QUESTIONS À…GÉRARD BOULLÉ: « Consommer mauricien c’est soutenir l’emploi et le développement »

L’Association of Mauritian Manufacturers (AMM) lance la semaine prochaine la campagne Made in Moris. Celle-ci a pour but de sensibiliser les Mauriciens sur la nécessité de consommer ce qu’on produit. Gérard Boullé, Chief Operating Officer chez Food and Allied et président de l’AMM, explique la démarche de l’association et la nécessité d’introduire des mesures pour soutenir la croissance et l’industrie mauricienne.
L’AMM lance bientôt la campagne Made in Moris. Quelle est le but de cette campagne ?
Le label Made in Moris a pour but de promouvoir les produits fabriqués ici. La campagne aura pour but de sensibiliser sur l’importance de l’industrie locale. Selon une étude menée par la firme De Chazal du Mée en 2012, l’industrie locale contribue à hauteur de 12% du Produit National Brut et emploie quelque 55 000 personnes. Beaucoup de personnes ne savent pas que de nombreux produits de consommation courante sont produits ici. Notre démarche vise à les encourager à consommer ce qu’ils produisent et en même temps, soutenir l’emploi et contribuer au développement du pays.
Maurice est encore très dépendante de l’importation. Cela démontre-t-il la difficulté des marques locales à s’imposer ?
Nous ne pouvons pas tout produire à Maurice. De par sa taille, le pays produit à une certaine échelle uniquement. La concurrence est bonne, mais le plus important est qu’il y ait un level playing field. Nous disons par exemple qu’à prix égal, il faut une qualité égale
Il faut des mesures pour soutenir l’industrie locale. Nous sommes d’avis qu’il faudrait revoir la politique de zero duty sur certains produits de consommation. Il faut être conscient de l’importance de soutenir l’industrie mauricienne et de faire vivre les personnes. Beaucoup de PME, par exemple, dépendent des grosses entreprises.
Le consommateur recherche aussi ses avantages en achetant les produits bon marché venant des pays émergents…
C’est vrai que c’est une rude compétition, mais faut prendre en considération que le moins cher n’est pas nécessairement le meilleur. Comme on dit chez nous, souvent bon marché coûte cher. Nous mettons l’accent sur le rapport qualité/prix. C’est pour cela que nous insistons pour un level playing field. C’est sûr, nous ne pourrons jamais concurrencer certains produits, particulièrement ceux où les multinationales qui produisent des quantités énormes sont impliquées. Mais une loi anti-dumping, par exemple, permettrait de mettre un peu d’ordre sur le marché.
Qu’attendez-vous du gouvernement à l’approche du prochain budget ?
Nous travaillons sur le sujet en ce moment et nous ferons des propositions. D’ores et déjà, on peut dire qu’il est important de présenter des mesures pour relancer l’investissement productif qui est en déclin depuis quelques années. Je crois que le gouvernement est conscient de l’importance de l’industrie de production locale. Comme je l’ai dit, nous contribuons à 12% du PNB. Nous attendons donc des incentives. Il faut investir aujourd’hui pour récolter demain.
Subana a fermé ses portes l’année dernière en raison de la concurrence des produits étrangers. Faut-il s’attendre à d’autres fermetures pour la même raison ?
On ne peut généraliser le cas de Subana. Je crois que la compagnie éprouvait des difficultés depuis quelque temps déjà. Ce qui est sûr c’est que la crise qui a secoué l’Europe n’est pas terminée à Maurice. L’industrie mauricienne dépend de beaucoup d’éléments, par exemple, si le tourisme se porte bien. Ce que je peux dire c’est que nous avons des moments encore durs devant nous.
Le marché régional représente-t-il une alternative pour les produits mauriciens ?
Bon nombre de membres de l’AMM sont déjà présents sur le marché régional. C’est un marché de proximité. Cependant, lorsque l’on ajoute le fret aux produits, ce n’est pas compétitif. Par ailleurs, il y a des entreprises qui produisent sous licence pour Maurice et pas ailleurs. Ce n’est donc pas toujours facile d’exporter. Nous avons un business model pour ici.
Les prix des matières premières comme les céréales vont encore grimper cette année. Faut-il s’attendre à une flambée de prix sur le marché local ?
Malheureusement nous ne produisons pas grand chose à Maurice. Tout est importé. Si les prix des matières premières montent il y aura certainement des répercussions sur certains produits. On souhaite que la culture régionale des céréales à Madagascar, par exemple, se développe rapidement. Nous pourrons alors nous tourner ce marché. Mais toujours est-il que les prix restent liés au marché mondial
Quels sont les plus grands défis du secteur aujourd’hui ?
La croissance reste le plus grand défi. Si l’économie va mal, le pouvoir d’achat est aussi en baisse. L’autre défi est la possibilité d’exporter vers l’Afrique. Non seulement nos produits, mais aussi notre savoir-faire. S’implanter là-bas serait plus approprié. En produisant sur place il n’y aurait pas de fret. Nous devons envisager d’exporter notre expérience et notre business model en Afrique comme on l’a déjà fait dans le domaine du sucre. C’est un challenge à explorer dans les années à venir.
Comment comptez-vous convaincre le consommateur d’acheter mauricien ?
Nous disons que nous avons le savoir-faire et garantissons la qualité. Les produits mauriciens ont une traçabilité que nous ne pouvons avoir pour d’autres produits. Il est aussi important pour le consommateur de savoir d’où vient ce qu’il consomme et quelles sont les garanties de qualité. Il y a par exemple un certain nombre de règlements que les produits mauriciens doivent respecter, mais certains produits importés passent souvent les barrières de contrôle.

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