De Chagos à MedPoint : les incontournables embûches !

  • Le noeud gordien de la réforme électorale, dont l’élimination du Best Loser System, en prologue à l’année de la campagne électorale de 2019
  • Commission drogue : l’ADSU de nouveau sous pression au sujet des 16 kg d’héroïne manquants des 135 kg de Navind Kistnah avec le retour de l’ex-juge Lam Shang Leen
  • L’ex-Deputy Speaker, Sanjeev Teeluckdharry, qui tente à tout prix de discréditer 
le rapport de la Commission d’enquête sur la drogue, convoqué par le Bar Council
  • Offshore : le Damning Mutual Evaluation Report d’ESSAMLG jette un pavé dans 
la mare, Singapour affirmant son avance sur Maurice en matière de Compliance
  • Le jackpot de Rs 15 M de Compulsory Acquisition du terrain d’Anwar Husnoo
 pour le Metro Express s’avère être un embarras politique de premier ordre 
pour Lakwizinn du PMO

Depuis hier, en fin de matinée, le retour au pays de la mission officielle ayant participé aux auditions publiques devant la Cour internationale de justice à La-Haye au sujet de l’advisory opinion sur l’excision illégale des Chagos marque une nouvelle étape de l’agenda politique du gouvernement. Plus d’un observateur politique averti ne manqueront pas de concéder que le “feeling of historical accomplishment” sur le dossier des Chagos en cette 50e année de l’indépendance de Maurice pourrait subir les effets d’usure, au point de s’estomper rapidement, pour faire de la place à d’autres préoccupations politiques des plus majeures et urgentes.

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Et le parcours de la Cour de La Haye avec le dossier des Chagos jusqu’au portail du Judicial Committee of the Privy Council avec l’appel interjeté par le Directeur des poursuites publiques (DPP), Me Satyajit Boolell, Senior Counsel, dont l’affaire MedPoint sera entendue le 15 janvier prochain, est parsemé d’incontournables embûches politiques, requérant l’attention du Premier ministre et leader du MSM, Pravind Jugnauth. Certes, le jugement du Privy Council dans le scandale “Zot Mem Aste! Zot Meme Vande!”, qui court sur sa huitième année, vaudra son pesant d’or au tout début de 2019, année indéniablement électorale, peu importe le timing du rappel de l’électorat aux urnes.

Mais, d’ici là, le gouvernement Piti/Papa devra honorer l’engagement de la réforme électorale avec l’élimination du Best Loser System et l’introduction d’une dose de proportionnelle ou encore assurer la mise en oeuvre des findings de la commission d’enquête sur la drogue, présidée par l’ancien juge de la Cour suprême, Paul Lam Shang Leen, sur un fond de décor de shouting brigade, menée jusqu’ici par l’ancien Deputy Speaker de l’Assemblée nationale, Sanjeev Teeluckdharry. Mais il y a encore le candidat battu du MSM au No 3 et Legal Adviser du leader du MSM, Me Raouf Gulbul, en embuscade, qui n’a pas encore abattu ses cartes politiques et légales contre cette même commission. Il n’y a pas que ces dossiers comme urgence. Le dernier en date, notamment le maintien par l’Eastern and Southern Africa Anti-Money Laundering Group (ESSAMLG) du carton rouge de non-compliance des dispositions de lutte contre Maurice contre le money laundering sous la Financial Action Task Force (TAFT). Toujours dans cette même conjoncture préélectorale, Lakwizinn du Prime Minister’s Office se voit contrainte de gérer un dernier embarras politique high profile sous forme de jackpot de Rs 15 millions octroyé au ministre Anwar Husnoo pour l’acquisition obligatoire d’un terrain pour les besoins du Metro Express. En tout cas, d’ici le ruling du Privy Council sur les Rs 144 millions payées pour l’acquisition de la clinique MedPoint, les Senior Advisers à l’Hôtel du gouvernement, rémunérés et non rémunérés, auront du pain sur la planche pour éviter que le “bateau politique de l’Hôtel du gouvernement ne tangue davantage”.
A tout seigneur, tout honneur. Les débats sur le projet de réforme électorale, le Conseil des ministres ayant déjà pris note des recommandations du comité ministériel, présidé par le ministre mentor, Sir Anerood Jugnauth, et le ministre Nando Bodha, assumant le rôle d’homme à tout faire, en prélude aux tractations politiques, sont bel et bien enclenchés. Le Premier ministre s’étant libéré de ses obligations budgétaires et autres, l’échiquier politique est dans l’attente de la confirmation des détails du projet de réforme électorale selon lequel le Parlement devant être constitué de 63 membres élus avec le First Past The Post, les 12 parlementaires sous la représentation proportionnelle avec un seuil de qualification de 10% et sept autres choisis par les leaders politiques après la proclamation des résultats et la répartition numérique décidée par l’Electoral Supervisory Commission (ESC).

