Rodrigues: La pièce maîtresse manquante !

Le suicide dans sa cellule de la prison de Pointe-La Gueule, Rodrigues, dans la nuit du 27 au 28 mars dernier fait de Vanessa Varden la pièce maîtresse manquante dans la tentative d’élucider le meurtre de Jean-Marc Spéville. Ce père de deux enfants avait été retrouvé dans une mare de sang dans les rampes de Cascade Pigeons à Port-Mathurin le 26 février dernier. Dans un premier temps, Vanessa Varden, âgée de 27 ans, mère de deux enfants en bas âge, avait été appréhendée par les limiers du CID de Port-Mathurin et, subséquemment, un autre suspect, Jacques Désiré Laval Augustin, avait été arrêtée et accusé de meurtre. Ce dernier a systématiquement rejeté les accusations portées contre lui et a même porté plainte pour actes de brutalités policières contre sa personne.
Toutefois, les événements dans la nuit du 27 au 28 mars ont bousculé le cours des événements dans cette enquête criminelle dans l’île. En marge des procédures policières et judiciaires engagées, une mère courage, Jenny Clair, se bat pour rétablir la réputation de sa fille prise dans une spirale de détresse et, surtout, elle veut récupérer à tout prix le dernier héritage légué par son enfant sous forme de trois lettres retrouvées dans ses sous-vêtements au moment où elle avait commis l’irréparable.
Encore accablée par la séquence des faits qui ont chamboulé son quotidien, soit l’arrestation de sa fille pour un meurtre et ensuite le suicide de cette dernière, laissant sous sa responsabilité ses deux petits-enfants, Jenny Clair croit dur comme fer que Vanessa Varden n’y est pour rien dans l’agression mortelle de Jean-Marc Spéville. Pour cause, elle se fie aux confidences de sa fille alors qu’elle était encore en détention en cellule policière.
À la demande enquêteurs de Rodrigues, Jenny Clair avait pu s’entretenir avec sa fille en pas moins de trois occasions, dont deux dans la cellule du poste de Rivière-Cocos. D’ailleurs, ce fut lors de la troisième entrevue que Vanessa Varden s’était laissé aller à de véritables confessions sur ce qui s’était passé ce fatidique jeudi 25 février. « Li dir mwa : Mami, mo tom dan ou lipié, ou mo mama, mo dire ou mo pas finn fer sa krim-là », devait dire Vanessa Varden à plusieurs reprises, sur un ton suppliant, en faisant le récit de ce drame à sa maman.
La première confirmation est que ce 25 février, Vanessa Varden avait demandé une permission à son travail à Coopérative en vue de se rendre à Port-Mathurin pour des paiements relatifs à une connexion du Central Electricity Board à la petite maison qu’elle venait de terminer. Véritable coup de poisse ce jour-là avec Jean-Marc Spéville croisant son passage dans les parages du Casino de Port-Mathurin.
Vanessa Varden et Jean-Marc Spéville se connaissent depuis des années déjà. Jean-Parc Spéville, qui vivait en séparation avec son épouse, était tombé pour Vanessa Varden. Dans le temps, cette dernière avait commis l’imprudence de lui confier ses déboires conjugaux par SMS. Jean-Marc Spéville avait gardé toute la série de messages qu’il utilisait pour faire du chantage à la femme.
« À chaque fois, Jean-Marc faisait des propositions indécentes à ma fille et en cas de refus, il menaçait d’aller dévoiler les messages à son époux. Vanessa m’avait dit qu’elle avait cédé à la tentation et que depuis, systématiquement, il revenait à la charge. Ce fut le cas dans les rues de Port-Mathurin ce jeudi-là », raconte Jenny Clair à Week-End.
Aux dires de la mère, Vanessa Varden ne savait pas que Jean-Marc Spéville se trouvait dans le chef-lieu. En la croisant, celui-ci devait inviter la femme à monter dans son véhicule, prétextant de la déposer plus rapidement à son travail. Elle n’avait pu lire le vrai dessein de son interlocuteur.
