RAJ NAYAN SEWDUTH, CHERCHEUR MAURICIEN À L’INSERM (BORDEAUX): « Des recherches génétiques pour traiter les maladies cardio-vasculaires »

Raj Nayan Sewduth est chercheur dans un laboratoire de l’Inserm (Institut de Recherches Médicales) à Bordeaux (France) depuis quatre ans. Il se consacre essentiellement à la recherche fondamentale génétique dont l’objectif est de mettre au point de nouveaux médicaments. Actuellement son projet de recherche est d’identifier le gène sur la formation (bourgeonnement) des vaisseaux privés d’oxygène dans les maladies cardio-vasculaires.
Le jeune Mauricien, qui a passé son baccalauréat à 17 ans au Lycée des Mascareignes après des études primaires à l’École du Centre, détient une licence en biologie, un Master et un doctorat en génétique de l’Université de Bordeaux. « Nous cherchons des traitements ciblés pour les maladies cardio-vasculaires. Il n’y a pas énormément de traitement pour ces pathologies, pour les thromboses par exemple. Il existe tout au plus une cinquantaine de médicaments. Nous faisons des tests in vivo pour identifier de nouvelles cibles thérapeutiques », explique M. Sewduth lors d’une rencontre avec Le Mauricien. Pour le jeune chercheur, « Maurice est une petite île où les familles se croisent entre elles, ce qui fait qu’il y a plus de risques que les gènes à l’origine des maladies s’expriment ». C’est une évidence pour lui que « Maurice sera à long terme un centre d’intérêt épidémiologique ».
Raj Nayan Sewduth a regagné la France hier (vendredi) avec son épouse après la célébration de son mariage à Maurice il y a quelques jours.
Ses recherches ont trait à l’accident vasculaire cérébral (AVC), à l’infarctus du myocarde et la mauvaise circulation sanguine dans les jambes, explique-t-il. « Il se produit un bourgeonnement des vaisseaux quand l’oxygène ne passe pas plus et que les tissus sont mal irrigués. C’est le cas de l’ischémie et de l’hypoxie. Nous devons localiser le gène responsable pour ensuite chercher de nouveaux médicaments que nous allons tester ensuite sur les animaux et les gens. Une recherche sur 500 va déboucher sur quelque chose. Cela ouvrira la voie à la mise au point de nouveaux médicaments », dit-il. Auparavant, M. Sewduth a passé deux ans au Kings College et dans un laboratoire en Grande-Bretagne où il a étudié la myopathie musculaire dystrophique de Duchenne. Il explique que lors de des travaux de criblage des gènes, « nous cherchons ce qui se passe dans les tests in vitro ou nous prenons des groupes de familles qui ont un type de maladie et nous étudions les gènes en cause. En France, il y a le purpura qui est un saignement sur la peau et qui a un gène spécifique qui a muté dans cette maladie. À partir de là nous pourrons tester des traitements », explique-t-il. « Il y a des familles dont 70 % des membres ont le diabète à 60 ans. Ce n’est pas seulement dû à l’alimentation. Il y a une part génétique ». Il effectue ses travaux en collaboration avec le Centre Hospitalier Hout-Lévèque près de Bordeaux.
M. Sewduth note que les maladies non transmissibles (cardio-vasculaires, cancers, diabète, etc.) se voient un peu partout dans le monde y compris dans la région africaine. « Même les gens pauvres sont obèses », observe-t-il. « Manger mal, ne pas faire de sport, rester assis devant la télévision, c’est le mode de vie américain véhiculé par le petit écran. À Maurice l’obésité et le surpoids atteignent 50 % de la population », dit-il. Les autres dangers, affirme-t-il, sont les pesticides dans les fruits et légumes peu ou pas contrôlés, provoquant des maladies de peau et des cancers. Sans compter les hormones et les antibiotiques dans les viandes. « Cela entraînera de gros problèmes de santé à Maurice à long terme », ajoute-t-il. « Savez-vous qu’en Martinique le taux de cancer de la prostate est le plus élevé au monde à cause des pesticides dans les bananes ? ».
« À Maurice, il n’y a d’études à ce sujet. La recherche requiert un investissement. Il y a des gens compétents. Il faut qu’il y ait la volonté », dit-il. Pourquoi pas un centre régional de recherches à travers la Commission de l’Océan Indien si ce n’est un centre national. « Dans les îles les problèmes de santé sont presque les mêmes sauf des spécificités propres aux Comores et à Madagascar », note-t-il. M. Sewduth indique que la recherche devient difficile en France et même aux États-Unis pour des raisons politiques, alors qu’elle se développe aux Pays Bas, en Allemagne, en Belgique. Le chercheur voudrait bien servir son pays un jour dans le domaine de la recherche, néanmoins il pense « qu’il faut avoir un pied à Maurice et un autre à l’étranger car pour l’heure Maurice est isolée ».

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