Assemblée nationale — Pas mal pour un tour de chauffe

Le Speaker égal à lui-même, le nouveau leader de l’opposition à l’offensive malgré le calmant pris, les ministres toujours avares de réponses et Alan Ganoo en « goalkeeper bis »

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Pas mal pour un tour de chauffe. Comme toutes les rentrées, la séance de ce mardi 23 mars était comme ce premier round d’observation annonciateur de suites bien plus engagées et âpres. Le Speaker, fraîchement décoré, était égal à lui-même, le nouveau de leader de l’opposition, qui de son aveu n’est là que «pour le moment» était à l’offensive malgré le Xanax, calmant qu’il revendique avoir pris le matin pour ne pas s’emporter, les ministres, à commencer par le premier d’entre eux, toujours très avares de réponses pour ne pas s’auto-embarrasser et discréditer le gouvernement et, parmi ceux-là, celui qui s’est le plus fait remarquer n’est nul autre que le ministre des Transports et des Affaires étrangères Alan Ganoo.

Non, ce n’est pas un «zenfan lakaz» du Sun Trust qui veut se positionner comme le «goalkeeper» bis après le Speaker, mais c’est Alan Ganoo. Dès qu’il a vu que cela commençait à devenir un peu délicat pour Kailesh Jagutpal, le ministre s’est interposé pour voler au secours de ses collègues. Après que Xavier Duval a souligné que l’Attorney General a «misled the population» sur le formulaire prévaccinal en prétendant qu’il est similaire à celui qui est d’usage dans les hôpitaux, ce qui est un fait, Alan Ganoo a invoqué un point d’ordre pour soutenir que le fait que le leader de l’opposition a parlé de «misled the House» ne peut être admis, une contre vérité qui n’a pas été sanctionnée par Sooroojdev Phokeer.

Le second point évoqué par le ministre pour casser l’élan de Xavier Duval — une technique éprouvée — était bien plus conforme aux Standing Orders, à savoir que le ministre de la Santé ne pouvait répondre des déclarations de Maneesh Gobin quand bien même elles seraient inexactes. Le leader de l’opposition s’est évertué à mettre en évidence tant la gestion de la pandémie que les propos hasardeux du ministre lui-même sur les vaccins qui, au 4 février dernier, ne relevaient, selon lui, d’aucune «urgence» pour ensuite venir avec le slogan «sel solision vaksinasion».

Le langage très particulier de Kailesh Jagutpal, comme tous peuvent l’entendre chaque après-midi pour son point de presse sur la pandémie, s’est de nouveau signalé lorsqu’il a dit à Xavier Duval que «I know this is your first day, you have taken Xanax, you have a lot of’abruti’in you. I understand you don’t know how to formulate questions». Cocasse parce que la formule aurait pu aussi s’appliquer à lui.

Cette passe d’armes sur le Xanax ne devait pas s’arrêter là. Au fur et à mesure que les questions du leader de l’opposition devenaient plus pressantes, le ministre de la Santé, sur un ton parfois arrogant, sans doute pour tonifier sa voix qui ne porte pas, est devenu de plus en plus personnel. «Xanax, if you take it too much, it is not good for your health, and if you take it too little also, it is not good», a-t-il lancé à l’adresse de Xavier Duval qui n’a pas tardé à répliquer de manière cinglante en lui faisant remarquer que «only crazy people will go and see a doctor like this!»

Tout ce que l’on a retenu des réponses de Kailesh Jagutpal à la Private Notice Question, c’est que la cargaison de Covaxin, accueillie comme si c’était un don généreux, a coûté près de Rs 150 millions, 3 750 000 millions de dollars, pour les 250 000 doses, le vaccin indien coûtant 15 dollars l’unité. Le ministre a aussi indiqué que le formulaire de consentement, dont la signature est préalable à la vaccination, ne sera pas modifié, mais que le gouvernement a prévu que ce soit le Consolidated Fund qui soit mis à contribution au cas où il y aurait des réclamations suivant des accidents de vaccination.

