SUCCESS STORY-MALVOYANT : Afraz Nandoo rêve d’intégrer le RCC après de bons résultats au CPE

Afraz Nandoo savoure pleinement ses vacances, le coeur rempli du sentiment d’avoir héroïquement franchi une étape de sa vie. En effet, ayant perdu la vue d’un oeil et ne voyant que peu de l’autre, le jeune garçon de 12 ans a néanmoins obtenu de bons résultats à l’issue des examens du CPE, avec 23 unités (3A + et 2A). Et ce, en n’ayant pris aucune leçon particulière. Du fait de ses bons résultats, Afraz Nandoo figure parmi les seuls 980 garçons à s’être vu attribuer un collège d’État, soit la SSS Bissoondoyal, à Rose-Belle. Toutefois, l’adolescent rêve d’intégrer le collège Royal de Curepipe. « Depuis que je suis petit, je rêve d’intégrer ce collège un jour parce que c’est le meilleur établissement de mon endroit », dit-il. Mais la raison la plus importante, pour son père, aveugle, est surtout « la proximité du collège avec notre résidence. Compte tenu du handicap d’Afraz, ce serait moins compliqué que de se rendre à Rose-Belle. »
Né d’un père qui est devenu aveugle au cours de sa vie, Afraz connaîtra le même problème dès son jeune âge. Sa soeur étant aussi aveugle, la défaillance visuelle est visiblement de source héréditaire. « On l’a su très tôt pour Afraz. Il est même allé à deux reprises subir des interventions chirurgicales à Chennai, mais on n’a pu sauver son oeil droit. Aujourd’hui, il suit des traitements à l’hôpital de Moka. Des médecins étrangers l’ont consulté il y a quelques semaines, mais disent qu’ils ne peuvent rien faire comme chirurgie. Ils ont suggéré des médicaments qui ne vont être disponibles qu’en avril prochain », confie le père, Twaher Nandoo, qui travaille depuis 27 ans comme réceptionniste à la Barclays Bank. À croire qu’Afraz suit l’exemple de son père, un battant pour qui, malgré son handicap, le travail représente la dignité et permet de nourrir sa famille, et qui suscite l’admiration de son entourage de par sa faculté de mémoriser des milliers de numéros de téléphone.
En dépit de nombreux obstacles qu’il a rencontrés, Afraz a su relever ce grand défi en réussissant brillamment à ses examens du CPE. Après la maternelle, son père l’inscrit dans une école primaire de la localité, à Eau-Coulée. Mais, la directrice se montrera réticente quant à la présence du petit Afraz dans son école. « Elle nous a dit que ce serait difficile pour l’école de faire le suivi d’Afraz. Elle nous a alors conseillé une école spécialisée. Sa mère a été très déçue. Finalement, j’ai pris contact avec Lizie dan la Main et Afraz y a été admis dès le Std I. À Lizie dan la Main, le directeur, M. Permal, l’a canalisé vers le braille, mais, moi, j’ai préféré qu’il continue avec les gros caractères, car Afraz a lui-même une préférence pour cela. Cela n’a pas été facile malgré tout. Quand il faisait ses devoirs, il devait placer les feuilles de papier près de ses yeux. Dieu l’a aidé. Je lui ai acheté un “magnifier” mais cela n’a pas été d’une grande utilité. » Bon père qu’il est, Twaher Nandoo veut mettre toutes les chances du côté de son fils pour qu’il réussisse. « J’ai cherché des enseignants qui pourraient le soutenir en dehors de l’école, mais les personnes que j’ai approchées n’ont pas eu le courage quand elles ont constaté le handicap d’Afraz. C’est un peu la même chose du côté de l’emploi. Malgré la loi votée par le gouvernement en faveur des handicapés, ceux-ci ont toujours des difficultés à se faire embaucher », constate Twaher Nandoo.
Qui a donc contribué au succès d’Afraz ? Son père reconnaît que le jeune garçon a toujours montré un potentiel. « À deux reprises, il a participé à des quiz à la radio sans que nous le sachions, et il a décroché des prix. Il a aussi participé à des concours de slam à l’Hôtel de Ville de Curepipe. Sa mère n’a pas un grand bagage académique. Son enseignante à l’école, Inu Doolub, l’a bien encadré et moi-même je l’ai aidé comme j’ai pu ». Le jour des résultats, avant même que ses parents l’emmènent à l’école, Afraz a été les chercher sur Internet, au moyen de sa tablette, avant de les divulguer à ses parents. « J’étais au travail et en entendant les résultats qu’il avait eus, les émotions m’ont envahi. Lui-même ne s’y attendait pas même s’il était confiant. Je suis très content d’autant que je ne lui ai pas mis la pression ».
Par ailleurs, le père d’Afraz lance un appel au ministère de l’Éducation pour que son fils soit admis au RCC, qui est plus près de son domicile. « À Rose-Belle, Asraf devra voyager par le bus et ce ne sera pas facile compte tenu de son handicap. Asraf est intelligent, mais bien des difficultés l’attendent dans sa nouvelle vie de collégien d’un point de vue pratique. Avec les autres élèves, il risque d’y avoir des bousculades, mais il devra s’intégrer », déclare le père. Très à l’aise avec l’Internet, Afraz se plaît à faire des recherches pour ses parents dès que ces derniers lui parlent d’une plante, d’un artiste, entre autres.
Quant à Twaher Nandoo, devenu aveugle alors qu’il s’apprêtait à préparer ses examens du CPE, il a eu à tout abandonner. À 23 ans, il s’est fait admettre au centre Loïs Lagesse et a passé son CPE avec 3A et 1B. « Mwa, zame mo ti pou panse ki mo ti pou vinn aveg. Mo’nn vinn aveg ver Std VI. Mo’nn bizin abandonn tou. A 23 an ki monn al Loïs Lagesse pou fer CPE. »
Fan de l’équipe de Chelsea, Afraz dit avoir continué à suivre les matchs de foot à la télé même s’il préparait son CPE. Il se dit très fier de sa performance tout en reconnaissant que tout était loin d’avoir été comme une lettre à la poste. « À Lizie dans la Main, on allait plus lentement. Il y avait des chapitres qu’on n’avait pas encore terminés au mois de septembre, mais nous faisions des révisions en même temps ».
Le centre Lizie dans la Main a accusé un taux de réussite de 100 % au CPE cette année. Son succès, Afraz l’attribue à lui-même, son enseignante et ses parents. S’il dit être motivé à l’idée de rentrer au collège, il ne cache pas non plus une certaine appréhension. « Il y aura plus d’élèves, mais je puise mon courage dans le Bon Dieu », dit-il. Quand on lui demande ce qu’il aimerait faire comme métier plus tard, Afraz réfléchit, puis répond : « Médecin. »

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