POLICE AND CRIMINAL EVIDENCE BILL: Entre manquements et clauses « anticonstitutionnelles »

L’ébauche du Police and Criminal Evidence Bill est actuellement en circulation pour consultations avec le public. Le Bar Council a organisé une causerie sur ce projet de loi. Plusieurs intervenants, dont Mes Sanjay Bhuckory (SC) et Raouf Gulbul, ont commenté quelques clauses « anticonstitutionnelles » et souligné des manquements.
Le Police and Criminal Evidence Bill (PACE), si promulgué, viendra bouleverser les procédures pénales en vigueur. D’où l’organisation d’une « réunion spéciale » au siège du Bar Council sur l’ébauche du projet de loi actuellement en circulation pour consultations avec le public. Une centaine de personnes étaient présentes à cette réunion qui a rassemblé les membres du barreau mauricien, la police, le bureau du directeur des poursuites publiques ainsi que le bureau de l’Attorney General.
Au début même de son intervention, Me Raouf Gulbul a avancé que cette ébauche contenait des « disturbing features » qui seraient des violations aux droits constitutionnels mauriciens, notamment à l’article 10 de la Constitution qui établit les droits des accusés en droit pénal. La clause 53 (1) de l’ébauche stipule que les dépositions faites en cour lors d’une enquête préliminaire (NdlR : pour les affaires de meurtre) pourront être utilisées dans le procès devant les assises comme preuves même si le témoin ne peut être présent.
Les dépositions seront également admissibles même si la personne est présente en cour mais refuse de donner des preuves, nie avoir fait cette déclaration ou donne des preuves inconsistantes. Le droit d’interroger contradictoirement un témoin (NdlR : assuré par l’article 10 (2) (e) de la Constitution) risque d’être compromis si le PACE est introduit. Le bénéfice du doute pourrait revenir à la poursuite et non à la défense comme prévu dans les procès criminels.
Me Gulbul a également parlé du droit de silence (NdlR : article 10 (7) de la Constitution) qui ne sera plus respecté avec l’adoption du PACE. La clause 41 du projet de loi stipule que l’accusé doit donner un defense statement, donner les points de droits que la défense va soulever lors du procès et toute autre information au début même du procès. Si l’accusé ne le fait pas dans le temps imparti ou ne suit pas la même ligne de défense qu’il a déclarée au début du procès, la cour ou le jury pourra décider si la personne est coupable ou pas de l’accusation dont elle fait l’objet. Me Raouf Gulbul est d’avis que cela viendrait compromettre le droit au silence.
Le Senior Counsel Me Sanjay Bhuckory a pour sa part souligné que la définition de victime y est trop limitée et ne tient pas en ligne de compte la notion de préjudice (NdlR : selon la doctrine française). S’agissant de la clause 3 où la police est chargée de tenir les victimes informées sur le déroulement de l’enquête, l’homme de loi soutient qu’il faut mettre en place un code de conduite au niveau de la police. Il a déclaré que même les avocats représentant les victimes ont difficilement des informations sur le déroulement de l’enquête. Me Bhuckory (SC) soutient que ceux qui ne sont pas représentés auront encore plus de difficultés sur ce point.
Me Sanjay Bhuckory (SC) a ajouté qu’il n’était pas nécessaire de divulguer sa défense « car l’accusé aura le loisir de le faire au cours du procès ». Il est d’avis que cela traînerait les procédures « qui sont déjà longues ». S’agissant de l’alibi de l’accusé, l’homme de loi soutient qu’il n’a aucune objection à ce que cette information soit communiquée à la poursuite. Il a expliqué que ceux qui ne sont pas représentés par des avocats devaient être mieux protégés et que ce projet de loi ne présenterait aucune garantie de protection.
Le Senior Counsel a également ouvert une parenthèse sur la clause 56 du PACE qui stipule que si le témoin parle une langue comprise par l’accusé, le juge ou le magistrat, le jury et les avocats son interrogatoire se fera sans traducteur. Il a affirmé qu’à Maurice tout le monde parle français, anglais ou kreol et que ces langues sont acceptées lors de procès. L’homme de loi ne voit donc pas l’utilité de cette clause.
Me Sanjay Bhuckory (SC) a également fait remarquer que la clause n’inclut pas les police prosecutors qui sont présents dans les cours de districts et intermédiaire.

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