RENCONTRE – Shiksha Hookum et Jean-Philippe François : Voyageurs des mers

Nombreux sont les Mauriciens qui tentent l’aventure d’aller bosser sur les bateaux de croisière. Shiksha Hookum et Jean-Philippe François en font partie. Respectivement photographe et DJ, ils ont la fougue et l’enthousiasme de la jeunesse, ainsi qu’une envie irrépressible d’explorer le monde et de découvrir de nouveaux horizons. Rencontre…

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À bientôt 23 ans, Shiksha Hookum est une jeune femme bien dans sa tête et dans sa peau. Photographe officiant à bord des paquebots de croisière appartenant à la Royal Caribbean International, elle croque la vie à pleines dents et prend son travail très au sérieux. Cette ancienne élève du Cosmopolitan College de Plaine-des-Papayes n’en est qu’à son deuxième contrat avec le géant des mers, mais fait déjà preuve de beaucoup de professionnalisme. « Mon job est de mettre les croisiéristes à l’aise devant l’objectif et de les immortaliser sous le meilleur angle possible. Après tout, ils veulent tous garder un beau souvenir de leur passage sur le bateau ». En shorts et en tongs ou en tenue de soirée, les guests se prêtent à l’exercice avec le sourire.

Shiksha Hookum est photographe à bord des bateaux de croisière et fait la fierté de ses proches

Shiksha Hookum a su saisir les opportunités d’emploi qu’offrent les bateaux de croisière. Ne se sentant pas à sa place dans les divers petits boulots dans lesquels elle végète à Maurice, cette passionnée de photographie se renseigne et découvre que les compagnies de croisière recrutent en masse à travers le monde. Elle décide de se jeter à l’eau avec le soutien de sa famille et prend contact avec l’un des recruteurs locaux, Vivaldi International Cruise Services Ltd, qui l’invite à postuler. « À partir de là, tout est allé très vite ! », confie la jeune femme. « J’ai signé mon premier contrat au bout de quelques mois seulement ». Mais avant de pouvoir monter à bord, elle a dû passer par l’incontournable case entretien via Skype avec le siège social de la Royal Caribbean, basé à Miami, en Floride, suivie d’une formation dispensée par la société The Image Group, dont l’une des activités consiste à fournir des photographes à l’industrie de la croisière.
Son premier contrat la conduit dans les Caraïbes, au Mexique et à Porto Rico notamment. « Au début, ce n’était pas évident. J’étais nerveuse et j’avais des appréhensions car je me retrouvais seule et loin de ma famille. Heureusement, tout s’est bien passé et, grâce aux conseils et à l’encadrement des membres de l’équipage, je n’ai pas tardé à m’adapter et à trouver ma vitesse de croisière. D’ailleurs, je garde un merveilleux souvenir de Porto Rico. La musique, l’atmosphère, la nourriture, les rigolades entre collègues… Tout ça est gravé dans ma mémoire », dit-elle avec un large sourire. Elle opte ensuite pour l’Asie comme nouvelle destination. « La culture et les traditions asiatiques me fascinent. J’ai pu découvrir le Japon et la Thaïlande, entre autres. Voyager et travailler en même temps est une belle façon de joindre l’utile à l’agréable. J’ai beaucoup de chance », estime la jeune femme.

Reporter-photographe

Mais si elle s’épanouit dans son métier, Shiksha confie que pour elle, être photographe sur les croisières n’est qu’un stepping stone. En effet, son but est de devenir reporter-photographe, plus précisément dans la food photography. « J’adore écrire et comme je suis photographe, j’aimerais combiner les deux. Pouvoir découvrir et partager les saveurs culinaires du vaste monde serait pour moi une grande satisfaction ». Et en parlant de nourriture, elle confesse que nos spécialités locales lui manquent quelquefois : « Parfois lor bato, mo envi manze enn dhal puri ou bien enn minn frire ! Mais mo rattrape moi kan mo vinn en vacances Maurice ». Au pays, justement, où son papa Sooreeadeo et sa grande sœur Shweta sont très fiers du cheminement accompli jusqu’ici par ce petit bout de femme. « Mon père a toujours souhaité de me voir diboute lor mo lipié. Étant la benjamine de la famille et d’aspect frêle, j’ai toujours été soutenue et encouragée à aller de l’avant par ma sœur aînée. Aujourd’hui, si j’ai pu me faire une petite place au soleil, c’est grâce à mes proches et à mes amis qui ont cru en moi », déclare Shiksha.

Resident DJ sur les flots.