Certes, la configuration de l’Assemblée nationale, qui sera substantiellement transformée au cas où le projet de réforme est appuyé par une majorité constitutionnelle qualifiée, constituerait une avancée considérable en matière de participation féminine aux affaires de la Cité. Techniquement, si l’électorat vote bloc, le nombre de parlementaires femmes devrait être une vingtaine au minimum, car chaque parti ou alliance politiques devra accorder l’investiture à une moyenne nationale de 20. A cela, il faudra anticiper que des candidates soient également repêchées pour siéger à l’Assemblée nationale sous les deux autres Electoral Limbs, soit la représentation proportionnelle et les additional seats en guise de substitut au Best Loser System.

Toutefois, la question cruciale est de savoir si les amendements à la Representation of the People Act et aux clauses de la Constitution, régissant la tenue des élections législatives à Maurice, rallieront la majorité des trois quarts à l’Assemblée pour être adoptés dans le cadre de la réforme du système électorale. Des doutes, même de sérieux doutes, subsistent. L’arithmétique parlementaire impose au gouvernement le besoin de dépendre des votes de l’opposition pour atteindre cet objectif. “Le MSM et le Muvman liberater savent qu’ils pourront difficilement compter sur le soutien du PMSD, voire du Parti travailliste, pour la réussite de cette réforme électorale. Le PMSD a déjà signé une fin de non-recevoir en revenant à la thèse d’un recensement à caractère ethnique. L’unique carte demeure les votes du MMM pour faire le compte constitutionnel. Sir Anerood s’est donné initialement deux ultimes objectifs politiques : compléter la décolonisation de Maurice avec le dossier des Chagos à la Cour de La Haye et doter le pays d’un nouveau système électoral”, fait-on comprendre dans des milieux autorisés à l’Hôtel du gouvernement.

ADSU : frilosité du Premier minsitre
A ce stade, ces mêmes sources sont très avares de commentaires au sujet de la tournure que pourront prendre les prochaines consultations sur la projet de réforme électorale. Chaque sortie et chaque commentaire du leader du MMM, Paul Bérenger, sur la réforme sont décodés de manière systématique par Lakwizinn du PMO pour tout ajustement de la stratégie politique à venir. Jusqu’ici, le gouvernement n’a pas encore communiqué officiellement sur la réforme électorale, même si les débats sur les amendements à la loi sont annoncés avant les prochaines vacances de décembre prochain.

D’ici le mardi 23 octobre prochain, date de la reprise des travaux parlementaires, la pression autour de la réforme électorale ira crescendo avec très probablement l’Hôtel du gouvernement ne commettant pas d’impair à l’encontre de la Cour suprême. La dernière fois que le constitutional case de Rezistans & Alternativ avait été appelé devant le chef juge, Keshoe Parsad Matadeen, le State Law Office avait réclamé un délai, le temps que le Premier ministre évacue les tensions autour des préparatifs budgétaires pour se pencher sur le dossier de la réforme. Au lieu de renvoyer le dossier au Master and Registrar au terme des procédures établies, le chef juge a annoncé qu’il fixera la date de ce cas par voie de circulaires aux parties concernées. Très probablement, l’Hôtel du gouvernement réservera la primeur des détails de la Roadmap to the Electoral Reform à la Cour suprême et cela dans les meilleurs délais.

