Nine-Year Schooling : La réforme du CPE pour le meilleur ou pour le pire ?

Présentée depuis 2015 et entrée en vigueur depuis 2017, notamment à travers le PSAC – qui a remplacé les examens du CPE –, la réforme se voulait tendre vers « l’épanouissement total de nos enfants », ainsi que le disait le manifeste électoral. Deux ans après, le Nine-Year Schooling a-t-il soulagé le stress des enfants et éliminé la compétition au primaire ? Cette réforme est-elle pour le meilleur ou pour le pire ? S’il est bien vrai qu’il faudra attendre quelques années pour en avoir une bonne jauge, notamment au secondaire, où la réforme n’a pas vraiment démarré encore, au primaire, beaucoup s’accordent déjà à dire que le stress et la compétition sont plus que jamais patents.

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Moonsamy Sunassee, ancien président de la Mauritius Head Teachers Association, se dit d’avis que « le “ranking” est toujours là » implicitement en dépit de la régionalisation. Il se demande « où est la réforme » vu que « la compétition est toujours là avec le PSAC ». Il constate qu’il y a encore « ce “rush” vers les “high demand schools” ». L’ancien maître d’école se dit « en faveur » d’un système qui canalise l’enfant là où il a du potentiel. De son côté, Suttyhudeo Tengur, négociateur de la Government Hindi Teachers Union, estime que « éliminer les leçons est une utopie car cela fait partie de notre système ». Il insiste sur le fait que ce système ne comporte pas d’examens mais des évaluations continues qui, concède-t-il, font que l’enfant demeure sous pression.

Mais, selon lui, c’est un choix exprimé par la population à travers les élections. Tout en saluant la ministre pour avoir tourné la page sur le CPE, estimant que c’est « un pas en avant », l’ancien ministre de l’Éducation, Steven Obeegadoo, observe toutefois que le « CPE a été remplacé par un PSAC tout aussi compétitif et stressant ». Selon lui, de 8 ans à 20 ans, le stress est « continu » chez les élèves. Il y établit même un lien avec la violence et la drogue synthétique dans notre société et constate que « dans la perception des parents, il y a toujours de bons collèges et de moins bons ». Il observe qu’il « faut faire cravacher les enfants à la fin du primaire pour accéder à ce qui est perçu comme étant un bon collège ».

MOONSAMY SUNASSEE (ex-président de la Mauritius Head Teachers Association) : « Le “ranking” est toujours là »

La réforme dans l’Éducation était censée alléger le fardeau des jeunes élèves. Or, nous nous retrouvons aujourd’hui avec six examens nationaux (Grades 4, 5, 6, 9, SC et HSC). Nos jeunes ne se retrouvent-ils pas en perpétuel stress du primaire à la fin du secondaire ? Où est l’amélioration ?

Je dois dire que j’étais pour la réforme de l’Éducation. Même le syndicat auquel j’appartenais, il y a deux ans, avait pris position en faveur de la réforme car le CPE était dépassé! Il fallait réformer notre système. La situation était mûre pour une réforme. On a donc connu la réforme accueillie par tout le monde. Mais, que voit-on maintenant ? Pourquoi avait-on critiqué le CPE ? Parce qu’il y avait trop de stress chez les enfants et c’était très compétitif. On disait que le système avait fait son temps. Mais, quand on regarde ce qui se passe aujourd’hui, on se demande où est la réforme. Quand on réforme, c’est pour progresser. Mais, on ne voit pas le progrès. La compétition est toujours là avec le PSAC. On a changé l’appellation du CPE. On a changé la désignation des classes. Au lieu de Std I, II etc., il y a Grade I, Grade II… Mais, si vous regardez l’admission en Grade I, on voit qu’il y a encore ce “rush” vers les “high demand schools” comme à l’époque du CPE. Même le ministère, dans un communiqué, avait publié la liste des “high demand schools”. Où est le changement donc, avec le nombre de sujets qui est resté le même ? On ne voit pas les changements auxquels on s’attendait.

