SON FILS ACCRO À LA DROGUE SYNTHÉTIQUE : “ Mon fils de 19 ans a tenté de me tuer ” selon un père de famille

La drogue synthétique prolifère dans ce quartier chaud de l’Est et n’a pas épargné le fils de cet homme de 50 ans, qui ne sait pas à quelle porte frapper pour faire réhabiliter celui-ci, âgé de 19 ans. Dans le quartier où des vendeurs de drogues synthétiques, encore adolescents, ont trouvé un moyen facile de se faire de l’argent, les cas de vol auraient également augmenté ces derniers temps. Des consommateurs fauchés ne passent pas par quatre chemins pour trouver de l’argent pour acheter leurs produits. Quant au fils de notre interlocuteur, il continue à voler et terroriser sa famille. Pour le père du jeune toxicomane, rencontré quelques jours après que son fils a tenté de le tuer, le ministre de la Santé, Anil Gayan, fait fausse route quand il affirme que la situation de la drogue synthétique à Maurice n’est pas alarmante.
Votre fils se drogue depuis ses 14 ans. Aujourd’hui il a 19 ans et consomme de la drogue synthétique. Que pensez-vous quand le ministre de la Santé, Anil Gayan, affirme qu’une situation comme la vôtre n’est pas “alarmante ?”
 Quand votre enfant se drogue, la situation pour vous est extrêmement grave. Li pe fini enn fami. Quand il est en manque et qu’il n’a pas d’argent pour se procurer de la drogue, il s’en prend à sa propre famille. Il va s’attaquer à des personnes qui gagnent leur vie honnêtement, qui économisent pour leur voler. Il va agresser des femmes en chemin pour leur arracher leurs bijoux, leur pension Enn zafer koumsa pas grav ? À cause de la drogue, un fils a tué sa mère dans un village plus loin. Enn zenfan ki touy so mama akoz la drog, sitiasion pa grav ? Il y a deux ans, lorsque mon fils n’avait pas accès à la drogue et qu’il était en manque, il buvait de l’eau de Javel ! Actuellement, il n’y a que de la drogue synthétique dans le quartier. Il n’y a que ça qui est en vente. Des adolescents de 14 ans sont devenus des vendeurs. Si le ministre Gayan pense que la drogue synthétique n’est pas un problème, je lui raconterai le calvaire que me fait subir mon fils. Si un ministre pense ainsi, je vous dirai sans détour qu’il fait fausse route.
 Comment votre fils a-t-il commencé à se droguer ?
 Il n’était pas doué pour les études. Après deux échecs au CPE, il a été admis dans une institution prévocationnelle. Mais comme il n’était pas appliqué, il a changé d’établissement. Il n’y a fait que deux mois avant d’abandonner les cours. So la tet dir, li pa ti pe lir. À 14 ans, il a trouvé de l’emploi comme vendeur d’articles divers dans un van. C’est à ce moment-là que tout a basculé. Il a commencé à avoir de l’argent et s’est laissé influencer par les plus âgés. Je n’avais pas encore compris qu’il se droguait. Ce sont d’autres personnes qui me l’ont dit. Moi, je le voyais rentrer du travail et aller se mettre au lit. Il est devenu encore plus accro à 16 ans quand il a quitté la maison pour aller vivre chez une fille, âgée alors de 14 ans. Il est parti pendant six mois. Il nous était impossible de le raisonner. Vous savez, il a même ramené une femme, mère de six enfants, à la maison. Il avait alors 17 ans. C’était une femme que fréquentait son ami. Le même soir, le concubin de la femme, accompagné d’un groupe de personnes, est venu la chercher. Ils ont fait du vacarme devant ma porte et tapé sur les fenêtres. J’ai dû mentir, dire qu’elle était déjà partie pour éviter le pire. Pendant trois à quatre ans, mon fils se levait très tôt, allait travailler, rentrait du travail drogué, il jetait son sac par terre et dormait. C’était ça, sa vie ! Depuis quelque temps, il consomme de la drogue synthétique. Mais le pire survient quand il n’a pas les Rs 200 pour sa dose quotidienne.
 Le pire, c’est-à-dire ?
