TRANSPORT EN COMMUN : Vers une transformation du paysage et un meilleur contrôle

Rs 4,1 milliards sont approximativement les recettes générées par l’industrie du transport annuellement contre Rs 1,25 MD déboursées par l’État dans le transport gratuit pour les étudiants et les personnes âgées, auxquelles on ajoute les allocations de compensation pour le fuel et l’Additional Financial Support aux compagnies de bus. En 2014, ces trois items ont coûté Rs 1,9 MD à l’État. Commel’industrie du transport semble opérer dans l’opacité et sans véritable contrôle, le ministère des Infrastructures publiques et du Transport a l’intention de lancer un appel d’offres en vue du recruter des consultants qui mèneraient une étude approfondie sur le secteur. S’il n’est pas question de désengagement de l’État en ce qui concerne la gratuité du transport pour les étudiants et les personnes âgées, les autorités souhaitent apporter au secteur les améliorations nécessaires pour répondre aux exigences du public voyageur dans une île Maurice moderne.
Avec une moyenne de 60 000 passagers par jour, l’industrie du transport compte 220 millions de voyageurs par an et générerait des recettes d’environ Rs 4,1 milliards, tenant compte qu’un passager débourserait en moyenne Rs 20 par trajet. Cependant de ces 220 millions, seulement 25% sont des « paid passengers » et 75% concernent les voyageurs bénéficiant du transport gratuit ou dont les frais de trajets sont remboursés par les entreprises. Des recettes générées, l’État dépenserait environ Rs 1,25 MD pour le transport scolaire et celui des personnes âgées.
L’État accorderait aussi une compensation pour le fuel, qui évolue d’année en année, aux compagnies de bus. Cette allocation qui s’élevait à Rs 367 M a été réduite à Rs 211 M en 2014 mais devrait dépasser Rs 300 M en 2015. L’Additional Financial Support aux compagnies de bus, qui était à Rs 245 M en 2009 et Rs 410 M en 2014, passe cette année à Rs 187,32 M. Les compagnies de transport se partagent ainsi cette somme comme suit : Rs 82,7 M à la Compagnie Nationale de Transport (CNT), Rs 56, 2 M à l’United Bus Service (UBS), Rs 30,9 M au Triolet Bus Service (TBS), Rs 12, 7 M au Rose-Hill Transport (RT) et Rs 4,8 M au Mauritius Bus Transport (MBT).
En 2014, outre les frais de transport gratuit pour les personnes âgées et le transport scolaire de l’ordre d’environ Rs1, 25 milliards, l’État a aussi déboursé Rs 211 M en termes de fuel compensation et  Rs 245 M pour l’Additional Finacncial Support aux compagnies de bus, soit au total une somme de Rs1,9 MD à laquelle il faut ajouter Rs 700 M pour le remboursement du transport des fonctionnaires voyageant par le transport en commun. Ce qui ramènerait les dépenses de l’État à quelque Rs 2,7/Rs 3 MD annuellement, incluant l’aide de l’État à la CNT.
Or, parallèlement à l’évolution des dépenses dans ce secteur, l’industrie du transport est aujourd’hui « complètement dépassée et ne répondrait pas aux exigences d’une société sophistiquée comme Maurice. » C’est le constat effectué par le ministère des Infrastructures publiques et du Transport qui note que « l’argent est déboursé sans accountability, presque sans monitoring. » Lors d’une conférence de presse, la semaine dernière, le ministre de tutelle est revenu sur l’utilisation du transport en commun, s’attardant sur les étudiants principalement.
Déplorant la mort récente d’une élève du Hindu Girls College, Nando Bodha a souligné qu’après enquête, il ressort qu’à l’époque, ni le nombre d’autobus ni le nombre de passagers pour le transport des étudiants n’étaient connus. « Il n’y avait aucun return », dit-il, expliquant que par la suite, il est désormais possible d’avoir un « return  » auprès des compagnies concernées et ensuite auprès de la National Transport Authority (NTA) quant au nom du receveur et du conducteur de chaque autobus desservant les écoles, à l’heure du départ et d’arrivée des autobus, au nombre d’étudiants qui y voyagent. Cependant, il reste encore des améliorations à apporter pour optimiser ce service qui ne devrait pas voir le désengagement de l’État, a affirmé le ministre.
