NMH SAGA : Une note loin d’être réglée

La New Mauritius Hotels Ltd Saga, avec l’OPA avortée du début de 2016, pourrait se transformer en un élément perturbateur à la sérénité autour du run-up pour la présentation à l’Assemblaée nationale du prochain budget. Et pour cause, les conclusions du Special Investigator, Kriti Taukoordass, de Mazaars Ltd, et ancien partenaire d’affaires du ministre de tutelle, Sudhir Sesungkur, nommé par la Financial Services Commission (FSC), ont été remises à l’Acting Chief Executive Officer du régulateur en date du 22 mai avec une présentation PowerPoint pour les membres du board, présidé par le secrétaire financier, Dev Manraj, jeudi dernier. Au-delà des conclusions accablantes au sujet des infractions aux dispositions de la Securities Act, le fait le plus troublant est le quasi-refus de collaboration des directeurs de Rogers & Co Ltd, ENL Land Ltd, avec un chiffre d’affaires aggloméré de plus de Rs 21 milliards, et le groupe Swan, gérant des primes d’assurance de l’ordre de Rs 6 milliards, et la New Mauritius Hotels Ltd avec un turn-over de Rs 10 milliards. Devant cette difficulté, représentée par l’absence des versions de ces conglomérats économiques, le board de la FSC a pris la décision de soumettre tout le dossier du Special Investigation Report au vetting du Legal Adviser, Me Désiré Basset, Senior Counsel, en vue de décider de la marche à suivre dans ce qui est devenu une hot political and economic potato. Deux autres facteurs se présentent comme de potentiels trouble-fêtes pour la période budgétaire se résument aux agissements du leader du Reform Party, Roshi Bhadain, remettant en cause le projet de Metro Express, démarche assortie d’une menace de démission de l’Assemblée nationale, et l’épineux problème du remboursement des policy holders du Super Cash Back Gold du défunt groupe BAI avec entre Rs 9 milliards et Rs 12 milliards à trouver.
Une première étape a été franchie dans le scandale du rachat de 45,4 millions d’actions de New Mauritius Hotels Ltd pour un montant de Rs 1,4 milliard en l’espace d’une minute à la fermeture de la séance boursière du 16 février 2016. Mais dans les milieux officiels, l’on se dit conscient que la note de la NMH Saga est encore loin d’être réglée. Il s’avère qu’il sera impératif pour la FSC d’obtenir les explications des directeurs des conglomérats incriminés avant de « put the charges to them ». Le legal advice sur les conclusions du rapport Taukoordass devra être à l’agenda de la prochaine réunion du board de la FSC convoquée pour jeudi prochain, avec le monde des affaires suivant de près ce tug-of-war.
Toutefois, les premiers éléments d’informations, qui ont transpiré après la présentation PowerPoint du rapport au board de jeudi dernier tendent à confirmer des infractions multiples aux dispositions des Securities (Takeover) Rules pour avoir bloqué de manière intentionnelle un takeover bid, délit présumé reproché à Hector Espitalier-Noël, président du board de NMH Gilbert Espitalier-Noël, Chief Executive Officer du groupe, au notaire Jean-Pierre Montocchio, à Colin Taylor et à Louis Rivalland, d’insider dealing contre Hector Espitalier-Noël, Philippe Espitalier-Noë, de market rigging contre Rogers & Co Ltd, ENL Land Ltd et Swan Securities, et d’infraction à la section 116 de la Securities Act à l’encontre des membres du board de New Mauritius Hotels Ltd. Hector Espitalier-Noël est également cité comme ayant assumé un rôle de premier plan pour faire avorter la tentative de take-over bid initié par Sunnystars Ltd et ayant approché des membres du gouvernement pour les mettre en garde contre le risque d’un « disposal of government shares » au sein de New Mauritius Hotels Ltd.
À ce stade, l’élément confirmé dans le dossier est le refus de coopération et de collaboration de la part des principaux protagonistes avec le Special Investigator en vue de faire la lumière sur des zones d’ombre dans cette affaire. Pour étayer cet aspect de l’enquête, des recoupements d’informations effectués auprès des sources concordantes font état du bras de fer entre le Special Investigator et le Chief Executive Officer de Swan, Louis Rivalland, au sujet de l’audition de ce dernier. Ces mêmes sources avancent que les dessous de cet épisode sont révélateurs à plus d’un titre.
Après une première prise de contact informelle, le CEO de Swan devait retenir les services de Me Rishi Pursem, Senior Counsel, pour l’assister. Un premier rendez-vous en date du 5 avril fut annulé en raison des obligations professionnelles de Louis Rivalland, avec un renvoi au 12 avril. Finalement, après des échanges de mails, le CEO de Swan, accompagné de son homme de loi, devait rencontrer le Special Investigator pendant 40 minutes dans l’après-midi. Le stand du CEO de Swan était qu’il n’était pas disposé à répondre aux questions de Kriti Taukoordass ou encore de lui remettre les documents exigés.
