National Youth Parliament : un air de fraîcheur souffle sur l’hémicycle

  • Le pari de ces 75 jeunes qui font aussi bien que les chevronnés de l’Assemblée nationale

Depuis hier, l’hémicycle revit une nouvelle jeunesse. C’est le cas de le dire en ressentant cet air de fraîcheur avec les échanges passionnés de la deuxième édition du National Youth Parliament, qui a pris fin à la mi-journée. Ces 75 jeunes choisis pour participer au National Youth Parliament, ont fait la démonstration de leurs capacités à assumer pleinement leur rôle de parlementaire. Cette édition est cependant différente de la précédente car, prenant à contre-pied l’histoire politique locale, le poste de Premier ministre a été attribué à une jeune femme. Ce n’est nullement un hasard que le Deputy Prime Minister et leader du Muvman Liberater, Ivan Collendavelloo, a saisi cette occasion pour faire un plaidoyer en faveur d’une meilleure représentation de la Mauricienne à l’Assemblée nationale. Puis comme les Full-Fledged travaux de l’Assemblée nationale, les débats du National Youth Parliament ont été diffusés par le truchement de la Parliament Television.

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Après une semaine de préparation par les officiels du bureau de la Speaker, Maya Hanoomanjee, et les dernières retouches de jeudi matin, grâce au concours d’anciens participants de la première édition du National Youth Parliament, ces 75 jeunes étaient enfin prêts à assumer le rôle de membres de l’Assemblée nationale pour deux jours. Cet exercice, dit-on, n’a pas été trop compliqué pour eux, étant donné qu’ils ont fait montre de leur détermination et leur dynamisme lors de la phase de sélection.

La séance de la Private Notice Question (PNQ), dont la durée a été déterminée pour ne pas dépasser la tranche consacrée aux autres PQs et motions des députés, a permis de se rendre compte de l’éloquence des jeunes. Khamlichi Florian Alexandre Hicham, leader de l’opposition de ces deux jours, en avait ainsi une axée sur la stratégie du gouvernement pour soutenir les acteurs du secteur privé afin qu’ils puissent prendre avantage des opportunités d’investissements en Afrique. Une question adressée à la Première ministre et ministre des Finances, Deepshikha Parmessur. La réponse à cette question, concise et donnée avec beaucoup de poigne et d’agilité d’esprit, a conquis les parlementaires présents, qui laissaient paraître un sourire de temps en temps. Cette séance a aussi été marquée par plusieurs tapes sur la table des deux côtés de la Chambre, histoire de démontrer leur capacité à parfaitement imiter les élus du moment.

Ce sont d’ailleurs les aptitudes de Deepshikha Parmessur qui expliquent que cette habitante de Rose-Belle a été retenue comme Première ministre et ministre des Finances. Ancienne étudiante à l’université de Bucknell aux États-Unis, Deepshikha Parmessur, du haut de ses 22 ans, repart en Afrique du Sud pour y travailler. Sa participation au National Youth Parliament se fait donc durant son passage à Maurice.

« J’ai obtenu une bourse en Afrique du Sud après mon School Certificate pour poursuivre mon Higher School Certificate à l’African Leadership Academy. Après deux ans d’études, je suis partie aux États-Unis pour mes études, qui ont duré quatre ans. J’ai également fait six mois à l’université de Genève pour apprendre la Public International Law », explique la jeune fille, qui a aussi travaillé avec l’ancien secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, dans une fondation. Après ce parcours, Deepshikha Parmessur s’est aussi rendue en Ouganda, où elle a travaillé pendant six mois afin d’enseigner la Social and Financial Literacy.

En participant au National Youth Parliament, elle ne visait toutefois pas le poste de Première ministre. « Je ne connaissais personne quand je suis venue ici. Ma participation ne visait pas à devenir Première ministre, mais à apprendre, car je me sentais fort déconnectée de la politique mauricienne. Cette initiative est un moyen pour apprendre et réapprendre comment les choses se font », dit-elle encore.

Deepshikha Parmessur a aussi un caractère de fonceuse. Pour preuve, alors qu’au départ sept garçons avaient postulé pour le poste de Premier ministre, elle n’a pas hésité à y ajouter son nom, devenant ainsi la seule fille parmi les postulants. Et c’est après son discours qu’elle a été sélectionnée. Cependant, Deepshikha dit avoir aussi beaucoup appris de ses “rivaux” et nouveaux amis. Quant à son “élection”, elle la doit peut-être justement à sa facilité d’élocution. Il faut dire que la jeune fille a de l’expérience en la matière, ayant en effet notamment déjà pris la parole devant une forte assistance lors de ses participations au Model United Nations et Model African Union alors qu’elle était encore élève au Mahatma Gandhi Institute de Moka. Deux événements où elle avait obtenu le prix de “Best Delegate in Best Delegation”.

En face, Khamlichi Florian Alexandre Hicham a pris la place réservée à Xavier-Luc Duval, endossant le poste de leader de l’opposition. Responsabilité dont le jeune homme s’est d’ailleurs sorti avec brio. Khamlichi Florian Alexandre Hicham, qui débutera ses cours en droit et relations internationales à la Middlesex University en octobre prochain, participe pour la première fois au National Youth Parliament.