L’industrie compte ainsi 1943 autobus engagés dans le transport en commun et desservant 313 lignes autour de Maurice, dont 808 sont des opérateurs individuels desservant 113 lignes, 489 appartenant à la CNT pour 99 lignes, 311 à UBS pour 64 lignes, 204 au TBS pour 19 lignes, 100 au RT sur 12 lignes et 31 autobus au MBT pour 6 lignes. De 111,000 – dont 44,000 étudiants et 67,000 personnes âgées en 2005 à l’introduction du transport gratuit –, le nombre a augmenté pour atteindre 220,000 cette année, soit 153,000 étudiants et (chiffre identique) 67,000 personnes âgées.
Alors que le transport gratuit coûtait à l’État Rs 465 M en 2005, en 2013 ce chiffre atteignait la barre de Rs 1 MD et celle de Rs 1,2 MD en 2014. En 2015, la somme qui sera déboursée équivaudrait à environ Rs 1,3 MD, selon les autorités. « Cela ne peut pas continuer, d’autant que l’industrie – dont la flotte n’a connu qu’une hausse de 4% seulement ces dernières années – fonctionne dans l’opacité et ne donne pas satisfaction », dit Nando Bodha. Qui plus est, avec sa flotte de 489 autobus, la CNT roulerait à perte sur 75 des 99 lignes desservies à travers l’île.
« Full fledged study » à la CNT
D’où les importants changements que souhaitent apporter les autorités d’ici 6 mois. Dans cette optique, un exercice d’appel d’offres sera bientôt lancé pour mener une Full fledged study visant à établir toutes les statistiques relatives au secteur. Cette étude économétrique du secteur du transport en commun devrait concerner les prix pratiqués, le nombre de passagers, les heures de pointe, les types de personnes voyageant sur les différentes lignes, le transport gratuit dans son ensemble. Une étude en profondeur sera aussi parallèlement menée à la CNT dont la situation inspire de vives inquiétudes, notamment en raison de ses pertes depuis le début de l’année. Il s’agira d’analyser les finances, le fonctionnement et les problèmes de cette société.
Les autorités souhaitent aller plus loin également avec un refonte du service du transport en commun. Outre l’accent sur les « smart lines », notamment avec les autobus semi-low floor, il est question d’une transformation des gares routières appelées à devenir des point de ramassage uniquement autour d’aménagements urbains tels des malls avec foot court, magasins et espaces de loisirs. L’exemple sera donné d’ici six mois avec la gare Victoria qui entrera dans la phase de développement de la smart city de la capitale. Il est question de relier la gare Victoria au Caudan Waterfront à travers une esplanade qui surplombera l’autoroute. Ce plan devrait être prêt à la fin du mois. Dès lors, l’entrée sur Port-Louis ne sera plus au niveau de la Place d’Armes, mais plutôt au niveau de Decaën.
S’agissant des nouveaux autobus, l’État souhaite que la flotte de véhicules soit véritablement revue avec une hausse conséquente d’au moins 100 véhicules, contre 34 ces dernières années. Et l’accent devrait être mis, selon la loi en vigueur, sur les semi low-floor pour lesquels l’État accorde un subside de Rs 1 M sur le coût des Rs 3,5 M d’un autobus. « Si nous voulons améliorer le système, les compagnies doivent suivre l’effort », dit le ministre, faisant ressortir que les discussions pourraient être engagées par le ministre de l’Environnement en vue d’obtenir l’aide de l’UNDP pour subventionner des autobus électriques qui seront utilisés dans un proche avenir à Maurice.
Les autorités misent ainsi sur cette nouvelle étude qui sera menée très prochainement pour transformer le paysage du transport en commun et, suivant les conclusions du rapport, un atelier de travail sera organisé début 2016 avec tous les acteurs du secteur pour définir la roadmap de l’industrie.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -