(Tirs croisés) Financement des partis : plus de transparence avec les propositions de loi ?

Lors de la récente proposition, par le gouvernement, d’une nouvelle loi sur le financement des partis politiques (Declaration of Assets Bill), le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a soutenu que le but est d’apporter davantage de transparence et “d’accountability” et de lutter contre la corruption. Qu’en est-il vraiment ? Selon Patrick Assirvaden, président du Parti travailliste (PTr), les propositions du gouvernement comprennent « beaucoup de non-dits et des questions qui doivent être éclaircis ». Il se dit « contre » le financement des partis par l’État et se demande quels sont les pouvoirs qui seront accordés à la Commission électorale « pour s’assurer que les déclarations des partis politiques ou des candidats soient vraies ou fictives ». Tout en reconnaissant la crédibilité du commissaire électoral et de ses assesseurs, il remet en question l’indépendance et la neutralité de l’ESC dans l’exercice de ce nouveau rôle d’inspecteur qu’on veut lui attribuer, notamment suite à la récente nomination d’un membre de “lakwizinn”. Il regrette par ailleurs que les “returns” des partis soient gardés secrets. « Où est donc la transparence ? » se demande-t-il.
Économiste, citoyenne engagée, cofondatrice de la Mauritius Renewal Society et membre fondatrice de Nou Repiblik, Manisha Dookhony estime que cette proposition de loi est « un bon début » mais comporte des “loopholes”. Elle est d’avis que « les partis devraient déontologiquement demander que les dons soient en chèque ou en transferts bancaires ». Quand le don se fait en liquide, dit-elle, « il n’y a pas vraiment de traçabilité” ». Elle suggère également que les partis s’engagent à ce qu’il n’y ait pas d’argent de source douteuse et à faire un “Know Your Client”. Tout en se demandant si l’ESC a les compétences nécessaires pour inspecter les comptes des partis, elle estime que d’autres institutions, comme l’Audit Office ou la FIU, sont « plus aptes » à faire ce genre de recherches. Manisha Dookhony se dit pour le financement des petits partis plutôt.
Pour sa part, Ram Seegobin, de Lalit, ne croit pas qu’il y aura plus de transparence avec une telle loi. Compte tenu du fait que c’est le Premier ministre qui nomme les membres de l’ESC, « ce n’est que très rarement que vous entendrez l’ESC faire des inspections sur les partis au gouvernement ». Il ajoute : « Les partis de l’opposition se sentiront victimisés. » Plutôt que l’ESC, dont la crédibilité peut être, selon lui, atteinte avec ce nouveau rôle, « nous aurions préféré une autre instance nommée par le judiciaire ».

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Patrick Assirvaden (président du PTR) : « Beaucoup de non-dits et de questions à être éclaircis »

 

Selon le PM, avec la nouvelle loi sur le financement des partis politiques, il y aura plus de transparence et “d’accountability” et cela aidera à combattre la corruption. Qu’en pensez-vous ?

Le projet du Premier ministre a été fait à la va-vite, pour simplement tuer l’adversaire du MSM. Tout le monde sait que le PTr a un trésor de guerre que la police a confisqué dans les coffres du Dr Navin Ramgoolam et on connaît le montant de ce que possède le PTr. C’est connu de l’île Maurice entière. Personne ne sait combien d’argent il y a dans les armoires du MSM. Quelle est la fortune de guerre du MSM, du MMM ou du PMSD ? Dire que ce projet mettra tout le monde sur un pied d’égalité n’est donc pas vrai. Deuxièmement, on dit que le projet permettra de combattre la corruption, mais quels sont les pouvoirs qui seront accordés à la Commission électorale pour s’assurer que ce que les partis politiques ou les candidats déclarent est vrai ou fictif ? Est-ce que la Commission électorale, de par le projet présenté par le Premier ministre, aura en son sein des auditeurs pour examiner les “returns” des partis politiques ? Donc, venir dire que ce projet de loi fera automatiquement reculer la corruption n’est pas vrai car l’hypocrisie, c’est d’avoir étouffé financièrement le parti travailliste, d’avoir bloqué ses comptes, d’avoir coupé les ressources financières du parti pour qu’il n’opère pas. Or, le peuple est en droit de savoir ce qu’il y a sur le compte du MMM, MSM et du PMSD. Que ces partis déclarent tout ce qu’ils ont et, de là, on commencera à discuter.

