PHILIPPE HAO THYN VOON, PRÉSIDENT DU COMITÉ OLYMPIQUE MAURICIEN : «Les fédérations ont su prendre les taureaux par les cornes pour se relancer»

Alors même que le Comité Olympique Mauricien se prépare à la tenue de la réunion du Conseil International des Jeux (CIJ) à Maurice les 17 et 18 février prochain, le ministre de la Jeunesse et des Sports, Yogida Sawmynaden a nommé le comité organisateur des 10es Jeux des Iles qui se tiendront à Maurice en 2019. Une décision qui met fin à la polémique qui entourait l’organisation de ces Jeux, dont les Comores réclament toujours la paternité. Dans l’entretien qu’il a accordé à Week-End, le président du Comité Olympique Mauricien, qui est aussi président du CIJ revient sur ces nominations et évoque aussi la saison 2015.
Philippe Hao Thyn Voon, débutons cet entretien avec un sujet d’actualité avec la nomination de Georges Chung comme Chief Executive Officer (CEO) du Comité d’Organisation des Jeux des Iles (COJI). Est-ce une nomination qui convient au Comité Olympique Mauricien (COM) ?
Un tel exercice n’est jamais facile puisque le choix d’une personne pour mettre à la tête d’une telle organisation comprend beaucoup de difficultés et toute mauvaise décision aura, de toute évidence, des conséquences. J’ai été avec le ministre de la Jeunesse et des Sports dans ce choix et je peux vous dire qu’avant de porter une décision finale sur Georges Chung, d’autres noms ont été cités, mais il y avait toujours un obstacle. Ce qui fait que le choix de Georges Chung est venu comme un choix inévitable en raison de  la personnalité de l’homme et des causes qu’il a défendues à ce jour.
Pour répondre directement à votre question, oui le choix de Georges Chung convient au Comité Olympique Mauricien. Mais laissez-moi quand même vous dire que l’organisation des 10es Jeux des Iles ne va certainement pas reposer  uniquement sur les épaules de cet homme. Il convient de dire que sa réussite va aussi dépendre des hommes et des femmes qui seront à ses côtés pour l’aider dans sa tâche durant ces quatre prochaines années.
 
La nomination de Georges Chung comme président du COJI vous rassure aussi, puisqu’on comprend que l’État Mauricien est bien engagé dans l’organisation des Jeux de 2019 ?
Depuis le 20 octobre dernier, je n’avais pas de doute quant à l’engagement de Maurice pour organiser les 10es Jeux des Iles. Certes a un certain moment, il y a eu des hésitations  face à la pression des Comores qui veulent récupérer l’organisation. À mon niveau, il n’y a jamais eu de doute et il est vrai de dire que la nomination de Georges Chung à la tête du COJI vient  dissiper toutes les hésitations possible.
 
Le Conseil International des Jeux se réunira  dans une quinzaine de jour à Maurice pour faire le bilan des 9es Jeux et aussi pour prendre connaissance du premier ébauche du projet mauricien en vue de 2019. Comment se passe l’organisation de cette réunion ?
Effectivement les membres du CIJ se réuniront les 17 et 18 février à l’hôtel Gold Crest pour une première réunion qui est déjà déterminante. Pour l’heure l’organisation se déroule très bien. Le ministère de la Jeunesse et des Sports nous accorde tout son soutien et maintenant que le CEO du COJI et ses membres sont nommés, nous espérons que très vite le travail peut commencer dans la sérénité.
 