Alors qu’autrefois, l’élève pouvait respirer entre le CPE et la Form V, le présent système fait qu’il y a des Modular Exams en Grade V, ensuite le PSAC, le National Certificate of Education (NCE) à partir de 2020 pour les élèves de Grade 9 pour l’obtention d’une académie, sans compter le SC et le HSC… Les Modular Exams et le NCE, qui sont des examens sélectifs, sont-ils vraiment nécessaires ?
Le problème avec le NCE, c’est que les enfants commenceront à prendre des leçons particulières à partir de Grade 7 (Form I). Avec l’ancien système, les collégiens commençaient à prendre des leçons à partir de Grade 10 (Form IV). Ce sera donc plus stressant. L’élève est donc appelé à prendre des leçons presque tout au long de son parcours scolaire.

Quelle était la réforme à laquelle vous vous attendiez ?
Avec ce système, on met tous les enfants dans le même four, les broyant pour produire des académiciens. D’après ce système, le pays n’aura besoin que d’intellectuels. On se concentre trop sur l’aspect académique. Or, nous savons que, de nos jours, on parle d’intelligences multiples. Il y a des enfants qui ne sont pas académiquement doués mais autrement intelligents. Notre système se focalise trop sur le côté académique. À la longue, le pays aura besoin de plombiers, d’électriciens ou encore de mécaniciens. Il nous faut un système qui puisse identifier le talent de l’enfant dès le départ. Or, quand un enfant ne réussit pas le CPE ou le PSAC, on dit qu’il est bête. Non, il n’est pas bête mais il a d’autres capacités. Le système ne favorise pas le développement de l’enfant en dehors de l’académique. Il faut un système qui canalise l’enfant là où il est capable. Il faut abolir les examens surtout au primaire.

On dit avoir aboli le “A+” en Grade 6. Ne pensez-vous pas que c’est encore indirectement en pratique puisque les collèges régionaux n’ont pas tous le même niveau. N’est-ce pas toujours la performance académique qui détermine de fait l’accès aux meilleurs collèges ?
Moi, je crois que le “ranking” existe toujours. Autrefois, celui-ci était officiel. Le public allait prendre connaissance du nom de son enfant, et même ceux des autres. C’était mauvais. Aujourd’hui aussi, je pense que le “ranking” est toujours là mais cela se fait en catimini. Dire qu’il n’y a plus de “ranking”, je ne le crois pas. Il y a une dose de régionalisation. On prend en considération la résidence de l’enfant mais il y a aussi le “ranking” pour allouer un collège.

Quel système serait idéal pour l’attribution des collèges ?
Il faudrait niveler les collèges. Ensuite, il n’y aura pas ce problème. Il y a tout un travail à faire. Je sais que ce n’est pas facile. Cela demande beaucoup de courage. Il y a des collèges dont le niveau laisse vraiment à désirer. Il faut revoir le système dans son ensemble.

Nous constatons aussi que les parents sont de plus en plus nombreux à opter pour des établissements privés payants…
Si on regarde les statistiques, le nombre d’enfants dans les établissements publics diminue drastiquement tandis qu’il y a une demande accrue pour les établissements privés payants. Cela montre que les parents n’ont pas confiance dans les écoles publiques. Il y a des parents qui sont riches et qui peuvent payer mais il y a aussi des parents de classe moyenne, voire parfois en dessous de la classe moyenne, qui se sacrifient pour envoyer leurs enfants dans ces écoles. Ils préfèrent payer car ils n’ont plus confiance. Le gouvernement doit pouvoir restaurer cette confiance.

Les leçons sont plus que jamais présentes avant même le Grade V alors que c’est interdit…
La réforme n’a rien changé. On avait critiqué le CPE pour son lot de stress, de compétition et de leçons mais tout cela est encore là.

En quoi finalement le Nine-Year Schooling est-il meilleur que l’ancien système ? Pensez-vous qu’on pourra avoir des jeunes épanouis avec ce nouveau régime ?
À ce jour, on ne peut le dire. On ne peut prédire ce que cela donnera dans trois, cinq ou dix ans. Mais, pour l’heure, on ne voit rien de positif et de valable. Je souhaite qu’on trouve un système pour canaliser les enfants selon leurs compétences. Prenons l’industrie sucrière. Avant, on ne pensait que canne/sucre. Maintenant, on se rend compte que, suite au problème avec le sucre, il faut se tourner vers l’éthanol, la bagasse et la mélasse, entre autres. On peut faire une analogie avec l’Éducation. Actuellement, on juge l’enfant surtout sur sa performance académique. Il faut développer d’autres compétences.

