ENQUÊTE JUDICIAIRE – DÉCÈS SUSPECT DE SOOPRAMANIEN KISTNEN : Des images vidéo Safe City du 16 octobre volent la vedette

- Des policiers incapables de fournir des détails sur l’itinéraire du défunt après sa descente du bus à Rose-Hill, ce qui pousse la magistrate à ordonner le visionnage des images CCTV - Un ami proche de Kistnen : « Détérioration de la relation qu’entretenait ce dernier avec le ministre Yogida Sawmynaden »

Nouvelle audience quelque peu tendue, dans le cadre de l’enquête judiciaire sur la mort suspecte de Soopramanien Kistnen, hier au tribunal de Moka. Si un sergent de police devait affirmer qu’après avoir visionné les images des caméras Safe City du 16 octobre – il a perdu la trace du défunt alors que celui-ci quittait Telfair pour prendre un autobus sur la route principale à Moka – un policier affecté à la Safe City Control Room devait avancer l’avoir vu prendre l’autobus pour se diriger vers Rose-Hill mais pour ensuite le perdre de vue lors de la descente des passagers.  Des explications n’ayant pas convaincu la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath, qui a voulu connaître les raisons pour lesquelles toutes les images des caméras Safe City pouvant retracer l’itinéraire du défunt après sa sortie du bus n’aient pas été visionnées. Elle a alors réclamé que ces enregistrements soient reconstitués et produits en Cour pour un visionnage.

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L’audition d’hier avait été marquée par l’audition des policiers qui avaient visionné les images des caméras Safe City en vue de retracer le parcours de Soopramanien Kistnen depuis le 16 octobre jusqu’à la découverte de son cadavre calciné le 18 octobre dans un champ de cannes à Telfair, Moka. Le sergent de la Criminal Investigation Division (CID) de Moka a été appelé à faire part de sa mission de visionner les images CCTV de Safe City.
En Cour, il a expliqué avoir pu voir le défunt sur les vidéos, visionnées le 26 octobre à la Control Room de Safe City, alors que celui-ci procédait vers la route principale près du rond-point de Telfair. Selon lui, à un certain moment, le défunt avait emprunté le sentier dans les champs de cannes pour se diriger vers un arrêt d’autobus en face d’un établissement secondaire. Ce serait à ce moment-là qu’il aurait perdu sa trace, soit vers 11h30 ce vendredi 16 octobre. Et le policier d’indiquer que là où il se dirigeait, les caméras de Safe City n’assuraient pas une couverture. Par la suite, il devait même avancer que seules deux caméras étaient opérationnelles et que les autres ne fonctionnaient pas.
Le policier devait toutefois se faire reprendre par le représentant du DPP, Me Azam Neerooa, qui l’a confronté à un document officiel de la police attestant que Soopramanien Kistnen avait bien pris un bus pour se diriger vers Rose-Hill avant midi. Le rapport devait même mentionner la plaque d’immatriculation de l’autobus alors que l’officier de police n’avait rien vu de cela.
À une question de Me Neerooa quant à la raison pour laquelle il n’avait pu voir le défunt prendre l’autobus, le sergent devait lui répondre qu’il n’était pas dans le champ de vision des caméras de Safe City. Il devait aussi affirmer qu’il connaissait le défunt, ce qui lui avait permis de le reconnaître sur les vidéos. S’ensuivent des questions de Me Rama Valayden et de la magistrate pour en savoir davantage sur les motifs pour lesquels le policier avait perdu de vue le défunt.

