Election générales — Post-Mortem : Avec 36,97% de votes, L’Alliance Morisien s’octroie 63,3% des sièges

L’Alliance Nationale, qui réalise un score global de 33,5% de votes exprimés, doit se contenter de 23% de Parliamentary Seats et les 22% du MMM ne rapportent que 13% de sièges Piton/Rivière-du-Rempart (N°7) est la seule circonscription où l’Alliance Morisien de Pravind Jugnauth crève la barre des 50% Le plus gros score réalisé par le candidat de l’Alliance Nationale, Osman Mahomed, avec 60,1% au N° 2, et le PM sortant et leader de l’Alliance Morisien en deuxième position avec 56,82% au N°8 Sur les 810 candidats en lice pour le scrutin du 7 novembre, 625 ont perdu leur caution de Rs 1500

Au-delà du fond de controverses sur lequel s’est déroulée la dernière campagne électorale, à coup de “gate” et de “contre-gate”, et surtout l’obligation de la déclaration d’appartenance communale, débouchant sur le rejet des candidatures de Rezistans Alternativ, les effets de perversion du First Past The Post (FPTP) sur le plan de la représentation démocratique devront relancer l’urgence du débat sur la réforme électorale. Mais faute d’une majorité qualifiée de trois quarts sous la Constitution, la nouvelle majorité issue des urnes et menée par le Premier ministre sortant, Pravind Jugnauth, ne devra pas en faire sa priorité. La principale raison demeure que l’Alliance Morisien se trouve être le principal bénéficiaire du système. Avec 36,97% des votes exprimés lors du scrutin de jeudi, qui avait enregistré une participation de 76,84%, l’Alliance Morisien, regroupant le MSM, ce qui reste du Muvman Liberater avec le chef sans armée, et Alan Ganoo et Steve Obeegadoo, s’approprie 63,3% des 60 sièges à pourvoir, sans compter les deux sièges remportés par l’Organisation du Peuple Rodriguais (OPR), allié potentiel du gouvernement central. Dans un autre ordre d’idées, mais toujours dans le cadre d’un post-mortem de ces élections générales, moins d’une dizaine d’élus ont passé la barre des 50% des voix, alors que le Deputy Prime Minister sortant et leader du Muvman Liberater, Ivan Collendavelloo, n’a réalisé qu’un score de 31,8% des votes pour devenir le représentant de Stanley/Rose-Hill (N°19) dans la prochaine législature. Un petit détail: sur les 810 candidats en lice pour les élections générales de jeudi, 625 ont perdu leur caution faute de ne pouvoir atteindre la barre des 10%, soit pour un montant total de Rs 937 000.

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En gros, l’analyse des chiffres rendus publics par la Commission électorate, après le dépouillement des 723 660 bulletins déposés dans les urnes, confirme que l’Alliance Morisien n’a récolté que 36,97% des voix, contre 33,50% à l’Alliance Nationale de Navin Ramgoolam et 21,90% au MMM. En attendant la désignation par l’Electoral Supervisory Commission (ESC) d’un maximum de huit best losers (voir texte plus loin), la répartition des 60 sièges à l’Assemblée nationale remet en évidence “l’iniquité” du système électoral souvent décrié et face auquel l’on fait preuve d’incapacité pour apporter le correctif constitutionnel nécessaire.
Ainsi, avec le soutien d’un votant sur trois, chiffre qui pourrait être encore inférieur si l’on tient compte de l’abstention d’un électeur sur quatre, la nouvelle majorité contrôle 63,3% des sièges, soit 38, au sein de l’hémicycle. L’équation devient encore plus dramatique, car avec quatre points de moins, soit 33,5% des votes, l’Alliance Nationale du PMSD et du PTr ne doit se contenter que de 14 sièges, représentant 23% du bank vote parlementaire. Le MMM avec 21,90% du suffrage exprimé ne pourra compter que sur huit députés, ayant un poids de 13%.
Autant pour la réforme électorale, qui semble avoir été reléguée au backseat des priorités politiques dans la nouvelle conjoncture. La majorité de trois quarts, un préalable incontournable, fait toujours défaut, d’autant que la période des koz-koze est révolue. Le salut de la réforme électorale pourrait venir du Comité des Droits de l’homme des Nations unies, instance qui a été saisie formellement par Rezistans & Alternativ  à la veille des élections générales.