Indépendamment des contacts en privé ou en public sur le projet de réforme du système électoral, le Premier ministre pourra difficilement reléguer au second plan la mise en chantier des findings de la commission d’enquête sur la drogue, présidée par l’ancien juge de la Cour suprême, Paul Lam Shang Leen. Six semaines après la publication de ce rapport étalant les dessous de complicité mise à profit par les trafiquants de drogue avec leurs enseignes dans l’enceinte même de la prison centrale, très peu d’actions ont été initiées. Du côté de la Task Force de coordination sous la tutelle du directeur général de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC), l’on en est encore au stade de constituer des special teams, au sein de l’ICAC ou des Police Headquarters des Casernes centrales pour diligenter des enquêtes sur ceux dont les noms sont cités dans le rapport

Rotin Bazar Lam Shang Leen.
Après le retour du directeur général de l’ICAC, participant aux séances de travail de la Financial Action Task Force aux Seychelles, des développements sont à prévoir sur la base de la teneur du rapport de la commission d’enquête. Si, dans le cas de Me Rex Stephen, et ses Rs 1,5 M d’advanced legal fees de Veeren Peroumal, l’ICAC évolue en territoire conquis, pour le volet consacré à l’ancien chairman de la Gambling Regulatory Authority, Raouf Gulbul, la partie s’annonce sous un angle différent avec des audit trails sur la base de Judge’s Orders à être complétés avant toute séance d’interrogatoire under warning.
“Un Big Bang on radio and media”

Pour ce qui est de la recommandation phare du rapport Lam Shang Leen, préconisant le démantèlement de l’Anti-Drug and Smuggling Unit (ADSU) et son remplacement par la National Drugs Investigation Commission (NDIC), le Premier ministre semble faire preuve de frilosité en mettant en avant ad nauseam, “le travail de l’ADSU”. Jusqu’ici, l’Hôtel du gouvernement s’est gardé de se prononcer de manière catégorique au sujet de l’avènement de la NDIC en remplacement de l’ADSU. Il va sans dire que lors d’une prochaine séance du Prime Minister’s Question Time, une Parliamentary Question se faufilera pour acculer Pravind Jugnauth sur le démantèlement de l’ADSU, qui tente, ces dernières semaines, de faire feu de tout bois en vue de redorer le blason de cette unité de la police.

Mais cette même ADSU devra se retrouver encore sous haute tension avec le retour au pays depuis jeudi de l’ancien juge Lam Shang Leen. Ainsi, il devra compléter le nouveau mandat confié par le Premier ministre, à savoir enquêter sur les circonstances dans lesquelles est intervenue la discrepancy de 16 kilos d’héroïne dans les 135 kilos de Navind Kistnah et saisis le 9 mars de l’année dernière. L’enquête devrait confirmer ou infirmer la thèse invraisemblable selon laquelle les 16 kilos manquants dans le rapport de la Forensic Science Laboratory (FSL) représentent des wrappings.

Ce qui est considéré comme étant très grave dans the day after de la publication du rapport de la commission d’enquête est la campagne orchestrée par l’ancien Deputy Speaker et jusqu’à preuve du contraire député de la majorité gouvernementale, Sanjeev Teeluckdharry, contre l’ancien juge. Tôt ou tard, le Premier ministre devra obligatoirement se prononcer sur le comportement de ce backbencher de la majorité, qui s’est même permis de jeter à la poubelle le rapport avalisé par le Conseil des ministres. A sein du Barreau, des indications sont que Me Teeluckdharry sera convoqué par le Bar Council en début de semaine pour répondre à des questions d’indiscipline et probablement pour l’infraction de “bringing the legal profession into disrepute”.

Sa dernière démarche: une demande d’injonction contre le versement des honoraires du président de la commission Paul Lam Shang Leen, le juge siégeant en référé a fixé l’affaire au 21 courant. Commentant sur sa page Facebook l’injonction, de Me Teeluckdharry, Dev Hurnam trouve que “ce député de la majorité veut seulement un Big Bang on radio and media”. “Pour pouvoir se prévaloir d’une injonction, tout demandeur doit avoir un Legal Right. Mais tout semble indiquer ki li pa ain. En plus “such right needs immediate protection, balance of convenience… Bougre la fail lor premye la mem”… But above all bizin ale La Cour with clean hands”, peut-on lire sur la page Facebook de Dev Hurnam, qui se penche sur les raisons pour lesquelles Sanjeev Teeluckdharry n’a pas eu recours à une Judicial Review.