La « quatraine » très spéciale du « prince » Sherry Singh

Une information cruciale est sortie d’une autre question relative à la Covid-19, le traitement très particulier dont a bénéficié le CEO de Mauritius Telecom, dont l’enfant fréquente l’école maternelle Melbees à Floréal, établissement où des cas ont été recensés. Ce qui a provoqué la fermeture de l’école et la mise en quatorzaine des enfants en bas âge et de leurs parents. C’est une question supplémentaire de l’auteur de l’originale, Eshan Juman qui va pousser Kailesh Jagutpal à admettre, à demi-mot, certes, que Sherry Singh n’avait fait que quatre jours en quarantaine.

La question du député travailliste était comme suit: «Pourquoi une famille spécifique a-t-elle pu se rendre au centre de quarantaine par ses propres moyens, alors que les autres ont été transportées par le ministère de la Santé et sous escorte policière, et pourquoi cette même famille, je vous parle de Monsieur le CEO du Mauritius Telecom, le VVIP, qui n’a passé que quatre jours en quarantaine contrairement aux autres, quatorze jours?» Le ministre de la Santé a commencé par bafouiller en prétextant ne pas avoir d’information sur cette famille et a ensuite poursuivi pour dire que «the duration of the quarantine period was determined based on the last date of contact with the positive cases and was decided based on the advice of the technical expert of my Ministry. This is in line with the interim guidance of the WHO on contact tracing in the context of COVID-19, issued on 01 February 2021, which recommends supported quarantine for a duration of 14 days from the last contact with a confirmed case to minimise risk of onward transmission». Totalement contradictoire, la posture de Kailesh Jagutpal qui consiste à justifier la «quatraine» très spéciale du «prince» Sherry Singh tout en rappelant les directives de l’OMS sur la quatorzaine.

Le statut de Showkutally Soodhun a aussi donné lieu à quelques échanges bien acerbes entre les travées de l’opposition et le ministre Alan Ganoo. Très catégorique dans sa réponse liminaire à Patrick Assirvaden, le ministre a bien dit que «ambassador M. Soodhun was previously accredited to the Kingdom of Saudi Arabia with residence in Riyadh from 07 January 2020 to 24 January 2021» et qu’il est aussi accrédité auprès des Emirats Arabes Unis, du Koweït et de Bahreïn.

Cette réponse a suscité de nombreuses questions de l’opposition sur l’absence de toute représentation diplomatique à Riyad. Plutôt confus, Alan Ganoo a été incapable de réfuter sur-le-champ les allégations de Patrick Assirvaden selon lesquelles l’ambassadeur Soodhun a été déclaré «persona non grata» en Arabie Saoudite. Pressé de questions de la part des députés Reza Uteem et Aadil Ameer Meea, le ministre a maintenu ses réponses initiales quant à l’accréditation de l’ambassadeur auprès des EAU, du Koweït et Bahreïn sans jamais mentionner l’Arabie Saoudite.

Quant à la tranche des questions pour le Premier ministre, c’est l’affaire de la fréquence des arrivées des jets privés, évoquée par le député du MMM Deven Nagalingum qui a dominé les échanges. Pravind Jugnauth a certes dit qu’il y a eu six jets privés qui ont atterri depuis septembre 2020, mais n’a fourni aucun détail sur la visite alléguée de Loganaden (Alan) Govinden, impliqué dans l’affaire Angus Road en marge du tournage de «Prisoners of Paradise».

Dans la catégorie des non-réponses ou de réponses fuyantes, Soodesh Callychurn et Kailesh Jagutpal qui n’ont fourni aucun détail sur les achats d’urgence de la State Trading Corporation, tel que réclamé par Rajesh Bhagwan ou sur les irrégularités relevées sur lesquelles Patrick Assirvaden a réclamé des informations. Les deux ministres ont invoqué l’ICAC pour dire qu’ils ne pouvaient en dire plus.

Un hommage unanime a été rendu en début de séance à l’ancien député et ministre Mahen Utchanah décédé le 1er janvier dernier.

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