SUTTYHUDEO TENGUR (négociateur de la Government Hindi Teachers Union) : « L’enfant reste sous pression »

La réforme dans l’Éducation était censée alléger le fardeau des jeunes élèves. Or, nous nous retrouvons aujourd’hui avec six examens nationaux (Grades 4, 5, 6, 9, SC et HSC). Nos jeunes ne se retrouvent-ils pas en perpétuel stress du primaire à la fin du secondaire ? Où est l’amélioration ?
La réforme du Nine-Year Schooling constituait un des grands axes de la réforme annoncée avant les dernières élections générales et qui figurait même dans le manifeste électoral. Ce qui signifie que la population y a donné son assentiment à travers les élections. Il s’agit d’“assessments” et non pas d’examens. Dans le cycle primaire, la réforme du 9-Year Schooling a apporté le “continuous assessment” et non les examens.

Mais il y a les examens du PSAC, il y aura dans deux ans le NCE en Grade 9, des examens sélectifs pour l’admission dans une académie…
Le cycle primaire ne comporte pas d’examens. Il y a des “continuous assessments”. L’appellation même du PSAC (Primary School Achievement Certificate) ne fait pas mention d’examens.

Oui, mais ce sont quand même des examens…
Le CPE, c’était des examens. Avec le système actuel, il y a des examens et des Modular Assessments. Quand on parle d’“assessments” et de “continuous assessments”, cela implique que l’enfant demeure sous pression. Le “continuous assessment” entraîne une pression et des angoisses permanentes chez l’enfant. C’est connu à travers le monde. Mais, les parents et les décideurs ont voulu la réforme. Ils disaient que les examens étaient stressants. C’est un choix des partenaires concernés.

Qu’aurait-il fallu faire pour que les enfants ne connaissent pas ce stress permanent ?
Le système éducatif dans un pays n’est jamais stagnant. Il y a des changements. Mais, après tant d’années d’examens du CPE, la population a voulu un changement. Tous décriaient les examens du CPE alors que c’était des examens qui avaient fait leurs preuves. Aujourd’hui qu’on a introduit le PSAC, le système est une fois de plus décrié. Il faut savoir ce que les parents veulent : soit un système compétitif soit un système d’évaluation continue. Mais, cette réforme passe par les urnes. La population a donné son assentiment, on ne peut dire non.

Cette réforme, diminue-t-elle le stress et la compétition, selon vous ?
Cela va de soi que le système de contrôle continu stresse les enfants.

Quel système faudrait-il alors ?
On a le choix entre le système d’examens sélectifs et les évaluations continues. La population a déjà fait l’expérience du système compétitif. Maintenant, elle fait l’expérience du contrôle continu. Le vœu de la population était d’abolir le CPE. Un pays ne peut avoir ni examens ni évaluations.

Alors qu’autrefois l’élève pouvait respirer entre le CPE et la Form V, le présent système fait qu’il y a des Modular Exams en Grade V, ensuite le PSAC en Grade VI, le National Certificate of Education (NCE) en Grade 9, sans compter le SC et le HSC… Les Modular Exams et le NCE étaient-ils vraiment nécessaires ?
C’est parce que les parents ont fait ressortir qu’à 12 ans, l’enfant est trop jeune pour prendre part à des examens compétitifs qu’on les a repoussés au Grade 9 (Form III). Les décideurs auraient dû savoir que, quand on fait ces changements, notre système devient davantage “exam” et “assessment oriented”. Mais, tout passe par les élections. On n’a pas le choix maintenant. On doit accepter.

On dit avoir aboli le “A+” en Grade 6. Ne pensez-vous pas que c’est encore indirectement en pratique puisque les collèges régionaux n’ont pas tous le même niveau. N’est-ce pas toujours la performance académique qui détermine de fait l’accès aux meilleurs collèges ?
Dans un système éducatif, il y aura toujours des enfants qui seront académiquement plus forts et ils doivent avoir un établissement, où ils pourront s’épanouir. Il y a des enfants doués, moins doués et surdoués. Le système éducatif doit tenir compte de ces trois types d’enfants.

Le système actuel n’est-il pas un système déguisé de l’ancien où le “A+” et la compétition existent toujours ?
Que ce soit des examens ou des évaluations, la compétition existera toujours parce que nous vivons dans un monde compétitif. Le monde est compétitif et Maurice ne peut être à l’abri. Une société ne peut se permettre d’avoir un seul niveau.