Parfait bilingue

Ayant une parfaite maîtrise de l’anglais comme du français, ce qui le distingue d’ailleurs de nombre de nos véritables parlementaires, le jeune homme a fait montre d’un grand talent oratoire, faculté qu’il doit aux compétitions auxquelles il a participé dans le passé. Sans compter qu’il avait également pris part à une compétition de débats politiques organisée par l’ambassade américaine. Pour autant, pour lui, le National Youth Parliament est « une initiative unique ».

Dans le rôle du Speaker, l’on trouve Mitradeva Rao Sydaman, lequel était assurément à sa place et aura marqué les esprits. Lors de la séance de jeudi, ce dernier était d’ailleurs impressionnant. Et ce qui l’est encore plus, c’est qu’il en était à sa première participation pour un événement national de cette envergure. Ainsi, malgré quelques « flottements » en début de séance, Mitradeva Rao Sydamah aura réussi le délicat exercice consistant à équilibrer les débats en se conformant au Standing Orders de l’Assemblée nationale. « C’est un poste “challenging”, car je me trouve dans le feu de l’action à chaque fois », explique ce jeune habitant de Tyack, âgé de 20 ans à peine, et qui en est à sa deuxième année à l’Université de Maurice.

De son propre aveu, sa tâche n’était « pas facile », les “députés” connaissant en effet autant leurs sujets que les “Standing Orders”. Ces derniers ne lui ont cependant pas fait de cadeau. Toutefois, Mitradeva Rao Sydamah, disant avoir ressenti cette pression permanente, pense avoir été à la hauteur de ses responsabilités temporaires. Apprendre les “Standing Orders” n’aura « pas été trop difficile », dit-il. Et il faut avouer que Mitradeva aura su montrer sa capacité à faire régner l’ordre dans la Chambre lors de petits brouhahas en se montrant ferme. D’ailleurs, il dit avoir apprécié que les “députés” lui témoignent du respect. Ce qui est la moindre des choses, car c’est lui qui préside la séance.

La petite remarque du Speaker du National Youth Parliament à l’effet que les parlementaires ne doivent pas lire de discours écrits mais intervenir de manière spontanée pour développer leurs arguments aura poussé plus d’un des chevronnés à réfléchir sur cette pratique abusive ces jours-ci.

Malgré leurs talents, les participants de la cuvée 2019 du National Youth Parliament n’auraient pas aussi bien réussi sans le concours des jeunes ayant pris part à la première édition. Malgré leurs études et leur emploi du temps chargé, une dizaine de jeunes sont en effet venus prêter main-forte à l’équipe de préparation de l’événement. Zakarriyyah Ismail Bawamia, étudiant en Computer Science en Malaisie, en vacances actuellement à Maurice, n’a ainsi pas hésité à offrir son aide pour que cette deuxième édition soit meilleure que la première. Élu comme Speaker l’année dernière, il dit ainsi avoir appris « de nombreuses choses, comme les “Standing Orders” et les “Proceedings” de l’Assemblée nationale ».

« Lorsqu’ils ont dit qu’ils recherchaient ceux qui avaient participé l’année dernière pour être les mentors des nouveaux, j’étais très heureux, car j’ai pu guider le Speaker de cette édition. Son travail n’est en effet pas facile », dit-il. Zakarriyyah Ismail Bawamia caresse d’ailleurs le rêve de devenir un jour parlementaire. Aussi, le fait d’avoir participé à la première édition lui a donné la chance de pouvoir être dans la peau d’un député. « C’est un rêve qui s’est réalisé », dit-il. Cet ancien élève du collège Sir Abdool Raman Osman de Phoenix n’y va d’ailleurs pas par quatre chemins : « Sans vouloir manquer de respect aux parlementaires actuels, il faut plus de jeunes et plus de femmes au Parlement ! »

Expulsé par le Speaker l’année dernière, Anas Sakhawoth – qui avait alors endossé le rôle de ministre mentor –, est lui aussi venu donner un coup de main aux participants. Étudiant en droit à la Lancaster House, il dit avoir « beaucoup appris » lors de son passage à l’Assemblée nationale, ce qui lui aura en outre permis de réaliser son rêve « d’aider la population », dit-il. « Les jeunes qui participent ne savent pas ce qu’ils ont à faire. Aussi, nous leur avons donné beaucoup de conseils et nous les avons aidés. » Anas Sakhawoth dit avoir « beaucoup de respect » pour le Parlement, raison pour laquelle il tenait à être une nouvelle fois présent pour l’occasion.

L’ancien “Premier ministre” Pouvarajen Canjamalay, lui, n’a également pas manqué de revenir au Parlement. Pour lui, l’expérience de l’année dernière aura été « inoubliable, mais surtout un grand honneur ». Selon lui, « le poste de Premier ministre n’est pas facile, car il faut s’assurer que l’équipe soit sur la même longueur d’onde ». Il poursuit : « Il faut que le Premier ministre ait une bonne équipe et qu’il sache prendre des décisions pouvant paraître sévères. »

Pour le jeune homme, si un membre du gouvernement veut claquer la porte, « il a le droit de le faire sans que le Premier ministre ne cherche à le dissuader ». Pour autant, « en tant que Premier ministre, il faut être sévère et montrer au public qu’on a la capacité de mettre de l’ordre ». Sans compter que le Premier ministre « doit pouvoir contrôler son équipe et ne pas céder au chantage ».

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