OPÉRATION GOLDFINGER – CONVOCATION À L’ICAC : L’épreuve de force

Depuis ce matin, une épreuve de force sur deux fronts a été engagée avec la convocation par l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) de l’ancien ministre des Finances Vishnu Lutchmeenaraidoo, dans le cadre de l’opération Goldfinger, avec en toile de fond l’Euro-Loan Saga de 1,1 million d’euros de la State Bank of Mauritius Ltd. En principe, Vishnu Lutchmeenaraidoo, qui était en congé maladie de l’hôtel du gouvernement depuis le 1er mars dernier, était attendu au QG de l’ICAC pour son interrogatoire Under Warning après le début de l’enquête sous les dispositions du Prevention of Corruption Act (PoCA) depuis trois semaines déjà. Le Leading Counsel du panel de conseils légaux autour de l’ancien ministre des Finances, Me Maxime Sauzier, Senior Counsel, a réclamé un délai pour le démarrage de cet exercice. Sur l’autre front, des tractations sont en cours sur le plan politique en vue de savoir si Vishnu Lutchmeenaraidoo se rendra au rendez-vous de l’ICAC en tant que ministre du gouvernement de Lalyans Lepep ou en tant que simple back-bencher de la majorité, comme cela a été le cas le 25 mars dernier pour l’ancien ministre de l’Environnement Raj Dayal, dans le scandale d’EIA Licence du Morcellement Gros-Cailloux.
Depuis samedi et dans le sillage d’un troisième Judge’s Order pour compléter la série de Banking Documentary Evidence de la State Bank of Mauritius Ltd avec la levée initiale du secret bancaire par le juge Iqbal Mahooa, siégeant en référé en date du 16 mars dernier, l’ICAC a convoqué par voie de lettre le ministre Lutchmeenaraidoo pour interrogatoire Under Warning dans l’affaire du prêt de 1,1 million d’euros (Rs 45 millions) à des taux d’intérêt fixes de 1,5 % par an. Le rendez-vous avait été fixé à 9 h 30 ce lundi matin. Mais le principal protagoniste dans le cadre de l’opération Goldfinger ne s’est pas présenté au Réduit Triangle pour les besoins d’enquête.
Me Sauzier, SC, dont les services ont été retenus par Vishnu Lutchmeenaraidoo, qui a fait servir deux mises en demeure au groupe Le Mauricien pour des réclamations de Rs 100 millions chacune, soit Rs 200 millions, a transmis une lettre succincte à la direction générale de l’ICAC pour réclamer un report de l’exercice du jour. La principale et unique raison évoquée est que l’homme de loi n’a pas eu le temps nécessaire pour des consultations avec le client-ministre. Toutefois, à la mi-journée, suite à des échanges entre les limiers de l’ICAC et les hommes de loi de Vishnu Lutchmeenaraidoo, un délai jusqu’à demain matin a été imposé pour l’interrogatoire Under Warning. Mais aucune des sources approchées par Le Mauricien n’a voulu apporter de confirmation à ce détail.
Selon des recoupements d’informations auprès de sources concordantes, l’enquête de l’ICAC a atteint un stade avancé avec les documents obtenus par le truchement de ces trois Judge’s Orders et également de l’audition des Top Guns de la State Bank of Mauritius, exercice qui a été complété en fin de semaine dernière. Lors de l’interrogatoire avorté du jour, Vishnu Lutchmeenaraidoo aurait été confronté à ces preuves susceptibles de soutenir un délit sous la section 7 du PoCA, soit « Public Official using his position for a gratification », pour le prêt de Rs 45 millions à 1,5 % par an.
De son côté, le ministre Lutchmeenaraidoo s’est rendu à son ancien bureau de ministre des Finances ce matin pour des séances de travail avec ses hommes de loi. En principe, depuis le 18 mars dernier, il aurait dû déménager de l’hôtel du gouvernement pour occuper les bureaux alloués au ministre des Affaires étrangères à la Newton House. La présence de Vishnu Lutchmeenaraidoo aux Finances, alors qu’il aurait dû se trouver au QG de l’ICAC, est devenue rapidement le « Talk of Government » alors que du côté du Prime Minister’s Office, cette démarche du chef de la diplomatie constitue un « sujet de gêne politique ».
Des sources bien informées à l’hôtel du gouvernement indiquaient qu’il fallait s’attendre à une réaction officielle du Premier ministre, sir Anerood Jugnauth, à la deuxième convocation d’un de ses ministres par l’ICAC en moins d’une quinzaine de jours. Le mot d’ordre de « Step Down », comme dans l’épisode Raj Dayal, devrait être de mise dans la conjoncture alors que des hommes de loi acquis à la cause de Vishnu Lutchmeenaraidoo ont tenté d’approcher les Police Headquarters des Casernes centrales pour comprendre pourquoi ce dernier a été convoqué formellement à cette étape de l’enquête.
Toutefois, à moins que la position du Premier ministre soit rendue officielle dans les meilleurs délais au sujet de la démission du ministre des Affaires étrangères pendant la durée de l’enquête officielle, la réunion du groupe parlementaire de Lalyans Lepep pourrait s’avérer houleuse. « On ne pourra pas empêcher Raj Dayal de crier à la discrimination lors des discussions au sein de l’alliance vu qu’il a été amené à soumettre sa démission avant même qu’il ne soit convoqué par l’ICAC. Dans le cas de Vishnu Lutchmeenaraidoo, il y a eu trois Judge’s Orders et aussi une convocation formelle pour interrogatoire en vue d’établir un Prima Facie Case dans cette affaire de prêt en euros de 1,1 million », fait-on comprendre dans les milieux de Lalyans Lepep.
Le groupe parlementaire de la majorité gouvernementale devra également passer en revue la situation par rapport au cas du PPS Thierry Henri, qui a passé une nuit en cellule policière suite à un accident fatal de la route et le délit d’Effecting Public Mischief pour avoir fourni intentionnellement des informations erronées à la police au sujet de l’identité de la personne qui était au volant de cette « Official Car » allouée au PPS au moment de l’accident.

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