Les leçons sont plus que jamais présentes avant le Grade V alors que c’est interdit…
Les leçons privées remontent aussi loin que l’existence de notre système éducatif. Elles existent dans d’autres pays aussi. À Maurice, nous avons la chance d’avoir l’Education Act qui fait provision pour la possibilité de contrôler les leçons privées. Malheureusement, la loi n’est pas mise en pratique. Éliminer les leçons est une utopie car cela fait partie de notre système. C’est basé sur un système compétitif où il y a de la place pour les doués, les surdoués et les moins doués.

En quoi finalement le Nine-Year Schooling est-il meilleur que l’ancien système ? Le système produit-il des jeunes épanouis ?
Tout dépend des parents. À l’époque du CPE, les parents se plaignaient. Aujourd’hui, il n’y a pas d’examens, les parents se plaignent encore. Il faut savoir ce qu’on veut. Si l’on croit qu’il peut y avoir un système éducatif sans examens, on se trompe.

Pourtant, de plus en plus de pays se dirigent vers l’abolition des examens et davantage vers des évaluations, non pour avoir des points mais pour jauger le niveau des élèves…
C’est ce qu’on fait. Nous suivons cette tendance depuis le primaire.

Ce n’est pas pareil. Le PSAC détermine non seulement le niveau mais aussi l’entrée dans les meilleurs collèges…
Vous vous trompez. L’accès aux collèges est basé sur la résidence de l’enfant et aussi sur ses résultats.

De plus en plus de parents choisissent les collèges privés payants. Qu’est-ce que cela démontre ?
C’est une indication que les parents croient toujours dans un système compétitif. Ils recherchent les examens et la compétition pour leurs enfants. Cela montre qu’ils ne croient pas dans la régionalisation. C’est un choix qu’ils font. L’État ne peut rien imposer aux parents.

Ne pensez-vous pas plutôt que c’est pour fuir le stress qu’ils se tournent vers le privé ?
Au contraire. Dans les établissements privés, il y a des examens.

STEVEN OBEEGADOO (ancien ministre de l’Éducation) : 
« Un PSAC tout aussi compétitif »

La réforme dans l’Éducation était censée alléger le fardeau des jeunes élèves. Or, nous nous retrouvons aujourd’hui avec six examens nationaux (Grades 4, 5, 6, 9, SC et HSC). Nos jeunes se retrouvent ainsi en perpétuel stress du primaire à la fin du secondaire… Votre regard en tant qu’ancien ministre de l’Éducation ?

Dans le manifeste électoral de l’Alliance, qui a accédé au gouvernement, la première phrase se lisait ainsi : « Retournons leur enfance à nos enfants », et plus loin : « Favoriser l’épanouissement total de nos enfants. » Un des maux principaux de notre système éducatif était le stress dû à une hypercompétition dans une perspective de sélection qui n’a plus sa raison d’être. Quand on nous a promis des réformes à partir de 2015, l’idée était d’échapper à cela. Mais elles n’ont pas eu cet effet. Avant, nous avions un système qui avait trois examens nationaux : CPE, SC et HSC et une évaluation nationale en Std V. Dans les faits, le stress commençait à partir de Std V. Ensuite, à partir de Form IV et en HSC. Désormais, nous avons deux évaluations nationales (Grade IV/V) et, cette année même, toute la controverse autour des examens de Grade IV, avec des questions qui ne figurent pas dans les manuels, démontre bien le stress que cela peut causer.

Désormais, dès le Grade IV, le stress est là. En Grade 7 (Form I), sachant qu’il y a un examen de sélection en Grade 9, où l’on sera orienté vers une Académie ou un collège régional, les leçons particulières deviennent impératives. Du coup, avec des examens nationaux en Grade IV, Grade V, le PSAC, qui était censé enlever tout le stress mais à travers lequel les examens sont répartis sur deux ans au lieu d’un an, sans parler de toute la confusion sur ce qui est enseigné et comment évaluer, tout cela fait que c’est un stress permanent. En Grade 4, l’enfant a 8 ans. Donc de 8 ans à 20 ans, c’est un stress continu. Comment ne pas lier cela à tout ce qu’on découvre en termes de comportements violents, d’incapacité à gérer la colère, le recours effarant à la drogue synthétique…

Pensez-vous que c’est pire que l’ancien système ?
En termes de stress, oui! Mais, ce qu’a fait la ministre de l’Éducation est un pas en avant. D’abord, le fait de tourner la page sur le CPE. Le fait de faire accepter par l’opinion publique qu’il peut y avoir quelque chose d’autre que le CPE. Je salue son courage car on était dans l’impasse. Deuxièmement, la régionalisation des admissions pour abolir le “ranking” qui avait été réinstauré en 2006. Il y a aussi l’idée d’avoir un programme d’études intégré qui inclurait le primaire et le premier cycle du secondaire avec une seule voie de progression.

