PARLEMENT: Adoption du Local Government Bill en l’absence de l’opposition

La nouvelle législation régissant les administrations régionales, le local Government Bill No. 30), a été adoptée hier soir par l’Assemblée nationale en l’absence des membres de l’opposition qui ont fait un walk-out alors que le ministre des Administrations régionales Hervé Aimée résumait les débats. « Cette action vise à dénoncer l’arrogance du ministre. De plus, nous voulions pas nous associer à une loi qui va à l’encontre de la démocratie. Dans son intervention, le Premier ministre a affirmé qu’il ne serait pas possible d’organiser les élections régionales durant le premier trimestre de l’année prochaine en raison de la série de fêtes religieuses et de la célébration de l’anniversaire de l’Indépendance. Navin Ramgoolam a donné les garanties que les élections ne seraient pas reportées à nouveau mais seraient organisées “as soon as it is practicable”. » Les travaux parlementaires ont été ajournés au mardi 13 décembre.
Dans une intervention de près d’une heure, le Premier ministre Navin Ramgoolam a expliqué que le nouveau texte de loi comprend une trentaine de changements par rapport au texte initial. Selon les points forts de cette nouvelle législation, c’est la première fois que le titre de Lord Mayor sera officiellement reconnu. Les conseils de district jumeaux seront séparés de manière à ce qu’il y ait les districts suivants : Pamplemousses, Rivière-du-Rempart, Moka, Flacq, Grand-Port et Savanne. Cette proposition a été sur la table depuis 40 ans. Elle a pu être concrétisée aujourd’hui en raison des fonds déboursés par le ministre des Finances.
La nouvelle législation prévoit la création de nouvelles villes « at any time later » à travers une procédure très simple. Finalement, toutes les municipales auront des arrondissements qui éliront trois conseillers. Ce qui fait que le nombre total de conseillers sera porté à 90 au lieu de 126 actuellement et les conseillers seront en mesure de rester très proches de leurs mandants.
Répondant aux remarques de l’opposition, Navin Ramgoolam a soutenu qu’il n’est pas vrai de dire que tout le texte de loi est illégal, comme l’a affirmé le leader du MMM. Pour lui, le désaccord entre l’opposition et la majorité réside dans une interprétation des législations. Le chef du gouvernement a rappelé que jusqu’ici les administrations locales étaient gérées par la Local Government Act (LGA) de 1989 et celle de 2003. « Instead of clarity we have to deal with a confusion of the application of two pieces of legislation concerning the local government. » Selon lui, ces deux législations avaient créé un « galimatias » qui a donné lieu à des allégations selon lesquelles le président de la République a été traité avec « contempt and that this bill is illegal ».
Navin Ramgoolam a observé que plusieurs clauses de la LGA de 2003 n’ont jamais été proclamées. À ceux qui reprochent au gouvernement d’avoir renvoyé les élections, Navin Ramgoolam a souligné qu’ils ont la mémoire courte, ayant oublié que le MMM a participé à la décision de reporter la tenue des municipales à deux reprises et des élections villageoises à trois reprises. À cette époque, a rappelé le Premier ministre, le leader de l’opposition, qui était ministre des Finances, avait dit que « c’est un petit renvoi obligatoire ». Par ailleurs, le chef du gouvernement a observé que l’article 4 de la LGA de 2003 n’a jamais été mis en application « because they did not go forward with the twelve municipal councils ».
Le Premier ministre a estimé que le député de l’opposition Steve Obeegadoo a tout à fait tort lorsqu’il affirme que « the government is using a grey area and by subterfuge has done what it has done. No ! This is a new bill and the Honourable Minister was entitled to include the schedules in it ». Revenant sur la question de découpage électoral, Navin Ramgoolam a expliqué que le ministre des Administrations régionales avait soumis ses propositions concernant la délimitation des cinq municipalités et de leurs arrondissements, des villages et des conseils de district pour leurs commentaires en tenant compte de l’augmentation du nombre d’arrondissements et de la création de nouveaux villages et de la séparation des conseils de district.