Pensez-vous que l’ESC est une instance appropriée pour gérer un “Political Activities Public Financing Fund”, outre les responsabilités qu’elle a déjà ?

C’est une ébauche de projet de loi qui comporte beaucoup de non-dits et de questions à être éclaircis. On ne dit pas que l’ESC n’est pas apte à gérer ces choses mais nous voulons savoir quels seront les pouvoirs qui lui seront conférés, chose qui n’est pas précisée. Par ailleurs, l’ESC compte des personnes de calibre: le commissaire électoral, M. Rahman et ses assesseurs sont reconnus pour leur indépendance. Mais, il y a aussi au sein de la commission un membre de “lakwizinn” qui a été nommé, Mme Ragavoodoo, qui est l’avouée du Premier ministre et qui est dans le cercle intime de Pravind Jugnauth. Les “returns” du PTr, du MMM, du MSM, avec les noms des donateurs, seront remis à l’ESC avec une personne aussi proche du MSM. Où sont l’indépendance et la neutralité des institutions ? On dit qu’en France, c’est comme ça, en Angleterre, c’est ainsi. Mais dans la Commission électorale de France, d’Angleterre ou des USA, y a-t-il des nominations de “lakwizinn” ? Non. Donc, nous voulons savoir quels seront les pouvoirs de l’ESC pour qu’il n’y ait pas de pression et de “leakage”, pas par des personnes comme Irfan Rahman, mais par les nouvelles nominations.

Comment assurer que l’ESC soit vraiment indépendante dans cette nouvelle tâche qu’on entend lui confier ?

Il faudrait ne pas nommer des gens de “lakwizinn” ! Il ne faut pas qu’il y ait des agents du MSM dans l’ESC. On ne manque pas d’experts honnêtes, intègres et indépendants. La meilleure chose à faire, c’est que l’institution ait une perception d’indépendance. Nous avons vu ce qui s’est passé au Cardiac Centre avec Mme Sumputh; à l’IBA avec Mme Choomka; avec le permis des radios, avec l’agent du MSM, Appaya, Chairman de l’IBA, et M. Bocus, membre du board de l’IBA et agent du MSM dans la circonscription No 3. Nous avons vu comment les permis ont été octroyés. C’est donc un “pattern” du MSM. C’est ce qui nous fait peur. C’est ce qui fait le PTr réfléchir à deux fois avant de dire oui à un projet. On est pour un cadre juridique, mais avec des gens indépendants.

Êtes-vous pour le financement des campagnes des politiciens par l’État ? Beaucoup font ressortir que c’est l’argent des contribuables qui est concerné…

Personnellement, je ne suis pas pour. Déjà, les partis politiques ont pas mal de sponsors dans le cadre d’une campagne électorale. Après une élection, SAJ est venu dire à la population qu’il a fait construire le Sun Trust avec l’argent qui est resté, soit environ Rs 200 M. Si nous extrapolons, après les élections de 2014, d’après l’ébauche de Pravind Jugnauth, l’État aurait dû donner au MSM autour de Rs 45M. Vous réalisez, un leader vient dire qu’après les élections, qu’il lui reste Rs 200 M pour construire un bâtiment… Et l’État contribuera Rs 45M dans les caisses du parti. La population est-elle prête à accepter le financement des partis politiques par l’État ? Je ne pense pas. Un député en France ou en Angleterre n’opère pas comme un député à Maurice. Mais, un cadre légal de financement des partis politiques pour plus de transparence est une bonne chose. Là où le bât blesse encore, c’est dans l’ébauche de Pravind Jugnauth, où il est dit que “les returns” des partis politiques seront gardés secrets. J’ai été élu en 2010, j’ai fait un “return” mais c’est resté dans les tiroirs. Là, on en préconise avec les noms des sponsors qui seront gardés dans un tiroir quelque part. Où est la transparence ? Ce qu’on reproche souvent aux politiciens au pouvoir, c’est qu’ils retournent l’ascenseur à ceux qui les ont aidés. Mais, comment les journalistes et le reste de la population sauront-ils qu’un parti au pouvoir demain retourne l’ascenseur à un sponsor ? Je dis que M. X a répondu à un appel d’offres alors que M. X m’a aidé pour les élections. Or, la publication de ces “returns” permettra de savoir si celui, qui a eu des contrats, a financé la campagne du MSM ou du PTr ou d’un ministre. Pourquoi garder secret ce que la population demande ? Nous demandons que tous les partis soient sur la même longueur d’onde. Que le MSM, le MMM, le PMSD montrent à la population à combien s’élève leur fortune de guerre dans les armoires, dans les comptes à l’étranger ou dans le bâtiment du Sun Trust.