Issu d’une famille modeste de Grand Gaube, Jean-Philippe François, 29 ans, est resident DJ depuis quatre ans à bord des paquebots de la Royal Caribbean. Mais contrairement à sa compatriote, son recrutement a été un peu plus compliqué. En effet, trois longues années se sont écoulées entre le moment du dépôt de sa candidature et son embauche. Trois ans durant lesquels le doute et le découragement se sont installés chez le jeune homme, qui n’a cependant jamais baissé les bras. À force de persévérance, il décroche enfin une entrevue en ligne avec les agents recruteurs au siège social de Miami. « J’ai galéré durant tout ce temps mais je me suis accroché à mon objectif. J’ai finalement obtenu une entrevue avec les recruteurs, qui ont tout de suite décelé en moi un vrai potentiel. Ils se sont d’ailleurs demandé pourquoi cela avait pris autant de temps (de la candidature à l’entretien)… », précise-t-il. Fort de son expérience d’animateur au sein d’un grand groupe hôtelier de Maurice, Jean-Philippe les convainc qu’il a sa place sur leurs bateaux en tant que DJ et reçoit une garantie d’embauche.

Jean-Philippe François adore son métier de DJ et n’en changerait pour rien au monde

Mais la partie n’est pas gagnée pour autant. Pour pouvoir concrétiser son rêve de travailler sur les navires de croisière, il lui a fallu compléter les démarches administratives en un temps record. « J’avais une semaine pour trouver l’argent de mon billet d’avion (celui-ci étant au frais de toute nouvelle recrue), le visa, sans oublier de passer les tests médicaux obligatoires. Et comme j’étais fauché à l’époque, j’ai dû emprunter à gauche et à droite. Sans l’aide de ma famille et de mes amis, je n’aurais jamais pu accomplir tout ça. En cela, je leur suis éternellement reconnaissant ». Une fois les procédures complétées, le jeune homme largue les amarres et met les voiles. Direction l’Italie, où se trouve son tout premier port d’embarcation. Il découvre alors la Méditerranée tout en apprenant un nouveau métier, de nouvelles règles de vie et à côtoyer des gens de différentes nationalités. « Une fois sur le bateau, tu dois vite apprendre quelles sont tes responsabilités et tes side duties. Si tu n’assimiles pas, tu te fais vite débarquer ! Pour ma part, monn manze ar li et en six mois, qui correspond à la durée standard d’un contrat, j’ai pu visiter l’Europe, le Brésil, l’Amérique et les Caraïbes, tout en faisant mon boulot. Même en rêve ce n’était pas possible ! Depuis cette première expérience, je ne me lasse pas de découvrir de nouveaux pays et de nouveaux visages. C’est tout bénef et très enrichissant », raconte le DJ.
S’agissant des conditions de vie des employés sur le paquebot, Jean-Philippe souligne qu’elles sont plus que correctes malgré une certaine promiscuité dans les logements réservés au personnel : « Certes, je dispose d’une petite cabine que je partage avec un collègue mais on s’y fait, d’autant qu’on s’y retrouve rarement à deux en même temps, les horaires de travail de chacun étant différents. Je dois aussi admettre que je suis mieux loti que certains de mes camarades qui occupent d’autres postes car lors des escales j’ai du time off et je peux aller me balader alors qu’eux doivent rester sur le bateau pour préparer le retour des croisiéristes ».

Séga lor bato

« Être animateur et DJ sur un bateau de croisière ne se résume pas à faire chauffer le dancefloor et à mettre de la musique, il faut aussi et surtout être à l’écoute de la clientèle. Il m’arrive souvent qu’un guest me demande tel ou tel morceau et je dois être prêt à satisfaire sa demande », poursuit Jean-Philippe. Et dans son stock se trouve également du séga. Évidemment ! « Rien ne me fait plus plaisir que de rencontrer des Mauriciens sur les croisières. Ça fait chaud au cœur de pouvoir parler avec des gens du pays et je sais aussi d’instinct qu’il y aura du séga dans ma playlist ! Je m’éclate derrière mes platines tout en faisant plaisir à mes compatriotes. Monn mett séga lor bato ! », lâche Jean-Philippe dans un grand sourire.

Tout comme Shiksha, Jean-Philippe a su faire preuve d’initiative et évolue désormais dans un domaine qui lui correspond. Leur message aux jeunes Mauriciens qui veulent se projeter dans une carrière sur les croisières : « On les encourage vivement à s’engager dans cette filière. Les opportunités sont multiples et chacun peut y trouver son compte, sans oublier que le salaire est attractif. Lancez-vous ! » La photographe et le DJ, eux, sont bien partis pour assouvir leur passion et ne sont pas près de jeter l’ancre. On ne peut que leur souhaiter : « Bon vent ! »

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