À la réception de ces propositions, le Commissaire électoral a visité les arrondissements concernés prenant en considération les critères nécessaires pour la délimitation des circonscriptions. « Selon mes informations, il (Commissaire électoral) a eu par la suite une réunion avec l’Electoral Supervisory and Boundaries Commission le 1er juillet 2011. Il a sollicité l’aide de la Commission afin de s’assurer que les délimitations se faisaient dans le respect de l’intégrité et l’impartialité. Des contre-propositions ont été effectuées le 5 juillet 2011. Le ministre a apporté des changements majeurs. Il a informé la Commission électorale que ses recommandations ont été prises en compte dans le projet de loi. Par conséquent, dire qu’il y a eu des “gerrymanderings” est sans fondement », a soutenu le Premier ministre.
Navin Ramgoolam a d’autre part soutenu que « Parliament is Sovereign. Parliament can unmake laws and make new laws ».
Le chef du gouvernement a d’autre part espéré qu’après ses explications les membres de l’opposition réaliseront que leurs inquiétudes sont totalement injustifiées. Il a conclu son intervention en insistant sur le fait que les deux législations adoptées au parlement concernant la participation des femmes aux élections régionales et la réforme des administrations régionales constituent un « milestone in the history of Local Government in Mauritius ».
Dernier orateur de l’opposition à prendre la parole hier dans le cadre des débats sur le Local Government Bill, Rajesh Bhagwan a souligné l’importance des administrations régionales qui pendant longtemps ont servi de pépinière à l’Assemblée nationale. Le whip de l’opposition a cité les noms de plusieurs parlementaires du MMM et du Ptr qui ont fait leurs premiers armes aux conseils municipaux ou aux conseils de district. Il a réclamé que les élections municipales soient organisées au premier trimestre de l’année prochaine avant de lancer : « Nou paré pou zot. »
Rajesh Bhagwan a suggéré qu’un audit sur les réalisations du MMM sur le plan de l’infrastructure, l’éducation, la culture et les mesures prises pour la promotion des femmes soit effectué. Selon lui, les administrations régionales aujourd’hui sont « une catastrophe ». Les routes ne sont pas réparées comme il le faut, la collecte des ordures se fait irrégulièrement, un maire en exercice est poursuivi par l’Independent Commission Against Corruption et les municipalités sont caractérisées par les scandales de toutes sortes. À Xavier-Luc Duval, qui lui faisait une remarque, le député de la circonscription Beau-Bassin / Petite-Rivière a lancé « mo pa finn sové dan mo circonscription… To finn sové », avant d’inviter le leader du PMSD à se présenter à Beau-Bassin / Rose-Hill pour les prochaines élections.
Le secrétaire général du MMM a prévu que l’opposition donne « enn bon raclée à l’équipe gouvernementale ». Concernant le découpage des arrondissements, Rajesh Bhagwan a demandé qui est ce conseiller qui s’est livré à cet exercice sans passer par la Commission électorale. Selon lui, cet exercice a été mal fait avant de conclure que la nouvelle législation constitue un recul des pouvoirs des administrations régionales.
Le vice-Premier ministre et ministre des Finances a pour sa part félicité le ministre des Administrations régionales pour sa détermination. Pour Xavier-Luc Duval, contrairement à ce qu’a affirmé l’opposition, le texte de loi est caractérisé par « l’accountability, la transparence, la qualité de service ». Nous voulons nous assurer d’obtenir « value for money ». Le partenaire du Ptr a critiqué son prédécesseur Pravind Jugnauth de n’avoir pas voulu financer la création des nouveaux conseils de district pour lequel un budget de l’ordre de Rs 200 millions était nécessaire. Lorsque le leader du MSM avait accepté, il a suggéré que Rs 10 millions soient enlevées du budget de chaque ministère. XLD a expliqué que les municipalités sont largement financées par l’argent des contribuables et qu’il était normal que le gouvernement ait un droit de regard sur leur activité. Le leader du PMSD a aussi souligné les dispositions prises pour que les projets soient approuvés sur une base régulière de manière à ce qu’on n’ait pas à attendre indûment pendant des mois l’approbation d’un projet.
Le leader du MSM a pour sa part parlé de projet de loi bâclé. Selon lui, le ministre des Administrations régionales n’a fait que reprendre le texte préparé par feu James Burty David, avant de le présenter au parlement. Pravind Jugnauth a aussi soutenu que le découpage des arrondissements constitue un outrage au président de la République car la loi exige que ce soit le président et la Commission électorale qui s’en occupent.