Quel serait, pour vous, le meilleur mode de financement des partis politiques ?

Je ne suis pas pour que l’État finance. Il faudra légiférer avec des points bien stricts pour que les sponsors du privé aident les partis politiques mais que ce soit dans la transparence et que le public puisse voir. Demain, au pouvoir, la population doit savoir qui a aidé le PTr, qui est au pouvoir. Le PTr retourne-t-il l’ascenseur à ces personnes-là comme le MSM le fait aujourd’hui à travers les permis donnés à gauche et à droite ? Toute loi, s’il n’y a pas de transparence, comportera toujours des doutes.


Manisha Dookhony (économiste et citoyenne engagée) : « Un bon début mais des “loopholes” »

 

Selon le PM, avec la nouvelle loi sur le financement des partis politiques, il y aura plus de transparence et “d’accountability” et cela aidera à combattre la corruption. Qu’en pensez-vous ?

C’est un bon début. Il y a plusieurs choses qui sont bien dans cette proposition de loi et le fait même qu’on l’introduise est important. Historiquement, Maurice est un des deux pays en Afrique, avec le Bénin, à avoir une limite de dépenses pour les élections. Maintenant, on vient renforcer la démocratie dans le pays. Par contre, il y a quand même pas mal de “loopholes” dans cette proposition de loi. Mais, aucune loi n’est parfaite, surtout s’agissant de financement de partis politiques.

Quels sont ces “loopholes” ?

Il y a divers types de financement: de partis, de candidats. Mais, si vous êtes un politicien et pas nécessairement un candidat et que vous faites des dépenses pendant les élections, serez-vous concerné par cette loi ? Deuxièmement, il y a différents types de montages financiers qui peuvent être faits pour le financement des différents partis. Quand je lis ce qui est proposé, je ne suis pas sûre que tout sera sous cette loi. Il faudrait qu’on voie les différents types de financements. Autre chose: les dons en espèce ne seront pas réglementés. Si demain, une mafia de la drogue décide de financer en espèce toutes les dépenses (bus, nourriture, bases, etc.) d’un parti, d’un politicien ou d’un candidat, que se passera-t-il ? Surtout s’il s’agit d’argent illicite. On sait qu’à Maurice, selon la FMI, on ne connaît pas les sources d’environ 20% de notre économie. Et, quand on voit la quantité de saisies de drogue dans le pays…Maurice est un centre financier très avancé. Quand on fait des montages financiers, souvent, cela peut être très compliqué, surtout pour savoir qui est “l’ultimate beneficiary”. Les partis peuvent utiliser toutes sortes de montages pour pouvoir se faire financer. Je ne vois pas vraiment de choses concrètes face à cela. Peut-être y aura-t-il des renforcements après.
Si vous passez, pour donner l’argent au candidat, par un agent et que c’est celui-ci qui gère ce financement, l’agent n’est pas concerné par la loi. Si c’est en liquide, il n’y a pas de trace. Même si l’argent est donné au candidat en liquide, cela n’entre pas nécessairement dans les livres du parti. Donc, ce ne sera pas répertorié. Les partis devraient déontologiquement demander que les dons soient en chèques ou en transferts bancaires, et même si c’est en liquide, que la personne signe un document. Les partis devraient aussi s’engager à ce qu’il n’y ait pas d’argent de source douteuse et à faire un “Know Your Client”.

Que pensez-vous des nouveaux pouvoirs qu’on entend accorder à l’Electoral Supervisory Commission ?

Pour l’instant, l’ESC fait bien son travail d’organisation des élections et de leur supervision. Là, on veut lui donner toute une panoplie de nouvelles fonctions. Mais, l’ESC a-t-elle les compétences requises pour le faire ? Est-elle assez indépendante pour le faire ? A-t-elle le financement nécessaire pour ces nouvelles responsabilités ? Je dirais que d’autres institutions, comme l’Audit Office ou la FIU, sont plus aptes à faire ce genre de recherches. L’ESC pourrait aussi recruter des personnes de ces institutions pour examiner les sources d’argent et les dépenses.

Comment assurer que l’ESC soit vraiment indépendante dans cette nouvelle tâche qui lui est confiée ?

