Femme Cleaner | Jayantee Meunier—Le PBAT prend à contre-pied la PSC

La Public Service Commission avait renvoyé Jayantee Meunier pour coups et blessures sur son époux, alors qu’elle avait une « Protection Order »

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Recrutée par le ministère de l’Education, suivant la grève de la faim des femmes Cleaners, Jayantee Meunier a eu la surprise de voir son contrat résilié quelques mois plus tard en raison d’un antécédent judiciaire lié à la violence conjugale. Elle avait accepté de payer une amende suivant des plaintes de son époux, alors qu’elle bénéficiait elle-même d’un “Protection Order”. Un fait que la Public Service Commission (PSC) n’a pas pris en considération. Les syndicalistes Jane Ragoo et Reeaz Chuttoo ont porté l’affaire devant le Public Bodies Appeal Tribunal (PBAT), qui a renversé la décision de la PSC.

Elle pensait avoir trouvé la lumière au bout du tunnel quand elle avait été recrutée par le ministère de l’Education, à travers la PSC, suivant la grève de la faim des femmes Cleaners. Celles-ci, rappelons-le avaient un salaire de Rs 1 500. Jayantee Meunier était parmi celles qui étaient engagées par les Parent Teachers’ Associations, et donc éligibles pour un salaire de Rs 8 500. Ce qui devait par la suite passer à Rs 9 000 avec l’introduction du salaire minimum. Un grand soulagement pour une femme qui a dû s’occuper seule ses deux filles avec Rs 1 500 pendant de nombreuses années.

Or, le 27 août dernier, Jayantee Meunier  a perdu son emploi. « Un après-midi, alors que je nettoyais l’école après les heures de classe, une responsable est venue me dire qu’il y avait deux femmes qui me demandaient au bureau. Lorsque je suis allée voir, elles m’ont dit qu’il y avait une lettre à signer. Je leur ai dit que je ne savais pas lire et de donner la lettre à la responsable de l’école pour qu’elle m’informe du contenu. Mais elles n’ont pas voulu. »

Jayantee Meunier dit avoir tout de même accepté de signer la lettre car « c’était des gens du gouvernement. » Ce n’est qu’après leur départ qu’elle devait apprendre son licenciement.

Selon les règlements de la PSC,  les nouvelles recrues doivent signer un document certifiant qu’elles n’ont pas été condamnées par la Cour. Ce que Jayantee Meunier a fait, suite à une réunion organisée au Collège Royal de Port-Louis. « Tout de même, j’ai fait savoir aux officiers sur place que j’avais eu des problèmes de ménage dans le passé et elles m’ont dit que ce n’était pas important. »

D’où la surprise de Jayantee Meunier lorsqu’elle a été licenciée. Il a fallu la ténacité des syndicalistes Jane Ragoo et Reeaz Chuttoo pour que son cas soit pris au sérieux. Ces derniers ont demandé à Jayantee Meunier de produire un certificat de moralité, qui a confirmé qu’elle était « clean.» De même, la cour de district de Pamplemousses, sollicitée, a confirmé que « no case could be found » contre la principale concernée. De même, elle avait déjà un “Protection Order” contre son époux, qui n’a pas été pris en considération. Malgré cela, la PSC ne voulait rien entendre. Ce qui a amené les syndicalistes à porter l’affaire devant le PBAT.

Dans son “statement of case”, Jayantee Meunier avait fait état de ses déboires conjugaux et ses démarches pour un  “Protection Order”. Six mois après la naissance de son deuxième enfant, Jayantee Meunier devait toujours se rendre en cours pour les procédures. « A un certain moment, les policiers et officiers de la cour ont eu pitié de moi. Ils m’ont dit : “Madame, combien de temps allez-vous faire le va-et-vient avec vos enfants comme cela en Cour ? Mieux vaut accepter de payer l’amende, qui s’élevait à Rs 300, pour en finir.” Je ne savais pas que cela allait jouer contre moi par la suite. » Il y avait deux cas et les deux amendes ont été payées en août et septembre 2006.

Dans son rapport en date du13 février, le Public Bodies Appeal Tribunal a renversé la décision de la PSC. Cette dernière avait avancé : « The Appellant was found not suitable for further employment in the Government Service. She has shown a tendency to recidivate. In the interest of school children she could not be allowed to continue to work in the school environment. » Or, le tribunal a fait ressortir que Jayantee Meunier avait travaillé avec les enfants dans une école primaire pendant six ans et qu’à aucun moment, il n’y a eu une plainte quelconque contre elle.

De plus, le tribunal relève que selon l’article 5 de la Certificate of Character Act 2012, la personne ne doit pas avoir commis de crime, impliquant une amende allant jusqu’à Rs 5 000, au cours des cinq dernières années. Ce qui explique pourquoi son certificat de moralité était « clean », même si le bureau du DPP a changé de version devant le PBAT. Le tribunal se demande ainsi s’il est « juste » que l’employeur réclame un “clean slate” des dix dernières années à la plaignante. De plus, il fait remarquer qu’elle n’a payé qu’une amende minimale, bien loin des Rs 5 000 prescrites par la loi.

Le montant de cette amende atteste que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas graves. « She seemed totally unempowered and incapable of getting out of the vicious circle of her condition. » Le tribunal juge ainsi que la décision de la PSC « was harsh ». Qui plus est, le tribunal reconnaît que Jayantee Meunier qui, entre-temps, s’est séparée de son époux, élève seule ses deux filles, aujourd’hui âgées de 14 et 16 ans. Ce travail était donc son gagne-pain. « This case deserves attention by those taking decisions on the poorer segments of the population and the circumstances of their life. »

Le PBAT rappelle encore que l’employeur jouit d’une certaine discrétion, qu’il peut utiliser judicieusement, et qu’il doit agir avec un esprit de proportionnalité. « This is crucial when one person’s source of livelihood is at stake. » Le tribunal estime que l’employeur aurait pu permettre à la plaignante de conserver son emploi sous certaines conditions. Raison pour laquelle il a rejeté la décision de licenciement et renvoyé le dossier à la PSC.

Toutefois, ce n’est pas encore la fin du combat pour Jayantee Meunier. Une réunion est prévue entre les différentes parties concernées au ministère du Travail le 13 mars prochain pour discuter de sa réintégration. La syndicaliste Jane Ragoo lance un appel à la ministre de l’Education, Leela Devi Dookun, pour qu’elle prenne le temps de lire le rapport du PBAT afin de prendre connaissance des détails de ce cas, « qui concerne une femme, comme elle ». Jusqu’ici, le ministère de l’Education n’a pris aucune position sur cette affaire, préférant renvoyer la balle à la PSC.

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