 Il n’est pas du genre à chômer. Il travaille dès qu’il trouve un emploi. Mais, en cinq ans, sa mère et moi n’avons jamais vu la couleur de son salaire. Par contre, il nous réclame souvent de l’argent. Moi, je lui tiens tête. Je suis un ancien chauffeur reconverti en maçon. Je ne travaille pas toujours et il sait que je n’ai pas d’argent à lui donner. Ma femme, elle, travaille tous les jours et parfois le week-end pour le compte d’un planteur. Alors, il la harcèle. Il l’attend à la sortie de son travail ou sur le chemin, pas loin de la maison. Quand elle lui dit qu’elle n’a pas d’argent sur elle, il l’insulte comme jamais un fils ne devrait le faire, il lui manque de respect, la traumatise jusqu’à ce qu’elle cède. Il la fait même sortir le soir pour lui acheter des cigarettes. Ma femme est psychologiquement perturbée. Il y a trois jours, il s’en est pris à moi. Il a brandi un sabre et voulait me tuer à tout prix. Nous avons connu un enfer. Il est monté sur le toit de la maison et injuriait à voix haute. Il était incontrôlable. J’ai essayé de lui arracher le sabre. Je savais que je pouvais lui faire du mal et commettre l’irréparable. Finalement, j’ai appelé la police, car nous avions peur que la situation ne dégénère. Quand les policiers sont arrivés, je leur ai montré les aiguilles et tous l’attirail qu’il utilise pour se droguer. Sincèrement, je pensais qu’ils allaient arrêter mon fils et que cela nous aurait donné un répit. Il n’en a rien été !
 N’avez-vous jamais songé à solliciter l’aide des centres spécialisés pour réhabiliter votre fils ?
 Quand il est sous l’emprise de la drogue et qu’il est apparemment calme, il nous promet d’intégrer un centre. Mais il ne le pense pas. Malgré notre volonté, nous ne pourrons rien faire si lui n’en a pas. À 17 ans, il avait été arrêté pour possession de gandia. Après quelques jours en cellule, il a été libéré sous condition. Mais ce n’est pas pour autant qu’il s’est bien conduit. Finalement, comme nous ne savions pas trop comment nous y prendre, nous avons eu recours à la Family Protection Unit car notre famille est en train de souffrir et nous vivons dans la terreur. Mais sans résultat. Mon fils nous terrorise. Li kas vit, li kas tou dan lakaz kan li lager akoz ladrog. Il vient de me voler tous les carreaux céramiques que j’ai récemment achetés pour le revêtement du sol de la maison. Il a volé l’alliance de sa mère. Il vole tout ce qu’il peut, y compris des vêtements neufs de son frère pour se faire de l’argent pour acheter sa drogue synthétique. Il prend nos aliments pour les troquer contre de la drogue. Vous savez, il se permet même d’inviter ses amis chez nous pour se shooter. Il y a des jours où toutes sortes d’individus viennent nous réclamer l’argent qu’il leur doit. Nous n’en pouvons plus.
 Comment surmontez-vous cette situation qui n’est pas vivable ?
 Si j’avais pu fuir la maison, je l’aurais fait. Ma mère très âgée qui vivait avec nous est partie vivre chez ma soeur. Mon fils l’obligeait à se rendre chez les voisins pour lui trouver des cigarettes et de l’argent. J’ai demandé à ma femme de partir aussi, d’aller vivre chez ses proches. Elle a refusé. Je l’aime plus que tout et quand je vois à quel point elle a dépéri, cela me stresse. C’est pour elle que je reste dans cette maison. Je crains pour sa sécurité. Je sais de quoi est capable mon fils si elle ne lui donne pas de l’argent. Nous aurions pu progresser. Améliorer notre situation. Comment surmonter cette épreuve quand, tous les soirs, on est obligé d’attendre qu’il dorme avant nous ? C’est une fois qu’il s’est endormi que nous pouvons dormir. Sinon, il tourne en rond et nous empêche de dormir.
 Votre fils ne veut pas décrocher de la drogue. Vous dites vivre un enfer. Comment envisagez-vous l’avenir ?
 S’il ne veut pas intégrer un centre, je ne pourrai malheureusement pas le contraindre à le faire. Par contre, je crois qu’il y aurait dû avoir un moyen légal qui obligerait un toxicomane comme mon fils à se faire admettre dans un centre de réhabilitation. Nous ne pouvons plus vivre sous le même toit que lui. Je voudrais qu’il s’en aille. Mais il ne le veut pas. Et ma femme a pitié de lui, elle craint pour sa sécurité. J’ai pris une décision, je vais demander à la Cour de l’expulser de ma maison. Li tro fatig nou.

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