Pensez-vous que les Jeux de 2019 doivent faire de la place à de nouvelles disciplines ?
Introduire une ou des nouvelles disciplines dans des jeux n’a jamais été une tâche facile. Le CIO, par exemple, commande des études de faisabilité et des sondages médiatiques avant de prendre une décision. Au niveau du CIJ, nous n’avons pas les moyens pour procéder à de telles études. Comme vous le savez, le choix des disciplines est avant tout une proposition du pays organisateur et par la suite il faut qu’une majorité au sein du CIJ soit en faveur pour que la discipline soit inscrite au programme des Jeux. C’est au comité organisateur des Jeux de 2019 de faire des propositions.
Philippe Hao Thyn Voon, 2015 est certes loin derrière nous, n’empêche qu’elle a été une année remplie sur le plan sportif. En tant que président du Comité Olympique, quel bilan faites-vous de cette année 2015?
Sans aucune hésitation je vous dirai que 2015 a été une année riche en événements, mais surtout riche en médailles pour le sport mauricien. D’abord il faut savoir que 2015 a commencé avec l’arrivée d’un nouveau ministre de la Jeunesse et des Sports  qui fut nommé après les élections de décembre 2014. Yogida Sawmynaden prend son temps pour trouver ses marques dans le paysage sportif mauricien, mais je dois aussi reconnaître qu’il n’a pas vraiment eu le temps de faire un round d’observation puisqu’il a eu à entrer de plain pied dans la préparation pour les Jeux des Iles, qui furent suivis par les Jeux d’Afrique.
Reste que pour moi la cerise sur le gâteau pour 2015 est la performance des athlètes mauriciens lors des 9es Jeux des Iles à La Réunion où nous avons ramené 66 médailles d’or sans compter les 49 médailles d’argent et les 70 médailles de bronze. Une performance qui s’est, par la suite confirmée, par une récolte de médailles aux Jeux d’Afrique où nous avons gagné la médaille d’or dans 4 disciplines. Je pense que comparé à 2014, l’année 2015 a été une bien meilleure année pour le sport mauricien en général, avec des performances très honorables.
Après les résultats médiocres ramenés des JIOI de 2011 aux Seychelles, on avait noté un désintéressement total chez bon nombre de fédérations. Avec les résultats ramenés en 2015, peut-on dire aujourd’hui que les fédérations ont su se ressaisir…?
C’est une évidence que cette fin de cycle est beaucoup plus intéressante pour les fédérations qui ont su prendre les taureaux par les cornes pour se relancer. Il est vrai de dire qu’au retour des Seychelles, beaucoup de questions étaient sur les lèvres de nos responsables fédérales. Ils se demandaient surtout comment relancer une machine qui était grippée et qui avait affiché ses faiblesses au grand jour à Mahé. Quatre ans après, je dois avouer que bon nombre de fédérations ont su trouver la bonne formule pour donner du punch à leurs sélections nationales sans s’attarder sur les obstacles qui se sont dressés devant elles ou encore sans se soucier du peu de soutien qui venait du ministère de la Jeunesse et des Sports à un certain moment.
Pour cela, je dois les féliciter, car les résultats obtenus à La Réunion et au Congo Brazzaville ne sont que les fruits de leur travail. Je dois aussi les féliciter d’avoir pris conscience au moment qu’il fallait le faire pour se remettre sur la rampe du lancement. Je ne cache pas aussi qu’en 2015, le ministère des Sports s’est montré plus généreux dans les allocations de fonds pour la préparation des athlètes et j’espère sincèrement que cette situation continue dans la même direction.
 