Pour l’instant, l’ESC agit plus comme un “board”. Il faudrait une permanence car le travail qui lui sera alloué est conséquent. Ensuite, comment choisir les cadres dirigeants ? Il faut vraiment faire attention. On ne voudrait pas avoir le même cas comme pour la Electoral Boundaries Commission, où il y a des proches d’un gouvernement ou d’un autre sur le “board”. Tous les partis peuvent se mettre ensemble pour choisir les membres dirigeants. De plus, il faudrait que cette instance ait un financement indépendant. Troisièmement, les ex-candidats qui seront des députés ne devraient pas être juges. Comme pour l’EBC, une des raisons pour lesquelles on n’a pas de vraies répartitions, c’est que les députés peuvent bloquer un projet de loi quand ce n’est pas dans leur intérêt.

Êtes-vous pour le financement des campagnes des politiciens par l’État ? Beaucoup font ressortir que c’est l’argent des contribuables qui est concerné…

Il y a deux manières de penser. Depuis une vingtaine d’années, il y a eu beaucoup de changements dans les lois électorales en Angleterre et en France, entre autres. Beaucoup vont vers ce financement par l’État dans le but de diminuer le poids des lobbies (privé, groupes religieux, mafia, etc.). Deuxièmement, c’est pour donner un peu plus de soutien aux partis qui ont moins de financement. Par contre, quand on dit que le parti doit atteindre les 10% de votes pour en bénéficier, il faut que le parti soit là depuis assez longtemps. C’est extrêmement difficile pour des partis émergents (petits partis avec un grand poids et de bonnes pensées). Pour moi, ce seuil minimum va à l’encontre du développement du pluralisme politique qui aide à améliorer la démocratie. D’autre part, dans l’histoire des coffres-forts, on voit bien que le PTr a beaucoup de moyens. Les autres partis doivent avoir au moins la même quantité d’argent. Donc, ces grands partis ont-ils vraiment besoin de l’argent du peuple ? N’est-ce pas un système pour eux de s’enrichir davantage ? Ce pendant, je suis pour ce type de financement pour les petits partis.

Pour vous, quel serait le meilleur mode de financement des partis politiques ?

Premièrement, la transparence. Deuxièmement, une répartition équitable des finances. S’il y a un “pool” pour tout le secteur privé pour financer tous les partis politiques, ce serait plus intéressant. Ensuite, les sanctions proposées sont très légères. En France, quand il y a des maldonnes, on peut annuler l’élection d’un candidat. Ici, ce n’est que des amendes et réductions du financement. Il faudrait des sanctions plus proportionnelles aux délits et en cas de fraude avérée, l’accusé doit perdre son siège.


Ram Seegobin : « Je ne crois pas qu’il y aura plus de transparence »

 

Le PM a dit qu’avec cette nouvelle loi sur le financement des partis politiques, il y aura plus de transparence et “d’accountability” et que cela aidera à combattre la corruption. Qu’en pensez-vous ?

Je ne crois pas qu’il y aura plus de transparence. Quant à “l’accountability”, cela aurait dû être un concept démocratique et non bureaucratique. Revenons à la transparence dans cette proposition: on veut, par exemple, augmenter les dépenses autorisées de Rs 9 M actuellement à Rs 80 M pour une alliance qui présente 60 candidats. Mais, dans les propositions, je n’ai pas vu grand-chose sur les moyens qui seront pourvus à l’ESC pour contrôler les dépenses. Quand le gouvernement vient avec ce chiffre de Rs 80 M, il l’a probablement puisé de sa propre expérience, trouvant que c’est un chiffre réaliste. Ce qui signifie que lors des dernières élections, il avait déclaré Rs 9 M comme dépenses. Maintenant, on vient dire que le chiffre de Rs 80 M est plus réaliste. Cela montre qu’il y a un total manque de transparence dans le contrôle des dépenses. Donc, je ne vois ni de transparence ni “d’accountability”. Autre point: les dons en espèces ne seront pas régulés. Cela veut dire qu’un individu ou un groupe pourra faire autant de dons de “biryani”, de caisses de bières et d’oriflammes, entre autres. Il y a un autre point regrettable, soit le fait qu’il n’y aura pas de dons anonymes. C’est grave dans le sens où les fonctionnaires, les membres des corps para-étatiques et les municipalités n’auront pas les moyens de soutenir financièrement un parti de leur choix.

