le Premier ministre d’alors et d’aujourd’hui n’avait rien voulu entendre.
Il y eut bien une arrestation d’un membre de la MCIT le 22 novembre 2007 pour extorsion d’une somme de Rs 15 000 auprès d’une gérante de club privé. Et c’était tout. En parallèle avait aussi éclaté une affaire de « locker » que l’on disait bien garni au poste de police de Curepipe évoqué tant par Week-End que par Radio Plus qui avait abouti à l’interpellation, le 26 novembre 2007, de Gérard Cateaux, de Josian Valère et d’Anabelle Volbert. Les charges contre eux furent éventuellement rayées.
Harish Boodhoo avait, pour sa part, procuré moult détails à la police et à l’ICAC sur les policiers impliqués qui vivaient « beyond their legal means » et de leur « enexplained wealth » et que « all bank accounts and properties of some of the MCIT members will tell volumes ».
Si le principal dénonciateur est content de savoir qu’il y a eu une suite à cette sombre affaire sept ans après les faits, il s’étonne toutefois que les cinq policiers qui sont censées être sous le coup d’une mesure disciplinaire n’ont jamais été arrêtés et suspendus sur le champ et qu’ils aient continué à travailler comme si de rien n’était. Harish Boodhoo, qui continue à suivre ce dossier de très près, évoque le recyclage de certains de ces officiers de la MCIT au sein de la Police Welfare Association.

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