Toutefois, Philippe Hao Thyn Voon, la relance qui a permis de gagner 66 médailles d’or aux JIOI  n’est pas un fait qui touche le sport mauricien dans sa globalité. Certaines fédérations, dont les quatre sports collectifs sont retournés bredouilles. La situation est-elle inquiétante à ce niveau?
Oui, la situation est inquiétante et c’est un fait à ne pas ignorer. Les résultats sont là et c’est à ces fédérations et de faire leur mea-culpa  de se donner les moyens pour sortir de la situation dans laquelle elles se retrouvent aujourd’hui. Néanmoins je ferai la remarque suivante au risque de me répéter: l’argent reste en tout point le nerf de la guerre et on remarquera que les athlètes qui ont été soutenus financièrement dans leurs préparations ont ramené des résultats.
Après ce constat, direz-vous quand même, Philippe Hao Thyn Voon, que le mouvement sportif mauricien se porte bien?
Non…non certainement pas. Il y a certes des signes qui indiquent qu’il y a de l’espoir et que le sport mauricien a recommencé à souffler. Mais nous ne sommes ps totalement sortis de notre léthargie. Le sport collectif à Maurice va très mal et comme les Jeux des Iles seront chez nous dans quatre ans, je crois qu’il faudra voir un plan d’action d’ensemble pour que ces sports puissent avoir une performance beaucoup plus honorable.
Je suis le premier à reconnaître que le nouveau gouvernement a beaucoup investi sur les sportifs durant l’année 2015, notamment dans le cadre de la préparation pour les Jeux des Iles et les Jeux d’Afrique. Dans le sport, l’argent restera toujours le nerf de la guerre et sans argent, il est impossible de bien former un sportif et de gagner des médailles. Mon souhait maintenant est que dès à présent, les fonds nécessaires soient trouvés pour soutenir nos sportifs pour gagner les Jeux de 2019. Nous devons aussi dès à présent identifier nos faiblesses, mettre en place les plans qui conviennent et investir en conséquence.
Quel est aujourd’hui l’état des relations entre le COM et le ministère des Sports ?
Pour l’heure, nos relations sont au beau fixe. Nous avons une ligne de communication directe avec le ministre et je peux vous dire que nous travaillons la main dans la main. Surtout en ce qui concerne les amendements qui doivent être apportés au Sports Act. Le COM a été consulté en deux fois pour voir les amendements que le ministre comptent apporter à la loi. J’espère que tout se passe bien et que très vite, la loi sera amendée, car à ce jour beaucoup de fédérations se trouvent dans une situation illégale en raison des  difficultés qui existent pour appliquer la loi.
 
Reste qu’en 2015, nous avons constaté un peu moins de dispute au sein des fédérations ?
Sans doute leurs dirigeants étaient pris avec la préparation pour les Jeux des Iles. Mais détrompez-vous, il existe toujours des problèmes au sein des fédérations, mais il sont moins visibles pour l’heure. Laissez-moi quand même vous dire que beaucoup de disputes au sein des fédérations trouvent leurs origines dans une question d’égo ou une personne qui accapare les affaires de la fédération pour son propre chef.
 
Le COM a été aussi au four et au moulin cette année avec l’organisation de l’Assemblée Générale de l’ACNOA à Maurice. Comment une telle organisation a-t-elle aidé Maurice et le COM ?
La tenue de l’Assemblée Générale de l’ACNOA à Maurice a été un vrai challenge pour moi et pour les membres du comité olympique. On ne se rend pas compte sans doute, mais Maurice a fait l’objet d’articles de presse dans plus d’une centaine  de pays africains, européens et dans le monde entier avec le passage du président du Comité International Olympique (CIO) à Maurice. Grâce à cette organisation Maurice a pris du galon au sein du mouvement sportif africain et ses retombées ne sont certes pas pour tout de suite, mais vous verrez par la suite toute la considération que Maurice aura sur le continent.
 
2016 c’est aussi l’année des Jeux Olympiques. Pensez-vous que Maurice aura une représentation plus importante qu’en 2012 à Londres ?
Nous sommes pour le moment bien partis. Jonathan Drack et Yannick Lincoln sont déjà qualifiés et d’autres sportifs sont très proches de la qualification. J’espère que nous pourrons avoir cette fois une dizaine de qualifiés. Mais sachez que pour se qualifier pour les JO, il faut avoir les moyens financiers. À notre niveau, nous avons une enveloppe pour aider ceux qui se sont déjà qualifiés. Pour ceux qui sont dans la course pour une qualification, il leur faut du soutien, surtout financier. J’ai abordé la question avec le ministre et j’espère qu’il entendra les besoins de ces athlètes.
 

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