L’État mauricien a été dénoncé pour violation du pronouncement des Nations unies en date de juillet 2012. Avec le GN 185/2019 du 7 octobre dernier, l’obligation à tout candidat aux élections générales de déclarer son appartenance ethnique est en nette contradiction avec les findings au chapitre des droits démocratiques des Nations unies. Avec ce nouveau recours sur le plan international, Ashok Subron et ses camarades demandent au Comité de l’ONU de décréter que les élections du 7 novembre ne sont pas “democratic/free fair”.
Pour revenir au tableau des législatives de jeudi, l’Alliance Morisien n’a pas été en mesure d’embrigader un soutien populaire bien loin de la barre des 50%. Toutefois, ce n’est nullement un hasard que la circonscription de Piton/Rivière-du-Rempart est encore présentée comme le fief du MSM. Au N°7, il a réalisé une moyenne de 50,29% des votes, avec le MMM affichant son pire score dans une circonscription avec 7,44% et ses candidats perdant leur caution, comme ce sera le cas à Flacq/Bon-Accueil (N°9). à Quartier-Militaire/Moka (N°8) avec le leader de l’Alliance Morisien engagé dans une lutte sans merci avec son oncle, Ashock Jugnauth, le soutien n’était acquis qu’à hauteur de 48,21%, même si à la porte d’à-côté, soit Flacq/Bon-Accueil, le taux était légèrement inférieur aux 50%, soit exactement 49,09%.
Les données de la Commission électorale soulignent que dans plus de 10 circonscriptions, l’Alliance Morisien, s’appuyant sur le réseau de anou marye pike et autres moyens logistiques et financiers, n’a pas été en mesure de mobiliser l’électorat au-dessus de 40%, dont cinq sous les 30%, en l’occurrence :
l Port-Louis Sud/Port-Louis Central (No 2): 21,7%
Port-Louis Maritime/Port-Louis Est (No 3): 22,33%
l Beau-Bassin/Petite-Rivière (No 20): 24,19%
l GRNO/Port-Louis Ouest (No 1): 29,28%
l Stanley/Rose-Hill (No 19): 29,87%.
Paradoxe
Dans le camp de l’Alliance Nationale, deux circonscriptions de la capitale, nommément Port-Louis Sud/Port-Louis Central (N°2) et Port-Louis Maritime/Port-Louis Est (N°3), affichent un taux d’adhésion des plus honorables, avec respectivement 45,2% et 43,04%. À Belle-Rose/Quatre-Bornes (N°18), l’effet Arvin Boolell permet à l’Alliance Nationale de titiller les 40% (plus exactement 39%). Partant de Port-Louis Nord/Montagne-Longue (N°4) jusqu’à La Caverne-Phœnix, le Parti travailliste évolue dans la fourchette de 30 à 38%. Par contre, dans les régions basses des Plaines Wilhems, les Nos 19 et 20, des efforts s’imposent, car la moyenne est collée au plancher de 20%.
Par contre, le MMM, avec 21,90% sur le plan national, se hisse au-delà de la barre des 30% dans trois circonscriptions limitrophes, en l’occurrence Stanley/Rose-Hill (N°19), Beau-Bassin/Petite-Rivière (N°20) et Grande-Rivière Nord-Ouest/Port-Louis Ouest (N°1). Le paradoxe de ces élections générales est que le MMM, réalisant 30,91% au N°1, n’y est pas parvenu à faire élire un candidat, avec la défaite de Veda Baloomoody et Arianne Navarre-Marie, se faisant coiffer à la dernière minute par Patrice Armance du PMSD pour la troisième place.
Les explications aux Nos 19 et 20 tournent autour de la présence du leader du MMM, Paul Bérenger, qui se fait élire sans interruption au N°19 depuis ces 25 dernières années. Au N°20, ce n’est pas un hasard que l’étiquette de bulldozer politique lui a été collée au dos. Depuis 1989, c’est le neuvième mandat de députation, dont cinq fois en tête de liste depuis 2000, pour Rajesh Bhagwan, devenu une figure politique incontournable à Beau-Bassin/Petite-Rivière (N°20). À Vacoas/Floréal (N°16), avec notamment l’élection de Joanna Bérenger en tête, le MMM obtient une moyenne de 32,6%.
Néanmoins, le revers de la médaille est encore plus insoutenable, le MMM ne recueillant que 7,44% des votes à Piton/Rivière-du-Rempart (N°7) et des candidats dans cette circonscription aussi bien qu’au N°9 n’étant pas en mesure de “tirer leur caution’” de Rs 1 500 du Nomination Day. Dans les quatre circonscriptions de la capitale, jadis considérée comme la citadelle mauve, le MMM affiche une moyenne de 25,5%, dont une pointe de 30,91% au N°1 et un creux de 19,3% à Port-Louis Nord/Montagne-Longue (No 4). Entre le N°5 (Pamplemousses/Triolet) et le N°14 (Savanne/Rivière-Noire (N°14), le MMM passe difficilement le cap des 15%, sauf  pour la côte ouest avec 24,38%.
D’ailleurs, commentant les résultats de ces élections générales, Lalit, qui concède avoir également subi l’effet marginalisation, souligne que “kote MMM, eleksyon apre eleksyon, li finn perdi net so imans sutyin klas travayer ki li ti ena dan lakanpayn (ki li ti ena ant 1971 ek 1981). Ariv 2019, ena kandida MMM ki finn perdi kosyon dan lakanpayn, kouma dan Nimero 7 ek 9. Avek enn kanpayn plito bi-polarize ant sirkonskripsyon N°4 ek N°15, nou finn truv enn marzinalizasyon lezot lafors politik, osi byin ki MMM.”
Performances individuelles
Au plan des performances individuelles, au sein du clan des élus avec un pass mark de 30%, le frontbencher de la majorité sortante Ivan Collendavelloo, ayant obtenu un score de 31,8%, rivalise avec le néophyte de l’Alliance Morisien Kenny Dhunnoo avec 31,35% pour se retrouver au sein de l’hémicycle. Les autres honourable members élus avec les plus petits scores sont Patrice Armance au N°1 (31,92%), Ashley Ittoo (32,68%) et Franco Quirin (32,6%).
Par contre, Mahomed Osman, du PTr, est au sommet de ce hit-parade électoral, occupant la première place au N°2 avec 60,1% des voix. À  Quartier-Militaire/Moka, Pravind Jugnauth occupe la 2e place au tableau en réalisant 56,82%. Puis suivent dans l’ordre le tombeur de Navin Ramgoolam à Montagne-Blanche/Grande-Rivière-Sud-Est (N° 10), Vikram Hurdoyal (54,59%), Kailash Jagatpal (53,06%) au N°13, Shakeel Mohamed (52,02%) au N°3, Maneesh Gobin (51,71%) au N°7, Sudhir Maudhoo (50,34%) au N°9 face à son ancien political mentor Anil Bachoo, et Rajanah Dhaliah (50%) au N°7.
D’autre part, la gender representation est loin d’être satisfaisante, les femmes n’occupant que 16% des sièges à l’Assemblée nationale, bien loin des 30%. Des onze candidates élues sous le FPTP, neuf y siégeront pour la première fois, dont deux dans les rangs du MMM, à savoir Joanna Bérenger et Karen Foo Kune. Alors que l’Alliance Nationale présentera une face des plus machos à l’Assemblée nationale, dont aucune femme parlementaire, à l’Alliance Morisien Leela-Devi Dookhun sera rejointe par sept autres consœurs, Joanne Tour, Sandra Mayotte, Kalpana Devi Koonjoo-Shah, Naveena Ramyad, Teenah Jutton, Subhasnee Lutchmun Roy et Dorine Chuckory, ancien lord-maire.
Avec ces élections générales, le paysage politique à Rodrigues se présente sous un nouveau visage. Certes, l’OPR maintient son empreinte avec des scores sans appel pour ses deux candidats, Francisco François (56,61%) et Buisson Perrine Léopold (54,02%). Mais le Mouvement Rodriguais (MR) de Nicolas Von Mally, qui faisait figure de challenger politique, s’est complètement écroulé, ses candidats Marioline Spéville et Claudarel Botshare ne parvenant pas à franchir la barre des 10%. De son côté, l’ex-chef commissaire Johnson Roussety n’a pas fait mieux avec ses 5,78%.
Par contre, le PMSD a établi ses repères, Vincent Perrine et Patricia Prosper obtenant respectivement 30,55% et 27,89% des voix. Et cela en dépit de la virulente campagne de l’OPR “PMSD Go Home”. La question qui reste posée est si le PMSD (Rodrigues), avec une telle performance, aurait déjà pris rendez-vous pour les prochaines élections de l’Assemblée Régionale de Rodrigues….

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