REPORTAGE—UNIVERSITÉ: La rentrée entre excitation et frustration

Alors que les jeunes du primaire et du secondaire profitent de leurs vacances, quelque 4 000 jeunes de l’université préparent activement leur rentrée. Si la grande rentrée à l’Université de Maurice (UOM) est prévue pour le 4 août, les nouveaux auront leur induction course cette semaine. Comme chaque année, c’est un mélange d’excitation et de frustration qui anime les jeunes qui feront leur entrée dans cet univers. Car c’est un fait qu’il devient de plus en plus difficile de trouver une place dans la filière de son choix en raison des grandes demandes. Les moins chanceux devront alors se contenter de ce qui reste. Beaucoup confient même qu’ils n’ont pas envie d’aller en cours pour étudier une matière qui ne leur tient pas à coeur.
S’il est beaucoup plus facile d’accéder à des études supérieures de nos jours, trouver une place dans la filière de son choix n’est pas gagné d’avance. Chaque année, déception et larmes accompagnent les réponses de l’université pour un certain nombre de candidats. Certains d’entre eux tombent de haut, car pendant tout leur parcours scolaire, ils se sont préparés pour effectuer des études dans un domaine précis. Sans compter les sessions d’orientation professionnelles.
C’est le cas notamment de Laurent, qui se préparait à suivre des cours en Civil Engineering, mais qui a dû se rabattre sur son deuxième choix. « À aucun moment je ne m’attendais à un tel scénario. Au moment des inscriptions, j’avais des points au-delà du minimum requis pour entrer dans cette faculté. Dans ma tête, c’était déjà OK, mais là, je suis profondément déçu. »
Ce phénomène touche particulièrement l’Université de Maurice (UOM), en raison des fortes demandes dans cette institution. L’université demande tout de même aux candidats d’indiquer quatre choix en ordre de priorité. Leurs points sont calculés sur place. Dans les programmes à fortes demandes, comme l’ingénierie ou le droit, la concurrence est rude. Pour certains cours, parfois, un simple choix de sujet au niveau du secondaire peut tout chambouler. L’UoM, elle, rassure que tout est fait dans la transparence (voir interview de la vice-chancelière plus loin).
Le seul souci c’est que dans ce cas précis, l’orientation académique et professionnelle tant réclamée ne sert pas à grand-chose. L’avenir s’annonce plus compliqué pour ceux qui se retrouvent dans les filières avec des opportunités restreintes. Ameera a obtenu son degré en histoire et relations internationales il y a quelques années. Le métier qu’elle exerce aujourd’hui n’a aucun rapport avec ce qu’elle a étudié. « Quand on m’a proposé ce cours, on m’avait dit, entre autres, qu’il pourrait y avoir des débouchés dans le domaine diplomatique. Mais lorsque j’ai approché les ambassades avec mon diplôme, on m’a fait comprendre qu’il fallait au moins un Master – cours qui n’existe pas – pour cela. Je n’avais d’autre choix que de chercher un emploi dans un autre secteur où mon degré ne me sert à rien. C’est également le cas pour mes autres camarades de cours. »
Roland Dubois, qui dirige le Youth Empowerment Programme (YEP), confirme que les opportunités d’emploi dans les différents secteurs sont inégales. « En un an et demi, 3 676 jeunes possédant une licence universitaire se sont enregistrés. Et au 30 juin dernier, 1 058, soit 29 % de ces jeunes, ont été placés dans une compagnie. Les trois filières avec le plus grand nombre de placés sont l’informatique avec 216, le Management/Business Management avec 182 et Finance/Accounting, 86. »
Paradoxe des fortes demandes
Paradoxalement, ce sont ces mêmes domaines qui se retrouvent avec le plus grand nombre de jeunes non placés. Cette situation découle du fait qu’il y a beaucoup de jeunes qui se retrouvent avec un diplôme dans ces filières. Les chiffres du YEP concernant les demandes toujours en attente parlent d’eux-mêmes : Management/Business Management avec 479, Finance/Accounting 325, l’informatique avec 174, le Human Resource Management avec 153 et langues avec 129.
C’est pour cela que Roland Dubois aborde la question différemment : « Il faut analyser la situation en prenant le ratio du nombre des jeunes placés par rapport aux jeunes enregistrés et non placés. Ce faisant, la sociologie vient tête avec seulement 5 placés sur 72 demandes. Il y a aussi les langues avec seulement 18 placés sur 147 jeunes enregistrés et l’histoire compte 6 placés sur 43 enregistrés. Je dois faire ressortir qu’il se peut que certains jeunes ont eu un emploi sans nous en informer. »
Ce constat du YEP n’est pas différent de ceux des professionnels du recrutement qui, depuis des années déjà, plaident pour une orientation professionnelle efficace. Le Human Resource Development Council (HRDC), placé sous le ministère de l’Éducation, a récemment pris les devants en organisant un atelier sur la question. Un centre d’orientation académique et professionnelle sera même mis sur pied bientôt. Sauf que, comme le font remarquer de nombreux jeunes, « le choix de carrière n’est pas toujours entre nos mains. »

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