Subséquemment, Me Pursem devait écrire officiellement au Special Investigator pour l’informer que le patron de la Swan remettait en question formellement sa nomination sous la section 44 A Financial Services Act. De ce fait, en vue de remédier à cette lacune, il n’est pas à écarter que les directeurs de Rogers & Co Ltd, ENL Land Ltd, du groupe Swan et New Mauritius Hotels Ltd seront confrontés à la teneur du rapport du 22 mai et un nouveau chapitre, qui leur sera consacré, soit annexé au document initial.
Dans l’immédiat, le rapport s’articule autour du témoignage crucial du directeur du National Pension Fund (NPF), Veenay Veenay Rambarassah, et aussi des détails fournis par ceux qui ont vendu les 45,5 millions d’actions ordinaires pour un montant de Rs 1,4 milliard, dont les confidences de René Leclézio de PAD à Philippe Espitalier-Noël au sujet de l’offre de rachat faite par Tevin Sithanen, d’Elysium Capital, au nom d’un consortium.
Accord secret
Le groupe Swan a été invité au rachat des actions de New Mauritius Hotels Ltd par ENL Land Ltd et Rogers & Co Ltd suite au refus catégorique à au moins deux reprises du National Pension Fund de participer à une concerted action pour faire échec à un hostile bid initié par Sunnystars Resorts Holdings Ltd, avec pour directeur Me Robin Mardemootoo, agissant de concert avec Ben Lim, d’Intercontinental Trust Ltd, depuis le 15 octobre 2015.
La chronologie des événements (voir détails plus loin) révèlent que le National Pension Fund fut approché dès décembre 2015 par Tevin Sithanen en vue de racheter les 5% d’actions du National Pensions Fund et du National Savings Fund au sein de la New Mauritius Hotels Ltd au prix agréé de Rs 29 l’action. Le National Pension Fund devait décliner cette première offre.
En février 2016, soit les 6 et 11, la direction du NPF fut formellement approchée par le groupe ENL en présence de l’Investment Advisor du NPF, Aon Hewitt, avec une proposition d’Hector Espitalier-Noël de participer à l’initiative visant à accroître l’exposure de son groupe au sein de NMH. Il devait ajouter qu’il avait déjà approché Rogers & Co Ltd et le groupe Swan à cet effet, et qu’il s’attendait à voir le NPF en faire partie. C’était lors de la réunion du 6 février 2016 alors que le groupe Taylor Smith et PAD étaient présentés comme les vendeurs.
Une présentation formelle de la performance et des prévisions du groupe NMH , justifiant le prix offert de Rs 29, et animée par Gilbert Espitalier-Noël, avait eu lieu le 11 février à l’intention du NPF chez Rogers. Le directeur Rambarassah du NPF devait répéter au Special Investigator ce qui était connu sur la place depuis des mois déjà. Le directeur du NPF avait mis en garde Hector Espitalier-Noël qu’une telle démarche équivaudrait au délit de « acting in concert » sous les règlements de la Securities Act. Hector Espitalier-Noël avait misé sur le fait que l’accord sur ce deal avec le NPF resterait un secret.
Au lendemain de la présentation du 11, le NPF s’était retrouvé avec une offre de 10 millions d’actions de NMH au prix de Rs 29. La logique du NPF à l’effet qu’il ne faisait aucun sens d’investir dans des actions de NMH avec une forte prime sur le prix du marché fut maintenue et Swan Life fut embrigadé pour conclure les transactions boursières des 16 et 18 février 2016, tuant dans l’oeuf une OPA contre ce groupe hôtelier.
Le coût de cette opération était de Rs 502 millions pour acquérir 3,58% des actions de NMH avec le même placement évalué à Rs 397 millions le 19 février 2016, soit une fair value loss de Rs 105 millions en un clin d’oeil. D’aucuns affirment que la posture du groupe Swan est des plus intenables car en se joignant au tandem Rogers & Co Ltd-ENL Land Ltd, ce groupe d’assurance s’est rendu complice du délit visant à masquer le seuil de 30% du capital d’effective control au terme de la Rule 33 et d’avoir avalé une « couleuvre boursière » au préjudice des clients de la compagnie d’assurance avec une prime de 16%.
Au cas où les conclusions du Special Investigator sont validées formellement, le débat sur le prix de la mandatory offer aux autres actionnaires à Rs 29.55 revient d’actualité, même si à ce jour ENL Land et Rogers & Co Ltd se sont cantonnés à une mandatory offer de Rs 21 par action, avec échéance au 27 mars dernier, confirmant que la note de la NMH Saga est bien loin d’être réglée

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