Dans les parages de contour Oblas à Cascade Pigeons, Jean-Marc Spéville avait arrêté son véhicule en proposant Vanessa Varden une sortie spéciale. Pressée par les demandes répétées dans le véhicule, la femme était devenue impuissante. Toutefois, après être descendue du véhicule, elle devait faire comprendre à son concubin que c’était quasi impossible d’accéder à sa demande car ses vêtements allaient être salis par la boue.
Jean-Marc Spéville, ne voulant rien comprendre, s’était mis à la harceler dans cette partie isolée de Cascade Pigeons. Mais presque au même moment devait se présenter sur les lieux un sauveur pour Vanessa Varden et également le pire ennemi de Jean-Marc Spéville. Jacques Désiré Laval Augustin, une connaissance des deux, est intervenu de manière brutale pour rappeler à l’ordre Jean-Marc Spéville face à sa hardiesse.
« Eta ! To pa trouvé ki fam-là pa oulé twa ! Largue li ! Laisse li alle so travay », aurait lancé Jacques Désiré Augustin, qui n’était pas en bons termes avec Jean-Marc Spéville pour une vieille histoire de rivalités. Les deux devaient se mettre à échanger des coups et Jean-Marc Spéville s’était retrouvé à terre. Vanessa Varden tenta en vain de s’interposer pour éviter le pire.
La bagarre devait se poursuivre alors que Vanessa Varden n’eut d’autre choix que de prendre la fuite pour retourner à son travail, croyant qu’ils allaient se séparer après ces coups. « Li risse so sak, li galoupé li allé ! » ajoute la mère.
Dans sa version des faits à sa mère, Vanessa Varden avait avancé que ce fut tard dans l’après-midi qu’elle apprit que Jean-Marc Spéville avait été agressé mortellement. « Ma fille m’avait dit que dans l’après-midi, Jacques Désiré Laval était venu la voir à son trtavail et l’avait emmenée dans un couloir. Li tini lor so zépol et li dir Vanessa ferme to lagueule. Si to kozé, to mama reste tousel et to dé zenfan alle lekol dan Mangues. To éna enn mama, dé ser et dé zanfan. Si to kozé, mo alle touye zot. Vanessa ti gagn per vrémem », poursuit Jenny Clair dans son récit de ce combat pour réhabiliter la mémoire souillée de sa fille.
Un autre point crucial évoqué par Jenny Clair pour disculper sa fille du meurtre de Jean-Marc Spéville est que la roche utilisée pour écrabouiller le crâne de la victime est trop lourde pour elle. Pour cause, Vanessa Varden, une athlète émérite dans sa jeunesse, souffrait d’un lourd handicap au bras droit suite à des déboires conjugaux précédents. « Elle n’est pas en mesure de se servir de son bras droit. Elle n’arrive même pas à apporter un sceau d’eau. Comment a-t-elle pu soulever cette énorme roche pour la jeter sur la tête de cet homme-là ? » se demande-t-elle, le regard perdu au loin.
La mère raconte que Vanessa Varden avait été victime d’une lâche agression avec pour auteur son premier mari. Elle avait reçu neuf coups de couteau et a eu ses nerfs sectionnés, rendant son bras droit quasi inutilisable. « Vanessa était presque morte quand elle fut transportée à l’hôpital ce jour-là. J’avais supplié le médecin de sauver la vie de ma fille. J’avais demandé l’aide de Dieu qui m’a entendue. Pendant plus de deux ans, elle avait suivi des séances de physiothérapie », revit cette mère de famille qui ne comprend pas ce qui a poussé sa fille à se suicider.
« On m’a dit que l’on avait retrouvé trois lettres sur ma fille le jour de sa mort. Dans l’une des lettres, elle aurait décrit la misère et la souffrance endurées pendant sa détention. De son vivant, elle m’avait expliqué que l’on ne voulait pas prendre en considération ses explications. Dans une autre lettre, elle m’aurait fait des demandes concernant la garde de ses deux enfants. J’ai le droit légitime de prendre connaissance de ces lettres de famille pour compléter mon deuil. La police me dit que l’enquête n’est pas encore terminée et qu’elle ne pourra pas me donner ces lettres. Je sais que personne ne pourra retourner ma fille. Au moins, que les autorités me rendent les derniers voeux de Vanessa Varden », supplie Jenny Clair, déterminée à faire entendre sa voix…

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