SUCRE : Le coup de semonce avec l’échéance 2017

Séance de travail, vendredi, entre le ministre Boolell et une délégation de The Real Good Food Company/Omnicane
L’échéance 2017, avec le démantèlement du Sugar Quota Regime par la Commission Européenne avec pour effet une éventuelle baisse de l’ordre de 43% du prix de la tonne, a eu pour effet de provoquer un véritable sursaut, voire un coup de semonce. Du côté de l’Hôtel du gouvernement, le ministre des Affaires étrangères, Arvin Boolell, s’est vu confier la responsabilité de piloter ce dossier délicat susceptible d’affecter la communauté des quelque 18 000 petits planteurs de cannes sans oublier les périphéries socio-économiques. Officiellement, le ministre de tutelle, Satish Faugoo, serait en mission à la Food and Agricultural Organisation (FAO). Dans l’industrie sucrière, le Syndicat des Sucres a tenté d’atténuer les conséquences néfastes découlant du rapport de la Commission Européenne sur les perspectives et tendances sur le marché agricole pour les dix prochaines années. Ce même Syndicat des Sucres pourrait être rattrapé avec les interrogations des planteurs au sujet des primes versées sous le Long Term Partnership Agreement à Sudzucker, une société européenne affichant des profits en hausse de 30% pour le dernier exercice financier en date.
Le ministre Arvin Boolell, qui a multiplié les séances de travail avec différents Stakeholders de l’industrie sucrière au cours de la semaine écoulée, présidera, mardi, une Brainstorming Session en vue d’élaborer une Roadmap avec pour horizon la période post-2017. « Au cours de cette séance de travail, nous allons passer en revue les défis qui se posent à ce secteur économique. La priorité sera d’assurer une plus grande visibilité à l’industrie cannière, des services de ce secteur en Afrique aux sous-produits. Des questions, comme le Bagasse Transfer Price au versement d’une prime à l’environnement aux planteurs de cannes, les activités de recherches du MISRI, de même que la dimension régionale, demandent à être mises en valeur », a-t-il fait comprendre à Week-End, hier. Une des options à être discutées concerne la tenue d’une exposition cannière avec la participation de tous les partenaires de l’industrie en vue de « mieux démontrer la multifonctionalité de ce secteur économique ».
Cette séance de travail se déroulera en présence de l’ambassadeur mauricien affecté à Bruxelles, V. Koonjul. Les avenues diplomatiques et politiques pour un nouvel épisode de lobbying auprès des instances européennes seront évaluées avec le dossier évoqué lors du prochain sommet Union Européenne/ACP à Bruxelles en avril prochain.
Vendredi après-midi, le chef de la diplomatie et ancien porte-parole du groupe des pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), a eu une séance de travail avec une délégation de The Real Good Food Company, groupe dans lequel Omnicane Ltd détient 25% du capital. La délégation est menée par l’Executive Chairman du groupe, Pieter Toffé. « Lors de ces discussions, nous avons évoqué l’importance des Economic Partnership Agreements (EPA) par rapport au dossier sucre et surtout aux activités de raffinage. Ce qui se fait au niveau d’Omnicane demande à être mieux connu pour l’avenir de l’industrie cannière », ajoute le ministre Boolell, qui a également abordé les conséquences d’un éventuel retrait d’Omnicane Ltd du Syndicat des Sucres et de la nécessité de protéger les intérêts des planteurs de cannes.
Avec l’échéance-2017 sur le front européen, le sort des petits planteurs et autres continue à préoccuper. Intervenant à l’ouverture de l’assemblée régionale paritaire ACP/Union Européenne, mercredi, au Sir Harilal Vaghjee Memorial Hall, le président de la République, Kailash Purryag, a fait état de l’importance du sucre dans une économie comme Maurice et des conséquences dramatiques des changements annoncés.
« We are very concerned with the conclusions of a study by the Commission published last December. Its projections inter-alia are that sugar production in the European Union will expand significantly and prices will fall. Such projections mean that only the most competitive producers will be able to survive with a price which is expected to be around 400 euros », déclare le président de la République. Ce prix de 400 euros en 2017 représente une baisse de 43% par rapport à celui de 2012.
Kailash Purryag a lancé un appel aux parlementaires européens et autres instances compétentes de l’Union Européenne en vue de revoir la décision d’abolir les quotas de sucre à partir de 2017. « Our flexi factories need a secure supply of sugar cane and this can only happen if our small and other planters obtain a fair and remunerative price in order to cultivate sugar cane », a-t-il fait comprendre à ce chapitre face aux délégués des ACP et de l’UE.
Entre-temps, le Syndicat des Sucres s’est engagé dans un exercice de communications pour faire comprendre que « les développements anticipés par la Commission dans son analyse, en terme d’accès futur au marché et de prix, doivent être interprétés avec précaution et utilisés avec discernement et ne doivent en aucun cas, à ce stade, nous mener à des conclusions hâtives quant à la compétitivité future de nos exportations et à la viabilité de notre secteur sucrier. » Pourtant, dans le dernier rapport annuel 2012/2013, le président du Syndicat des Sucres avait commenté des « damages that would result from an early abolition of the EU Sugar Quota Regime ».
Néanmoins, au-delà de cette différence d’appréciation pour des raisons tactiques des répercussions de l’échéance 2017, le Syndicat des Sucres pourrait avoir affaire à une véritable fronde de la part des planteurs au sujet des primes versées à Sudzucker sous le Long Term Partnership Agreement alors que le prix de tonne de cannes payée aux planteurs ne cesse de baisser d’année en année passant d’une pointe de Rs 18 500 à Rs 16 500 l’année dernière. Des sources officieuses avancent que le montant de la prime versée à Sudzucker par tonne de sucre exportée pourrait être en moyenne de Rs 6 000. Avec des exportation de 300 000 tonnes par an, le montant de la prime à Sudzucker serait de l’ordre de Rs 1,8 milliards.
Des planteurs de cannes comptent interpeller le Management du Syndicat des Sucres sur ces chiffres compte tenu qu’actuellement des procédures pour la reconduction de cet accord avec Sudzucker sont sur le point d’être bouclées. Pour les besoins de cet exercice, ils s’appuyeront sur des données disponibles dans le dernier bilan officiel du Syndicat des Sucres comme le démontre le tableau suivant :

D’autres sources, notamment proches de l’Hôtel du gouvernement s’interrogent sur les conditions dans lesquelles l’exercice d’appel d’offres pour le renouvellement du Long Term Partnership Agreement s’est déroulé ou encore sur la non-concrétisation d’une promesse de Frontloading de Rs 800 millions par Sudzucker dans le cadre de cet accord.
La grogne au sein de la communauté des planteurs à l’égard de l’axe Syndicat des Sucres/ Sudzucker gagne en intensité quand la performance de ce géant sucrier en Europe entre en jeu. Au cours du dernier exercice financier, Sudzucker a enregistré une progression des profits de l’ordre de 30% pour atteindre 974 millions d’euros (Rs 38, 9 milliards) contre 751 millions d’euros pour le précédent exercice.
« The sugar segment’s revenues climbed sharply. Operations profit (from sugar), which rose to 710 million euros (previous year 511 million) was once again the main highlights of the group results », soulignaient les agences de presse spécialisées lors de la publication des comptes de Sudzucker, laissant présager que le Uphill Battle qu’attend le Syndicat des Sucres s’annonce encore plus ardu que le rapport de la Commission Européenne…

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -