ÉCHOUEMENT | La pire catastrophe pétrolière de Maurice : Comment les satellites ont suivi le voyage fatidique du MV Wakashio

Un article de Forbes, signé Nishan Degnarain, explique que le vraquier a foncé directement sur Maurice « sans jamais ralentir sa vitesse de croisière »

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Le magazine décrit également les détails de la réponse des autorités mauriciennes concernant ce naufrage

Les premiers éléments d’informations venant de sources indépendantes concernant l’échouement et le sauvetage du MV Wakashio, selon des observations satellites, sont apparus sur le site du magazine américain Forbes la nuit dernière (https://www.forbes.com/sites/nishandegnarain/2020/08/09/how-satellites-traced-the-fateful-journey-of-the-ship-that-led-to–mauritius-worst-oil-spill-disaster/#7f6e13e15b42). Le Mauricien en publie des extraits pour suivre les circonstances dans lesquelles le cargo japonais MV Wakashio s’est échoué sur les récifs coralliens de Maurice le dimanche 25 juillet, où il est resté bloqué avant de commencer à se désagréger 13 jours plus tard, soit le 6 août, libérant 1 000 de ses 4 000 tonnes de carburant dans les eaux cristallines de l’océan Indien, alors qu’une grande entaille a commencé à apparaître sur le côté du navire.

L’emplacement de l’échouement est proche de deux sites Ramsar de l’Unesco, protégés au niveau international pour les zones humides, y compris un petit atoll de corail qui avait été mis à l’écart de l’interférence humaine pour le rétablissement des espèces endémiques de la riche et rare biodiversité de Maurice. C’est également le lieu d’une célèbre bataille navale sur l’Arc de Triomphe français, contenant de nombreuses épaves historiques napoléoniennes qui n’ont pas été perturbées pendant deux siècles.

Il s’agit du pire déversement de pétrole de l’histoire de l’île. Cela pourrait entraîner l’extinction de nombreuses espèces végétales, mais aussi de rares oiseaux et de la faune que l’on ne trouve que sur cet atoll particulier….

L’utilité des satellites

Une partie de la réponse à ces questions pourrait venir de l’espace. Ces dix dernières années, on a en effet assisté à une révolution technologique du côté des nano-satellites. Ainsi, en 2020, on dénombrait 2 666 satellites, dont plus de 70% sont toujours exploités. Une bonne partie de ces satellites peuvent être utilisés à des fins d’analyses scientifiques et pour « remonter le temps » et suivre les activités océaniques.

Une société leader dans ce domaine est la société d’analyse de données satellitaires Windward, basée en Israël, et qui a pu retracer le mouvement du MV Wakashio au cours de la semaine dernière de ses voyages, y compris les deux derniers jours critiques avant l’impact. Cela montre comment les satellites d’observation peuvent apporter une transparence et une responsabilité radicales aux activités sur l’océan.

Le MV Wakashio dans nos eaux deux jours avant le drame

Les transpondeurs des navires suivis depuis l’espace montrent que le MV Wakashio a traversé l’océan Indien et est entré dans les eaux nationales (zone économique exclusive) de Maurice deux jours avant son échouage, soit le 23 juillet, juste avant 23h. Ce qui soulève des questions sur les raisons pour lesquelles le suivi GPS du navire n’indiquait pas qu’il se dirigeait vers la terre, ou pourquoi les autorités locales ne sont pas intervenues plus promptement, compte tenu de la trajectoire claire du navire vers l’île. Sans compter qu’il y aurait dû y avoir des leçons d’un précédent échouement, le dernier cas datant de 2016, et où une intervention précoce avait pu éviter un accident.

Pas de changement de vitesse, ni de cap

Le suivi par satellite révèle que le MV Wakashio est entré dans les eaux mauriciennes le 23 juillet sans changer de vitesse, ni de cap, pendant deux jours, jusqu’à ce qu’il heurte les récifs coralliens. Les données satellitaires peuvent aussi établir la vitesse du navire. Le MV Wakashio se déplaçait ainsi à une vitesse de 11 nœuds, soit la norme pour les vraquiers en mer. Mais, plus important encore, le navire n’a montré aucun ralentissement avant l’impact.

Les données satellitaires révèlent également à quel point les voies de navigation mondiales sont devenues encombrées, les rendant impossibles à gérer uniquement à l’œil humain. Le trafic maritime a en effet quadruplé au cours des 20 dernières années.

Le vraquier était plus au nord que la route normale

Au cours du mois de juillet, plus de 2 000 navires sont passés à proximité des côtes mauriciennes, soit dans l’une des voies de navigation les plus concentrées au monde, reliant l’Asie, l’Afrique, l’Europe et l’Amérique latine (la route commerciale historique avant l’ouverture du canal de Suez). La comparaison de ce trafic sur les voies de navigation traditionnelles avec la trajectoire du MV Wakashio aurait révélé que le MV Wakashio était sur une trajectoire de collision avec Maurice depuis plusieurs jours et se trouvait beaucoup plus au nord que les autres navires utilisant cette voie de navigation.

Les premiers vrais secours six jours après l’échouage

Les données satellitaires peuvent également être utiles pour montrer la vitesse de réponse du gouvernement. Alors qu’au départ, il y avait des patrouilleurs locaux le long de la côte, de plus gros navires de garde-côtes ne sont apparus que quatre jours après l’échouage. Les données satellitaires révèlent que le deuxième intervenant, le remorqueur Stanford Hawk, a quitté la capitale, Port-Louis, le 31 juillet, pour arriver au MV Wakashio, échoué six jours auparavant.

Ces données provenant des transpondeurs, appelés AIS, pour éviter les collisions, montrent aussi le départ d’un deuxième navire de sauvetage, le Boka Expedition‘, au départ des Émirats Arabes Unis le 26 juillet, soit le lendemain de l’échouage, mais qui n’est arrivé à Maurice que le 6 août. Forbes souligne aussi que la connaissance du départ et de l’arrivée d’éventuels navires de sauvetage aurait dû informer plus efficacement les autorités pour une meilleure intervention locale.

Ces éléments d’informations seront sans doute cruciaux pour l’enquête qui sera initiée pour établir les causes de l’échouage du navire et la nature des secours apportés.

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