Changement d’approche : Le “Made in Moris” en mode innovation!

Natacha Emilien, MD de Red Dot: « Il faut que les gens puissent dire “Woow” si nous voulons être compétitifs à l’échelle internationale »

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« Pas le temps », « trop occupés »… La Singapourienne et « Serial Entrepreneur » Min Lee, Chief Executuve Officer de Red Dot, a souvent eu ces réponses lors de ses échanges avec les entrepreneurs mauriciens lorsqu’elle leur parle d’innovation. « They are too busy to innovate », dit-elle. Et c’est dommage car, en n’innovant pas, « les entreprises ont tout à perdre, car c’est l’innovation qui assurera leur pérennité ». Du coup, « ne pas innover, c’est rester sur ses acquis, et c’est la mort assurée » dans le monde dans lequel nous évoluons actuellement.

Shirin Gunny, CEO de “Made in Moris”, reconnaît elle aussi que beaucoup d’entreprises « n’ont pas le temps » d’innover. « Il existe plusieurs formats d’entreprises à Maurice. Dans beaucoup de cas, c’est un “One-man-show”, c’est-à-dire un CEO qui est au four et au moulin et qui n’écoute pas assez ses collaborateurs », explique-t-elle. Pour Shirin Gunny, beaucoup d’entreprises veulent aussi innover, « mais ne savent pas par où commencer ». Cependant, l’innovation peut germer à partir d’une idée qui fuse, à partir d’interaction avec les clients, « ou simplement à travers du bon leadership et, surtout, la capacité de voir les contraintes comme des opportunités », souligne Min Lee.

Parler aux clients, c’est la clé de l’innovation et on l’a un peu oublié à Maurice ces dernières années dans notre style de management. Et c’est là où le bât blesse. « Lorsqu’on lance un produit, a-t-on parlé à la cible de clients pour laquelle nous conceptualisons ce nouveau produit ?» se demande Natacha Emilien, managing director de Red Dot. « Imaginez que
vous ayez développé un nouveau produit avec le client en écoutant ses critiques, etc. Cela changerait tout. Parlez à vos clients, allez les voir, c’est là que commence l’innovation. Il faut d’abord connaître les attentes de vos clients. Allez sur le terrain!» Mais Natacha Emilien ne jette pas la pierre aux entreprises, cherchant plutôt à les aider : « Le problème, c’est que ces dernières années, elles sont concentrées sur l’opérationnel. Il faut parfois prendre le temps de s’arrêter, de réfléchir, pour faire naître l’innovation. On peut créer des cellules interfonctionnelles dans différents départements où les gens pourront s’exprimer sur les opportunités de croissance de l’entreprise. Car c’est l’innovation qui va assurer le futur de l’entreprise. »

Pour la managing director de Red Dot, l’heure est venue d’innover « à fond ». Elle explique : « Nous devons créer dans ce pays ! Il faut que les gens puissent dire “Woow” si nous voulons être compétitifs à l’échelle internationale. » Les différents intervenants de la conférence sur l’innovation de “Made in Moris”, mercredi dernier à Beau-Plan, on mit l’accent sur la nécessité d’abandonner les modes de gestion traditionnels dans les entreprises pour laisser émerger les nouvelles idées du bas de l’échelle. Ce qui est observé dans la majorité des entreprises, c’est que les décisions sont prises uniquement par un petit groupe du Top Management, qui essaie d’innover, mais l’innovation doit venir de tous les membres du personnel, surtout de ceux au bas de l’échelle, qui sont le plus souvent confrontés à la clientèle. « Et ce alors que tout le monde a la capacité d’innover, de réfléchir et de penser », ont fait comprendre les différents intervenants.
Comment innover ?

