LES ‘SCAVENGERS’, DES HÉROS ORDINAIRES EN PÉRIODE DE CRISE  : La peur au ventre ils en appellent au civisme de la population

La collecte des déchets est l’un des services les plus essentiels pour le bon fonctionnement du pays. Aux quatre coins de l’île, les éboueurs qui bravent le danger du virus pour éliminer les détritus qui s’accumulent depuis le début du couvre-feu sanitaire se disent satisfaits du renforcement des moyens de protection dont ils disposent et qui leur permettent de travailler sereinement. Ils en appellent en revanche au civisme de la population.

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Depuis la mise en place des mesures de confinement décidées par le gouvernement, les éboueurs ne chôment pas. Le visage dissimulé derrière un masque, Raj Doma, un éboueur de la municipalité de Beau-Bassin/Rose-Hill nous livre ses impressions: «On est en première ligne comme les infirmiers et les policiers qui travaillent au péril de leur vie. Il est important qu’on nous traite sur le même pied d’égalité.» Plus que jamais, la propreté et l’hygiène sont les maîtres mots de cette profession très exposée au risque de contamination à la Covid-19. Ses collègues et lui ont été fournis en gel hydroalcoolique, en lingettes et en spray désinfectant qu’ils utilisent tout au long des tournées qui ont été organisées de manière à ce que la distanciation sociale entre les salariés soit conforme aux règles établies. «À l’avant des camions, qui sont désinfectés quotidiennement, le conducteur sera désormais tout seul dans sa cabine et il n’y aura plus qu’un éboueur installé à l’arrière, et un autre sur le marchepied», souligne Raj Doma.
« Pensez à ces pères de famille »

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La mission des éboueurs est plus dangereuse dans les circonscriptions décrétées zones rouges de la Caverne/Phoenix, de Vacoas/Floréal et de Curepipe/Midlands, où ils sont plus à risque. Ils doivent aussi faire face à un autre problème: des habitants jettent leurs masques de protection et leurs gants dans les rues, à même le sol. De quoi provoquer la colère des éboueurs «Déjà en temps normal, les gens ne sont font pas prier pour jeter leurs masques et leur essuie-mains sur la rue. Ces matériels sont peut-être souillés par le virus», s’insurge un salarié de la municipalité de Curepipe. Certes, ce dernier s’est fait vacciner lundi au gymnase James Burty David, sauf qu’à la maison, ses proches sont préoccupés. «Ma compagne a un peu peur que je ramène ça à la maison, que je refile ça à nos enfants en bas âge», souligne notre interlocuteur.

Les éboueurs de Vacoas/Phoenix sont également confrontés à des cas potentiels des personnes touchées par cette maladie. Le maire de la ville Praveen Ramburn souligne que la municipalité a mis en place un plan de continuité strict pour maintenir le ramassage des ordures. «Les trois cents employés comprenant les éboueurs et les agents de maintenance ont tous été vaccinés mardi dernier avant de reprendre leurs fonctions. Rien n’a été laissé au hasard. On a offert un lot de masques et de gants à nos éboueurs qui exercent dans des camions désinfectés le matin et l’après-midi», déclare Praveen Ramburn qui se dit conscient des difficultés auxquels sont confrontés les éboueurs sur le terrain, parmi lesquelles l’incivisme de certaines personnes qui ne jettent pas leurs mouchoirs ou leurs masques possiblement infectés dans un sac plastique fermé. «Le public doit comprendre que les mouchoirs, les masques et les gants usagés doivent être mis dans un sac hermétiquement fermé et enfouis dans un sac poubelle. Pensez à ces pères de famille qui courent le risque de transmettre le virus à leurs proches», dit-il.

Les éboueurs sont aussi à d’œuvre dans les 130 villages de l’île. Depuis lundi, les poids lourds ont repris la route à 5 h 30 dans les villages de Saint-Hubert et de Saint-Hilaire dans le sud du pays. «Les appels téléphoniques ont afflué au conseil de village depuis le début du confinement. Les habitants se plaignaient de l’odeur nauséabonde dégagée par l’accumulation des détritus, mais il était primordial que nos éboueurs se fassent vacciner avant de reprendre le travail. C’est fait depuis lundi. Les éboueurs redoublent d’efforts pour rattraper le retard», nous confie Nitin Jeeha, conseiller. «Je dois dire que le conseil de district de Grand-Port fait un boulot formidable pour que nos éboueurs ne manquent de rien», souligne Nitin Jeeha, qui ajoute qu’il est essentiel d’apporter «un soutien moral à ces gens que je considère comme des héros de cette crise sanitaire. Malgré les incivilités, les éboueurs reçoivent aussi le soutien des habitants».

Soonitee Malick, employée d’une compagnie de nettoyage : « Moins stressé
cette année »

Il y a un an, jour pour jour, alors que le coronavirus ébranlait le pays, Soonitee Malick, une employée d’une compagnie effectuant des travaux de nettoyage, confiait ceci au Mauricien: «Nous sommes livrés à notre sort à l’hôpital de Victoria. Nous côtoyons des malades de Covid-19 alors qu’on ne dispose pas de gants ni de masques.» Ses employeurs semblent avoir retenu la leçon cette année, car en sus d’un lot de masques et de gants, elle et ses collègues ont eu chacun une tenue de protection.
«Il faut dire qu’on est moins stressé cette année comparativement à l’année dernière où l’on était au bord de la dépression dans la mesure où les gens mouraient à Maurice à cause du virus», relate Soonitee Malick, mère célibataire, qui est affectée depuis lundi au Plaza, à Rose-Hill, où se déroule l’exercice de vaccination. En effet, «on fait un travail difficile, mais c’est en cette période de crise que je me sens plus utile et valorisée», dit-elle.

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