LE SCANDALE DU CARDIAC CENTRE: Aujayeb mal placé pour conduire l’enquête

Lutchmeeparsad Aujayeb, Acting Assistant Solicitor General, est mal placé pour conduire l’enquête sur les conditions du gonflement suspect de l’enveloppe salariale de l’ancienne directrice du Cardiac Centre Vijaya Sumputh et celles non moins glauques entourant le renouvellement de son contrat. Pour la bonne et simple raison que lorsque toute l’affaire de cette nomination scandaleuse avait éclaté et que Week-End révélait les relations anciennes d’affaires entre le ministre et la directrice, il était le directeur de l’Independent Commission against Corruption, nommé unilatéralement par sir Anerood Jugnauth un 30 décembre 2014 et qu’il n’a pas donné de suites — non pas qu’il aurait diligenté de son propre chef —, mais suite à une plainte formelle logée par Yatin Varma. Ceux qui attendent un grand fracas de cette enquête maintenant que tous les protagonistes ne sont plus en poste risquent de rester sur leur faim.
C’est le 30 janvier 2015 que Vishwamitra Ramjee, un activiste politique du ML, est nommé à la présidence du Trust Fund for Specialised Medical Care (Cardiac Centre), qui est sous la responsabilité de son collègue de parti qui est le ministre de la Santé. Comme un facilitateur pour l’arrivée programmée de la protégée du ministre. C’est un mois après, en mars 2015, en dépit des promesses de recourir à des appels de candidature pour les postes publics, que la groupie d’Anil Gayan, Vijaya Sumputh, est propulsée à la tête du Candiac Centre, ce qui provoque une vive réaction et un haut le coeur dans l’opinion qui avait gobé les promesses d’assainissement de la vie publique de l’équipe Lepep.
En bonne ?compagnie
 Et comme si tout cela n’était pas déjà assez choquant, celle qui est en première ligne de toutes les activités de son parti, le Muvman Liberater, va également être catapultée sur le conseil d’administration de la Mauritius Post and Cooperative Bank et sur l’entité très sensible qu’est le Board Credit Committee avec des allocations qui sont loin d’être négligeable. On ne sait pas si avec la fusion en septembre 2015 MPCB-National Commercial Bank sous la nouvelle appellation MauBank elle n’a pas été jugée indésirable.
 Deux semaines après ces nominations scandaleuses, Week-End du 29 mars 2015 vient verser une nouvelle pièce au dossier : les relations d’affaires entre Anil Gayan et Vijaya Sumputh, subitement découvertes aujourd’hui au point d’intéresser l’ICAC de Navin Beekharry, celui qui, au dire du communiqué du DPP, s’est distingué dans l’affaire de l’Euroloan. Ce que révélait alors Week-End est que la première compagnie où on retrouve le tandem Anil Gayan-Vijaya Sumputh, Southall Company Ltd, avait été enregistrée le 21 août 2012 avec comme nature of business annoncé les “management consultancy activities (individual)”. Compagnie qui avait tenu sa réunion annuelle le 31 décembre 2014 trois semaines après les élections.
 La deuxième compagnie, Lex Advoc Associates Company Ltd, avec comme actionnaires Anil Kumarsingh Gayan et Vijaya Kumaree Sumputh, dont les objectifs sont “activities of head offices (registered office) real estate activities on a fee and contract basis” est, elle, enregistrée en juin 2013. Au sein de cette compagnie qui avait soumis son last annual return le 9 janvier 2015, c’est Anil Gayan qui agit comme directeur, alors que sa protégée en est la secrétaire.
 Plus intéressant encore, la compagnie Nightshade Limited, enregistrée le 22 mai 2008 au nom de Vijaya Sumputh. Celle-là avait ainsi décrit ses objectifs : “business, professional and Management Consultancy Service (including medical and para-medical practitioners and opticians.” Nous écrivions alors que “certains, à ce propos, pourraient y trouver un conflit d’intérêts…”
 C’est dans ce même article que Week-End retournait aussi sur le “previous” de ces “serial offenders”, qu’il rappelait que “Vijaya Sumputh avait été nommée directrice de la Tourism Authority en 2004 alors que le ministre du Tourisme n’était autre qu’Anil Gayan et que les dessous de cette proximité avaient, en 2006, été étalés à l’Assemblée nationale par son successeur à ce ministère, Xavier Duval”. Lequel expliquera que la directrice de la TA avait effectué des voyages en compagnie de son ministre de tutelle en quatre occasions et qu’ils s’étaient rendus à Dubaï, en Jordanie, en Égypte, au Liban, au Koweït, à Berlin, en Chine et à Singapour.
 Le précédent ?touristique
 Et à Week-End de relever que Xavier Duval avait precisé que “it is to be noted that Miss Sumputh participated in three promotional trips abroad although the objects of the Tourism Authority do not, in anyway, relate to promotion for marketing”, la TA étant d’abord concernée par le “licensing and enforcement of tourism enterprises”.
Le ministre du Tourisme avait aussi lancé “I think we will have to ask Mr Gayan in what capacity she travelled”. Un autre aspect qui avait suscité le courroux du ministre était que Vijaya Sumputh n’était pas apte à occuper le poste de directrice de la Tourism Authority étant donné que la loi stipule clairement que “political activists are not allowed to be employees of the Mauritius Tourism Authority” et que, de son point de vue, “this, in fact, is clearly illegal”.
Comme l’ICAC est restée impassible devant tout cela et devant ce qui prenait l’ampleur d’un scandale politique qui n’avait que trop duré, c’est l’Equal Opportunities Commission présidée alors par Brian Glover qui s’empare du dossier. Les protagonistes convoqués, Anil Gayan, Vishwamitra Ramjee et Vijaya Sumputh se défilent tous, refusent de répondre aux convocations de la commission, une attitude fortement encouragée par leurs collègues de Lalians Lepep qui jouent aujourd’hui aux vertueux.
 Quoi qu’il en soit, l’EOC poursuit son travail et finit par référer l’affaire au Tribunal de la commission et là aussi, les impliqués dans l’affaire recourent à des arguments et à des artifices légaux pour se débiner. Pendant que le duo de choc continue de s’afficher en public. Le ministre et sa nominée prenant même la parole dans des réunions publiques du ML, au point où sa présence constante au N°20 les mercredis surtout a pu laisser penser à des électeurs ébahis qu’elle était la véritable Constituency Clerk du ministre de la Santé d’abord, du Tourisme ensuite.
 Maintenant que les deux membres du ML qui régnaient sur le Cardiac Centre ont été forcés de déguerpir après les révélations du ministre Husnoo suivant la question de Rajesh Bhagwan, les insiders à la Santé veulent qu’il y ait une vraie investigation sur ce secteur, notamment sur ce qu’ils appellent la “Botswana Connection”, là où les interventions chirurgicales sont effectuées contre paiement, sur les ramifications familiales et intérêts entre politiques, professionnels du secteur et fournisseurs. Et si Rajesh Bhagwan n’avait fait qu’entrouvrir la boîte de Pandore ?

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