Il n’y a plus cette séparation mainstream/prévoc mais tous les enfants étudient ensemble. Théoriquement, cette idée d’une éducation de base sur 9 ans avec un socle commun de connaissances et de compétences que tous les enfants doivent acquérir était un grand pas en avant. Mais, en pratique, le CPE a été aboli, oui, mais remplacé par un PSAC tout aussi compétitif, stressant, avec des manuels en retard, avec des profs nageant souvent dans la confusion la plus totale, avec des parents angoissés, avec un mode d’évaluation qui continue à ajouter à la confusion.

Que manque-t-il alors si, dans la forme, il y a des points positifs ?
Il faudrait que le niveau des collèges soit plus ou moins comparable, que l’information sur toutes les facilités soit offerte aux parents et qu’à la fin du jour, il n’y ait plus besoin de compétition dans une zone. Oui, on a aboli le “ranking”. Oui, on l’a remplacé par la régionalisation mais dans la perception des parents, il y a toujours de bons collèges et de moins bons. Donc, il faut cravacher les enfants à la fin du primaire pour accéder à ce qui est perçu comme étant un bon collège. De même, l’idée de remplacer le primaire et le premier cycle du secondaire par l’éducation de base est très intéressante théoriquement. Mais, dans la pratique, les mentalités sont les mêmes.

Les règlements du MES parlent  mais encore de “candidates”, de “resits”, de “core” et “non core subjects”. Cela n’a aucun sens! Si cet examen n’est censé être qu’une évaluation, on voit bien qu’il s’agit toujours d’un exercice de sélection très pointu… Si vous regardez la révision des programmes, c’est le comble de l’ironie. Le MIE parle de curriculum primaire et de curriculum secondaire. Donc, cette éducation de base intégrée ne l’est pas dans les faits. C’est une réforme faite de bonnes intentions et de projets très intéressants mais, dans la pratique, on a souvent l’impression que c’est du pareil au même. C’est vrai que c’est difficile d’innover mais c’est pour cela qu’une réforme se pense. Il n’y a pas eu une campagne pour convaincre. Il y a eu l’arrogance du pouvoir. On a été élu, maintenant, on décide et on impose…

Que faut-il pour une réforme réussie ?
C’est la planification minutieuse, la mise en œuvre et l’évaluation. Nous en sommes à la troisième année. Y a-t-il une évaluation ou faudrait-il attendre la prochaine campagne électorale?

De plus en plus de parents optent pour les établissements privés payants. Comment interprétez-vous cette démarche ?
D’abord, l’insatisfaction par rapport à l’offre de l’éducation financée par l’État. Il y a deux dimensions fondamentales où le système est un échec: la nécessité d’avoir une éducation équitable et inclusive, qui donne les chances à tous. Si vous regardez des enfants à besoins spéciaux (handicapés ou retard d’apprentissage), on parle de “remedial education” mais je ne vois rien de concret. On parle de diagnostic en Grade I, d’un deuxième diagnostic à la fin de la troisième année, je ne vois rien.

Au niveau du ZEP, rien n’est fait. À Curepipe, mon ancienne circonscription et la ville où j’habite, je rencontre des familles modestes qui consentent à des sacrifices incroyables pour envoyer leurs enfants dans une école privée payante parce que ces enfants ont des besoins qui ne sont pas pris en considération par l’école d’État. Des parents me disent qu’ils préfèrent envoyer leurs enfants dans une école privée payante que dans une école publique et payer tous les mois les leçons. C’est l’incapacité des écoles à financement public à être inclusives et équitables qui forcent à mon avis beaucoup de parents à recourir à l’enseignement privé. Le deuxième aspect est la qualité.

Troisièmement, il faut que l’éducation rende des comptes à la société et aux parents. Dans le privé, on paye et on tape sur la table pour demander de rendre des comptes.

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