Que pensez-vous des nouveaux pouvoirs accordés à l’Electoral Supervisory Commission ? Pensez-vous que cela soit une instance appropriée pour inspecter les comptes des partis politiques ?

C’est un autre problème. Je ne pense absolument pas que l’ESC soit une instance appropriée pour une telle tâche. D’après la Constitution, l’ESC et le commissaire électoral ont un rôle bien précis et défini, à savoir de mettre à jour et maintenir le registre électoral. L’ESC doit de plus enregistrer des candidats avant des élections et superviser le déroulement des élections, d’où son appellation “Electoral Supervisory Commission”. Maintenant, avec ces propositions, on fait de l’ESC une sorte de “registrar” pour les partis politiques. Ce qui est grave car l’ESC fera des inspections et il y aura toujours un doute que celles-ci se fassent sur une base arbitraire. Ce n’est que très rarement que vous entendrez l’ESC faire des inspections sur les partis au gouvernement. Les partis de l’opposition se sentiront victimisés. Je pense donc que ce nouveau rôle de “registrar” que l’on veut accorder à l’ESC peut porter atteinte à la crédibilité de celle-ci d’autant que récemment nous avons vu que les membres sont nommés par le Premier ministre. Ce n’est donc pas une commission qui est totalement neutre. Nous avons récemment vu la nomination, par le Premier ministre, d’une personne très proche de lui politiquement. Déjà, la crédibilité de l’ESC a été entamée. C’est malheureux parce que nous avons jusqu’ici eu une ESC et un commissaire électoral ayant beaucoup de crédibilité historique. Maintenant, ces propositions et les agissements de l’actuel gouvernement commencent à entamer la crédibilité de ces deux institutions et du processus électoral lui-même.

Comment assurer que l’ESC soit vraiment indépendante dans cette nouvelle tâche qui lui est confiée ?

Nous aurions préféré que ce rôle ne soit pas confié à l’ESC. Il faut une autre instance nommée par le judiciaire. Surtout que, selon nous, ce n’est pas le financement des partis politiques qu’il importe de contrôler mais les dépenses électorales. Il faudrait donc une instance qui a les moyens de faire des enquêtes indépendantes sur les dépenses électorales encourues par les divers partis politiques. Pour moi, ces deux fonctions, qui consistent à organiser les élections et contrôler les finances, auraient dû être séparées. C’est un peu contradictoire. Ce sera une sorte de “registrar”. Nous sommes contre un contrôle étatique sur les partis politiques. Ceux-ci ne sont pas comme des compagnies ou des syndicats. Quand on met sur pied une institution pour contrôler leur financement, on change la nature d’un parti politique et celle de notre système démocratique. Moi, je suis plus en faveur de trouver des moyens pour contrôler les dépenses.

Êtes-vous pour le financement des campagnes des politiciens par l’État ? Beaucoup font ressortir que c’est l’argent des contribuables qui est concerné…

Il y a là une grosse contradiction. La manière dont c’est proposé, c’est que les partis politiques et les alliances auront des dons venant d’individus et de compagnies, entre autres. Ils pourront dépenser jusqu’à Rs 80 M. Cet argent aura été reçu en don et aura été dépensé. Après les élections, on puisera dans les fonds publics pour rembourser ces dépenses alors que celles-ci ont déjà été faites. Ce remboursement sera injecté non pas dans le financement des élections mais dans les partis politiques… C’est un argent que le parti pourra utiliser tout au long de l’année pour son meeting du 1er mai, pour son “biryani”… D’autre part, lorsque vous limitez ce financement aux partis récoltant plus de 10% de votes, on crée une mainmise de grands partis et alliances au détriment de ceux qui sont valables mais qui n’ont pas atteint ce seuil de 10%. On se sert de l’argent public pour boucler le terrain politique et enrichir les grands partis qui ont déjà pas mal de moyens.
Dans le passé, nous avions déjà proposé que l’État finance directement les dépenses électorales plutôt que de verser une grosse somme de l’argent public dans les caisses des partis. Par exemple, un parti, qui imprime des affiches, prend un reçu de l’imprimerie et il se fait rembourser. L’État permettrait alors le postage gratuit.

Pour vous, quel serait le meilleur mode de financement des partis politiques ?

Comme je l’ai dit, nous ne sommes en faveur d’aucun contrôle sur le financement des partis politiques mais d’un contrôle plus strict sur les dépenses électorales.

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