MeValayden (RV) : Aviez-vous vérifié sur ces enregistrements tous les arrêts d’autobus de Moka à Rose-Hill ?
Sergent Yerukunondu (SY) : Non je n’ai pas vérifié. Mes instructions étaient de vérifier les caméras dans la région de Telfair, Moka.
RV : Vous savez comment les caméras CCTV de Safe City fonctionnent?
SY : Non.
RV : Quand vous êtes allé à la Control Room de Safe City le 26 octobre, sachant que la mort était traitée comme un suicide, vous semblez vous être contenté de vous satisfaire des réponses que l’on vous fournissait.
SY : Oui j’étais satisfait des réponses obtenues.
La magistrate, à son tour, a interrogé le policier.
Vydia Mungroo-Jugurnauth (VMJ) : N’était-ce pas de votre devoir de trouver où le défunt a pu aller quand vous l’avez perdu de vue à Moka ?
SY : Mes instructions étaient limitées à retracer son itinéraire à Moka.
VMJ : Alors que vous l’avez perdu de vue, comment avez-vous pu conclure votre rapport sans avoir cherché sur les autres caméras de Safe City ? N’était-ce pas logique de faire cet exercice ?
SY  : C’était logique, mais je ne l’ai pas fait.
Au tour d’un constable Abeeram affecté à la Control Room de Safe City d’être entendu. Il devait avancer que, mis à part le visionnage des images CCTV le 26 octobre, le même exercice fut effectué le 19 novembre en compagnie d’un autre policier. Il a expliqué que ce jour-là, après avoir agrandi l’image des enregistrements, c’est de là qu’ils ont pu voir le défunt prendre l’autobus vers Moka pour se diriger vers Rose-Hill. Selon ce qu’il a vu, l’autobus en question s’est arrêté près du poste de Rose-Hill vers 11h53. Toutefois, lorsque les passagers sont sortis de l’autobus, il n’a pu identifier le défunt. Répondant à une question de Me Neerooa, il a confirmé qu’il y a des caméras CCTV près d’Arab Town et à proximité du rond-point de Vandermeersch. Me Neerooa devait ainsi faire une requête pour que le policier revienne avec toutes les vidéos d’enregistrement des caméras CCTV de Safe City pouvant retracer l’itinéraire du défunt depuis sa sortie de l’autobus vers 11h53 le vendredi 16 octobre. Le policier devait répondre que ces vidéos s’effacent automatiquement après 30 jours. Déclaration qui a surpris plus d’un dans la salle d’audience.
Cependant, Me Valayden est venu remettre les pendules à l’heure en rappelant que ces enregistrements du 16 octobre ont été visionnés le 19 novembre, soit plus d’un mois après le jour où la victime aurait été repérée sur les images CCTV. La magistrate a alors donné l’ordre que ces enregistrements soient visionnés en Cour.

« Li ti per lamor »

Il a été question par la suite de l’audition des proches de Soopramanien Kistnen. Ce dernier se trouvait chez un des frères dans la matinée du 16 octobre avant d’aller prendre l’autobus pour Rose-Hill. « Li ti pe vinn kot mwa preske toulezour apre so loperasyon en out. Sa zour-la li ti vini vers 8h ek nounn kas enn poz. » Et de mettre en avant qu’il faisait une sieste lorsque le défunt l’a informé qu’il devait se rendre à Rose-Hill.
« Mo pann akompagn li me li ti ena enn demars pou fer et linn dir mwa li pou fini revinn kot mwa vers 15 h ». Parsuramen Arian indique toutefois que Soopramanien Kistnen n’était jamais revenu. Il avait tenté de l’appeler « au moins à huit reprises » mais son téléphone était éteint. Le 18 octobre, il apprit alors que le corps retrouvé à Telfair était bien celui de Soopramanien Kistnen. « O depar mo ti pe dir pa kapav li kinn suiside. Li ti pas par bokou mizer me linn konn releve li ».
Interrogé sur les fréquentations du défunt, le témoin a mis en exergue qu’il était connu comme étant un activiste du MSM et qu’il était très proche du ministre du Commerce, Yogida Sawmynaden. Koomadha Sawmynaden, le frère du ministre, connaissait aussi bien le défunt, selon le témoin, qui devait même faire part d’une anecdote : « Kan li ti lopital pou so loperasyon, Koomadha ti vinn get li. Mo ti al rod enn zafer enn moman ek kan monn retourne, Kaya (Soopramanien Kistnen) so figir ti sanze. Li ti dir mwa douler, me mo pann krwar li ».
Le témoin souligne, par ailleurs, que le défunt avait des dettes à payer « me pa akoz sa li ti pou met dife ar li ». Et de préciser que Soopramanien Kistnen souffrait de perdre des contrats et avait même tenté d’obtenir un rendez-vous avec le Premier ministre, Pravind Jugnauth; pour lui faire part de ses difficultés. Toutefois, le témoin en question devait confirmer avoir noté une dégradation dans les rapports qu’entretenait l’agent MSM avec le ministre Sawmynaden.
Une fois, alors qu’ils étaient à l’hôpital, Soopramanien Kistnen n’avait pas apprécié le fait qu’il ait appelé le ministre du Commerce pour l’informer que le défunt était hospitalisé. Le ministre devait toutefois lui rendre visite.
Ainsi, les frères ont soutenu en Cour qu’il était impossible que Soopramanien Kistnen ait pu se suicider : « Li ti per lamor et li ti pe pran boukou prekosion ».
Un quatrième jour d’audience qui annonce de nouvelles révélations avec comme points d’orgue le visionnage des images CCTV et l’audition attendue de Koomadha Sawmynaden, le frère du ministre. Il sera probablement question de la voiture rouge sur les lieux du crime, hantant les limiers de la CID depuis la réouverture de cette enquête, classée initialement comme un suicide.

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