PRISONS : Un NPCC Productivity Award pour la boulangerie

Depuis vendredi dernier, quand est tombé le verdict, tous, officiers comme détenus de la prison de Beau-Bassin et des autres institutions pénitentiaires de l’île, affichent joie et fierté. Et pour cause : le National Productivity and Competitiveness Council (NPCC) a octroyé un trophée au service de boulangerie des Prisons. Si les pains produits par la prison sont très prisés par tout un chacun – il suffit de voir à quelle vitesse ils sont écoulés lors des Open Day des services pénitentiaires –, en revanche, jusqu’à présent, ce service n’avait pas eu le rayonnement national mérité. Ce qui est désormais chose faite ! Cette grande première amène le Commissaire des Prisons, Jean Bruneau, à saluer « les efforts accomplis, tant des détenus que des officiers formateurs », engagés dans ce processus. « C’est une manière de récompenser le travail de tous ces hommes et leur offrir une reconnaissance nationale. »
Giandev Vencatasamy, Prison Officer, est tout sourire. Et c’est amplement justifié : l’homme, qui est responsable de la boulangerie de la prison de Beau-Bassin, s’attelle, avec le soutien de son complice de longue date Salim Chumroo, également Prison Officer, à former les détenus à l’art et l’amour de la réalisation du pain, et ce depuis 2006. « Cette récompense est une très grande et excellente nouvelle pour nous tous », explique-t-il au sujet du NPCC Productivity Award décerné au service de boulangerie des prisons. « Chacun, officier comme détenu, met beaucoup du sien dans ce service. Nous veillons à ce que tout se passe comme il faut… » confirme-t-il. Et de décliner, avec une pointe de satisfaction non contenue dans la voix : « A ce jour, nous n’avons eu aucune plainte ! »
Chaque jour, la boulangerie de la prison de Beau-Bassin fabrique 10 000 pains, maisons et baguettes confondues, à base de farine blanche et de blé. Depuis sa mise en route, il y a quelques mois, l’Eastern High Security Prison de Melrose opère la deuxième unité de boulangerie des services de la prison. « Nous sommes autosuffisants, explique Luc Babylone, ASP. Les pains produits par la prison sont destinés à la consommation quotidienne, tant pour les détenus que par le personnel. De plus, nous fournissons également les Rehabilitation Youth Centres (RYC) (Boys & Girls), le Correctional Youth Centre (CYC) et la Police Training School. Les membres du personnel des prisons qui souhaitent acheter leurs pains s’approvisionnent aussi auprès de nous. »
Outre le pain traditionnel, la boulangerie de la prison confectionne aussi de petits pains au fromage ainsi que des pains “burger”. «Très prochainement, ajoute Luc Babylone, ce service ajoutera de nouvelles cordes à son arc. » Et Giandev Vencatasamy de compléter : « Nous allons en effet nous lancer dans la production de brioches, de pain doux et de moules. » Une évolution logique qui ne se fera pas « sans une étape de formation évolutive et continue, bien évidemment », confirme M. Vencatasamy.
C’est dans le voisinage des bâtiments abritant la New Wing que se situe l’actuelle boulangerie de la prison de Beau-Bassin. « Avant 2006, expliquent L. Babylone et l’ACP Shyam Boodhee, responsable de la New Wing, notre unité de confection de pains était relativement artisanale. Nous n’avions pas tous les moyens techniques et les équipements performants dont nous disposons aujourd’hui. » La Woman Police Inspector Sylvia Rajiah, affectée aux services de la prison comme Project Coordinator à la Strategic Planning Unit, qui composait l’équipe ayant préparé le dossier présenté au NPCC, élabore : « Nous n’avions que deux fours électriques. On ne produisait donc pas une quantité élevée de pains. Mais depuis 2011, nous disposons d’une autre unité électrique à plus forte capacité. Ce qui nous permet de produire les 10 000 pains quotidiens. » Quatre officiers et huit détenus sont affectés à la boulangerie de Beau-Bassin.
Enfin une ouverture !
Autour de Giandev Vencatasamy, Luc Babylone, l’ACP Shyam Bodhee, D. Nizam Gaujee, Lead Prison Officer, et de Sylvia Rajiah, les détenus Chavry, Mootin, Vishal, Wensley, Sylvain et Joseph s’affairent aux différentes machines et tables de travail. « La confection de pains se déroule en cinq étapes et nous entraînons chaque détenu pendant un mois sur chaque étape », explique G. Vencatasamy. Dans le désordre, ces étapes concernent la pratique de “roule boule”, où le prisonnier manie la farine pétrie. Il apprend également à se familiariser avec les machines industrielles que sont le “mixer kneader” et la “façonneuse”, et passe aussi un temps de la formation à apprendre « les techniques pour couper la pâte ». Un mois est consacré, poursuit M. Vencatasamy, « à apprendre à manier les fours ».
Chavry, en détention depuis quelques mois à Beau-Bassin, est « très enthousiaste d’apprendre un nouveau métier ». Ce père de trois enfants est très confiant de pouvoir trouver un travail en sortant de prison, « Cela me permettra de subvenir aux besoins de ma famille », dit-il. Même écho de la part de Mootin, Vishal et Sylvain : « C’est une ouverture professionnelle qui assure une certaine stabilité. » L’ACP Boodhee et l’ASP Babylone parlent aussi « d’ouverture », qu’ils qualifient de « plus fiable, dans la mesure où le détenu ne rencontre pas l’éternel obstacle de la production de certificat de moralité ». Et de poursuivre : « Au moins, dans ce domaine, ils ont plus de possibilités de trouver un travail stable et un salaire décent ».
Wensley, qui travaillait déjà dans une boulangerie – contrairement à ses amis qui étaient pratiquemment tous dans les métiers de la construction –, avant de se retrouver derrière les barreaux, n’est pas en terrain inconnu : « Je dis aux détenus qui hésitent encore à s’engager dans les différentes formations offertes par la prison, dont la boulangerie, de ne pas douter. Tentez votre chance, vous allez être agréablement surpris… »
 Joseph, un autre détenu très détendu et joyeux qui s’occupe à la “façonneuse”, résume : « C’est un travail qui demande un certain nombre d’efforts, comme tous les boulots. Certes, c’est difficile de se lever dès 3h du matin et de rester debout jusqu’aux alentours de 13 heures. Tout comme, parfois, la chaleur émanant des fours peut incommoder. Mais au final, on a un métier en poche ! » Lui, contrairement aux autres détenus affectés actuellement à la boulangerie, songe sérieusement à « ouvrir ma propre boulangerie/pâtisserie », précisant qu’entre-temps, « je vais aussi apprendre à confectionner les gâteaux » !
 

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