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Walk-out de l’opposition
Aussitôt que le ministre des Administrations régionales Hervé Aimée se soit mis debout pour résumer les débats, une première remarque de sa part à l’adresse de l’opposition a irrité Joe Lesjongard, qui a pris ses effets et quitté l’hémicycle. Il y a eu une brève conciliabule de la part des parlementaires du MMM.
Entre-temps, une autre remarque du ministre des Administrations régionales a provoqué la colère des parlementaires de l’opposition, qui ont quitté bruyamment l’hémicycle. Interrogé ce matin au sujet de ce walk-out, le secrétaire général du MMM Rajesh Bhagwan a observé qu’il était clair que le gouvernement allait faire peu de cas à l’amendement proposé par l’opposition demandant l’organisation des élections régionales durant le premier trimestre de l’année prochaine.
De plus, a fait ressortir Rajesh Bhagwan, l’opposition ne voulait nullement s’associer à une législation avec laquelle elle n’était pas d’accord et qui est à contre-courant de la démocratie. Il a souligné par ailleurs que le Premier ministre avait prononcé un discours correct et respecté le point de vue de l’opposition qu’il a critiqué dans un ton respectable. Il a toutefois déploré le ton, jugé arrogant, du ministre des Administrations régionales.
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Joe Lesjongard: « Nous faisons un pas en arrière »
Dans sa réplique à l’intervention du député travailliste Abdullah Hossen, le député mauve de la circonscription Port-Louis Nord / Montagne Longue a souligné qu’il serait physiquement impossible de siéger à Maurice et à Rodrigues, d’où l’article 6(2)(a) de la Rodrigues Regional Assembly Act. « Le gouvernement a pris six ans pour présenter une loi… Nous en avons présenté deux en trois ans », a affirmé Joe Lesjongard. Il a soutenu que le gouvernement MMM-MSM avait introduit une loi pour l’autonomie de Rodrigues en 2001 et établi la Local Government Act de 2003.
Selon le député du MMM, « nous faisons un pas en arrière » avec la Local Government Act de 2003. Joe Lesjongard a expliqué le renvoi des élections villageoises de 2003 alors que le MMM et le MSM étaient au pouvoir, soutenant que le gouvernement d’alors voulait municipaliser le pays et que de telles élections n’étaient pas nécessaires. « Nous étions en pleine phase de mise en oeuvre », a-t-il affirmé, ajoutant que « voilà la différence fondamentale » entre le report des élections villageoises de 2003 et des municipales de cette année.
« On nous avait dit qu’il y aurait des élections en début d’année 2011 et nous sommes en décembre », a fait ressortir le député MMM. Joe Lesjongard a fait comprendre qu’il veut des élections municipales en début d’année 2012. Il a déclaré qu’il faut que le gouvernement assume ses responsabilités. Le député de l’opposition a évoqué l’introduction de la National Residential Property Tax en 2005 alors que les membres du gouvernement, qui étaient alors dans l’opposition, étaient contre la municipalisation des zones rurales.
Joe Lesjongard a par ailleurs invoqué les propos du conseiller démissionnaire de la majorité Clency Lajoie qui vient attaquer son leader le Premier ministre.
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VEDA BALOOMOODY: « Who was the mastermind
behind the whole process ? »

Le député MMM a critiqué la « mainmise » du ministre des Administrations régionales Hervé Aimée sur les municipalités. Veda Baloomoody a fait un plaidoyer pour le respect des institutions.
D’où la nécessité, a-t-il précisé, de venir clarifier le rôle de l’Electoral Boundaries Commission dans les nouvelles délimitations prévues dans le Local Government (Amendment) Bill. « Si on commence ? avoir des doutes sur nos institutions, ce sera tr?s dangereux ! »
Veda Baloomoody a aussi fait ressortir que la nouvelle loi n’est pas en vigueur et qu’il faut respecter la Local Government Act de 2003. Celle-ci prévoit notamment que les nouvelles délimitations doivent se faire en invitant les différentes parties à exprimer leur point de vue. « Il s’agit d’un exercice d?mocratique. » D’ailleurs, a rappelé le député de l’opposition lors de la séance du lundi 21 novembre, le Premier ministre Navin Ramgoolam avait assuré que toutes les parties concernées seront consultées. « Who was the mastermind behind the whole process ? », s’est-il demandé.
Le député a ainsi invité le ministre des Administrations régionales à préciser : qui a travaillé sur les nouvelles délimitations ? Pour quelles raisons les changements ont-ils été apportés et comment ont-ils été faits ?

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