Même si, jusqu’ici, l’ancien juge de la Cour suprême n’a pas bronché face à ces attaques contre lui et le rapport de la commission d’enquête sur la drogue, son entourage laisse entendre qu’il ne se laissera pas distraire et compte poursuivre le mandat assigné formellement. Mais il n’écarte pas “la possibilité de répondre à ses détracteurs devant les instances judiciaires appropriées et dans la forme convenue”. Et cela, sans dévoiler la moindre indication pour le moment.

Les soucis de Lakwizinn du PMO ne se limitent pas à ces équations sur le plan national. Les embarras politiques continuent à s’amonceler, même si le mot d’ordre est que les membres de la majorité devront éviter de se retrouver en posture politique compromettante. Le dernier incident en date, notamment le Jackpot de Rs 15 millions au ministre Anwar Husnoo pour son terrain, ayant fait l’objet de compulsory acquisition pour le tracé du Metro Express, s’annonce quelque peu difficile à gérer pour les pundits de l’Hôtel du gouvernement, alors que se profile à l’horizon politique l’année électorale 2019.

More than expected”

La situation est telle sur le terrain que le Deputy Prime Minister, Ivan Collendavelloo, qui assurait la suppléance au poste de Premir ministre, a cru nécessaire de jouer aux sapeurs-pompiers pour éviter toute propagation contagieuse de l’épisode jackpot. Ainsi, vendredi, lors d’un congrès du MSM et du Muvman liberater, à Rivière-des-Anguilles, ce dirigeant du gouvernement a dû monter en première ligne pour défendre le ministre Husnoo. Les répercussions de ce détail révélé suite à une PQ du député du MMM, Adeel Amer Meea, sont loin d’être sous contrôle, d’autant plus que le principal concerné avait trouvé que pour les Rs 15 millions étaient “more than expected”. Et toute ressemblance avec l’évaluation des Rs 144 millions de la clinique MedPoint, de sinistre mémoire, ne serait que fortuite.
Un autre minstre en double difficulté n’est nul autre que Sudhir Sessungkur. Après la décision du Conseil des ministres, concernant l’Eastern and Southern Africa Anti-Money Laundering Group (ESSAMLG) de maintenir le Mutual Evaluation Report et le Tag Non-Compliant pour Maurice, le ministre des Services financiers a essuyé un échec cuisant. Depuis juin dernier, il voulait donner l’impression de pourvoir faire rectifier le tir à la réunion ministérielle des Seychelles. Mais, en vain. (voir texte en page 3). Cette bévue fait que le Global Business Sector de Maurice est mal noté sur le plan international et Singapour ayant un net avantage sur Maurice dans un contexte d’importantes mutations régissant les investissements en Inde travers des centres offshore.
Avant de partir pour les Seychelles, lundi dernier, Sudhir Sesungkur a dû faire un crochet au QG du Central CID aux Casernes centrales pour être entendu under warning dans l’enquête criminelle pour agression d’un photographe lors d’un mariage à Bel-Air. Il a rejeté en bloc les accusations contre lui et, sans surprise, comme tout VVIP passant par l’Interrogation Room du Central CID, le commissaire de police, Karl Mario Nobin, a préféré renvoyer la balle dans le camp du DPP. Même s’il n’a pas été inculpé provisoirement, le ministre Sesungkur est dans ses petits souliers, vu qu’il pourrait subir le même sort que Showkutally Soodhun, celui-ci faisant face à un procès au criminel en dépit du fait que la police aurait fait preuve de générosité en recommandant un no case to answer.

En conclusion, le plus gros dossier est hors de tout contrôle du Prime Minister’s Office. A partir de demain, il restera 18 semaines avant que l’appel interjeté par ce même DPP dans le scandale MedPoint ne soit entendu par les Lawlords du Privy Council. La décision de cette instance judiciaire suprême de la République de Maurice, dans un sens comme dans l’autre, constituera un tournant politique décisif en cette période préélectorale…

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