SYRIE: Pierre de touche d’un Ordre mondial fondé sur le droit

Les manoeuvres conjuguées de l’axe USA-OTAN-Israël-Turquie et Monarchies pétro-arabes pour « changer de régime » en Syrie alignent tous les atouts qui ont balayé le régime d’Hussein en Iraq et celui de Kadhafi en Libye, tous sauf un : le régime Assad ne souffre d’aucune « exclusion aérienne » ni de la menace de « mesures nécessaires » du Conseil de sécurité de l’ONU.
Russie et Chine, les deux membres non-occidentaux du Club du veto, en ont fait une « ligne rouge » pour stopper la dérive dite « intervention humanitaire » des meneurs occidentaux du club (États-Unis, Royaume-Uni et France), champions de la stratégie de « changement de régime » urbi et orbi.
Si bien que, bloqué au Conseil de sécurité, l’axe d’agression a été contraint, vendredi, de recourir à l’Assemblée générale pour faire voter un texte – dûment soumis par l’Arabie saoudite, ce modèle de démocratie et de droits égaux! – condamnant « l’usage d’armes lourdes » par Damas et appelant au départ du régime Assad.
Maurice a voté pour la résolution
La résolution, non contraignante, a recueilli 133 voix, dont celle de Maurice, contre 12 (Russie, Chine, Syrie, Iran, Cuba, Bolivie, Venezuela, Nicaragua, Belarus, Myanmar, Corée du Nord et Zimbabwe) et 31 abstentions, dont l’Inde, le Pakistan, le Brésil, l’Afrique du Sud, Madagascar, Guyana, et même Saint-Vincent et les Grenadines!).
Nul doute que, suivant les câbles de Wikileaks, le gouvernement Ramgoolam se méritera un satisfecit de l’ambassade US à Port-Louis, même si, comme l’ont souligné plusieurs orateurs, cette résolution blâme une seule partie au conflit, omet de condamner les terroristes armés qui mettent la Syrie à feu et à sang, viole la souveraineté d’un État membre, et introduit la « loi de la jungle » dans le cadre du droit international.
La Syrie dominant le « menu du jour » d’une équipe Obama cernée par l’échéance électorale et le lobby israélien, le vote est intervenu dans la foulée de la démission de Kofi Annan comme médiateur de l’ONU et de la Ligue arabe en Syrie. Du déjà-vu pour moi, qui ai noté en mars 2003 le départ précipité des observateurs de l’ONU d’Irak à la veille du bombardement et de l’occupation du pays par George Bush et ses acolytes habituels.
Des armes lourdes pour les terroristes
Le vote à peine terminé que l’on apprenait la livraison d’armes lourdes, de missiles et de téléphones satellitaires aux terroristes syriens, des sunnites endoctrinés par le wahhabisme saoudien, entraînés en Turquie, et encadrés par les services spéciaux de l’OTAN et d’Israël.
L’armée reprenait le contrôle de Damas et mettait au jour des fosses communes de civils et militaires pro-régime exécutés et brûlés par les Contras syriens, qui ont piraté le combat légitime des opposants civils et qui opèrent sous un « Conseil national syrien » calqué sur le « Conseil national libyen » de triste, et récente, mémoire.
Les intérêts convergent : Israël, l’Arabie saoudite et la Turquie veulent tous casser l’axe à dominante chiite qui relie la Palestine, le Hezbollah, la Syrie et l’Iran. Le complexe ottoman des Turcs, qui ont régné sur les Arabes durant 700 ans, éclatait samedi par une visite inopinée et unilatérale du ministre turc des Affaires étrangères à Kirkouk, capitale du pétrole du Nord irakien que se disputent Kurdes, Arabes et Turcomans.
Chaos gérable et Palestine
Washington et l’OTAN évoquent l’après-Assad mais ils se contenteront, comme en Irak et en Libye, d’un chaos gérable, à défaut d’un régime stable à leur dévotion. Les pétro-émirats veulent, après l’Irak d’Hussein, en finir avec le parti Baas qui, malgré ses nombreux défauts, reste laïc, pluraliste, antisioniste, antimonarchiste, anti-impérialiste, républicain, social-démocrate – quitte à passer par une vaste guerre entre sunnites et chiites.
L’exercice de vendredi devant l’Assemblée générale de l’ONU a démontré que, dans le rééquilibrage mondial en cours, le vieil Occident manoeuvre sans feuilles de vigne – alors que Russes, Chinois, Indiens, Brésiliens, Iraniens, Sud-africains et autres, incarnent une volonté de retourner au droit international et au règlement des conflits par des voies politiques, et non militaires.
Retournement à prévoir dans les semaines à venir : la Palestine va demander son adhésion à l’Assemblée générale comme membre non-étatique de l’ONU, et c’est le vieil Occident qui s’en trouvera embarrassé! Maurice pourra alors se démarquer, quitte à mécontenter un peu l’ambassade US à Port-Louis!

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