NICOLAS RITTER (ACTIVISTE ET DIRECTEUR DE PILS): La répression aggrave les choses

Les politiques qui sont centrées seulement sur la répression de l’usage des drogues ne fonctionnent pas. Pire, elles ne font qu’aggraver le problème. Je crois fermement que la dépénalisation de l’usage des drogues doit être aujourd’hui considérée avec le plus grand sérieux.
Si envoyer des personnes en prison pour la seule raison qu’ils sont malades avait été efficace, nous aurions remplacé les hôpitaux par des institutions pénitentiaires depuis longtemps. En effet, la dépendance est aujourd’hui une maladie bien connue. L’année dernière, une dizaine de médecins mauriciens ont reçu une formation en Addictologie, parallèlement au Diplôme Universitaire de Sidénologie (Sida). De même, la question des dépendances aux drogues ainsi que la NATReSA sont placées sous l’égide du Ministère de la Santé et de la Qualité de la Vie. Il existe donc désormais un début de reconnaissance à l’Île Maurice sur le fait que, lorsque nous parlons des personnes qui prennent des drogues, nous avons affaire à une problématique de santé publique.
Pourtant l’actuelle politique gouvernementale régie par des lois telle que la Dangerous Drug Act enferme des Mauriciennes et des Mauriciens sur le seul fait qu’ils consomment un produit déclaré illicite par ces même autorités. Au nom de quoi ? D’une politique internationale de “War on Drugs”, qui a montré et démontré son inefficacité, son inhumanité et sa perversion.
En effet, enfermer des personnes qui sont victimes de dépendances ne soigne pas. Pire, cela ne fait qu’encourager le surpeuplement des prisons, qui deviennent de véritables académies de la délinquance et du crime organisé, sans compter que ces mêmes prisons deviennent des foyers importants de transmission du virus du Sida et de celui de l’hépatite C. C’est en grande partie à cause de cette politique inadaptée qu’aujourd’hui, un prisonnier mauricien sur quatre est séropositif.
N’oublions pas que les personnes qui deviennent dépendantes des drogues s’éloignent des centres de soins avec tous les risques que cela comporte, tant sur le plan de la santé que celui de la marginalisation.
Le trafic, lui, ne fait qu’augmenter, et n’oublions pas que la seule motivation des individus qui en sont à l’origine, c’est le profit. C’est donc au trafic qu’il faut s’attaquer, et non pas aux personnes qui en sont les victimes.
Si nous voulons réellement diminuer les infections transmissibles telles que le VIH/Sida et l’hépatite C, réduire la criminalité et l’impact de l’usage des drogues à l’Île Maurice, nous devons maintenant revoir totalement nos politiques en vigueur. Les sommes colossales engagées pour financer cette répression excessive seraient certainement plus efficaces et mieux utilisées pour de vrais programmes de prévention, d’accompagnement et de réinsertion des personnes usagères de drogues. Je suis convaincu que la révision complète des stratégies sur l’usage des drogues doit aujourd’hui s’harmoniser avec le cadre national de lutte contre le Sida, car ce dernier prend en compte la vulnérabilité accrue des personnes qui utilisent des drogues.

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