Avoir une idée innovante, c’est facile, « mais ce n’est pas suffisant pour créer un produit ou un service innovant ». L’idée est de partir du client lui-même et de se demander quels sont ses besoins ou quelles sont ses contraintes. D’autant qu’aujourd’hui, « plus la société se digitalise, plus le client est roi, parce qu’il a maintenant un plus grand choix de produits et de services », argue Natacha Emilien. Il faut donc être très à l’écoute des plaintes générées par la clientèle, fait comprendre Natacha Emilien. « Dès qu’on se met à l’écoute des besoins et des problèmes rencontrés par la clientèle, c’est là que germent les plus grandes opportunités d’affaires », dit-elle. « C’est à partir de là qu’on développe une idée ou un prototype, qu’on viendra ensuite tester avec des clients réels, qu’il s’agisse de nouveaux produits, nouveaux services ou nouveaux business. Ensuite, on observe les réactions du client par rapport à cette nouvelle idée, sans l’influencer. Ces informations sont cruciales pour ensuite affiner l’idée sur ce que le client aime ou n’aime pas », poursuit notre interlocutrice. Pour innover, il faut donc que le client revienne au centre de l’entreprise et en haut de ses priorités.

Bruno Dubarry : « Développer une nouvelle expertise locale »
Le message d’innovation de MIM et de l’AMM rejoint indéniablement celui du rapport “Lokal is beautiful” présenté par la MCB récemment. Bruno Dubarry, CEO de l’AMM, explique que le rapport de la MCB est venu donner des chiffres sur des réalités évoquées et défendues par l’AMM depuis ces dernières années. « Ce rapport est très intéressant car il apporte de l’eau à notre moulin. Si on veut une autre étape de développement économique, il faut une autre génération d’entrepreneurs locaux, répondant à de nouveaux besoins locaux des consommateurs. D’ailleurs, en développant cette nouvelle expertise locale, ils pourront peut-être ensuite l’exporter dans la région. Si l’on ne tient pas compte de l’écosystème existant en se focalisant juste sur de nouvelles activités, on se coupe d’une richesse qui reste inexploitée. »

Selon le CEO de l’AMM, l’innovation peut grandement aider à dynamiser la production locale. « Si la production locale disparaît, ce sera très difficile de pouvoir la recréer. » Et d’ajouter que l’industrie locale non seulement « a des besoins nouveaux » en termes d’innovations, « mais peut aussi répondre a de nouveaux besoins ».
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Elles innovent…
Plusieurs entreprises mauriciennes innovent déjà et il serait fastidieux de toutes les citer. Mais on peut parler par exemple de BEM Recycling, une entreprise qui a décidé de se lancer dans le recyclage de produits électroniques, comme de smartphones, de machines à laver, de micro-ondes ou de réfrigérateurs. « Nous sommes une entreprise familiale et, du coup, on doit s’améliorer continuellement pour survivre. Donc, on recherche constamment des moyens d’innover », explique Thierry Malabar, chargé de projet. « Notre philosophie est le “zéro déchet”. C’est vrai que ce sont déjà des déchets, mais après avoir retravaillé ces produits, nous les convertissons en nouvelles matières premières. Par exemple, dans le cas d’un téléviseur, après avoir effectué ce qu’on appelle la “dépollution”, on peut en récupérer le verre. Une fois broyé, cela devient du sable, qui peut ensuite être utilisé comme agrégat dans du béton pour faire des colonnes et pas mal d’autres choses. Tout comme le plastique, que nous récupérons de ces appareils. En fait, BEM Recylcing se positionne comme un dépollueur et revendeur de matières premières. »

De son côté, Polytol Paints innove également, mais dans un tout autre domaine et en utilisant les nouvelles technologies. L’entreprise a ainsi développé une application mobile unique en son genre, connue comme “Grab a painter”. Tariq Sohawon, managing director, explique : « Vu que nous sommes dans le business de la peinture pour bâtiment, automobile, peinture pour métaux, bois, etc., on a réalisé qu’il y avait un problème chez nos consommateurs pour trouver des peintres sérieux et professionnels pour leurs travaux. C’est souvent un parcours du combattant pour les particuliers et les entreprises de trouver des gens sérieux et capables de faire un travail de qualité. Donc, nous avons regroupé un certain nombre de peintres avec lesquels nous travaillions déjà et certains qui ne travaillaient pas avec nous. Nous les avons invités à rejoindre notre réseau, bien entendu avec des critères de sélection très stricts, incluant des “testimonials”, etc. À travers notre application, ces peintres ont plus de visibilité et sont plus accessibles. Plus d’une centaine de peintres sont actuellement enregistrés sur notre réseau. C’est un partenariat gagnant-gagnant pour nous, pour les peintres et pour les clients. »

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