Marche Citoyenne — Samedi 29 août : Du jamais-vu !

L’électrochoc à l’Hôtel du GM devant le déferlement de contestation dans les rues de la capitale avec pour slogan « fou li deor » à l’adresse de Pravind Jugnauth
La police confirme : aucun incident à déplorer en dépit de la campagne « fer per » de Lakaz Mama

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Devant la marée humaine, avec une préférence pour le noir de la marche citoyenne à Port-Louis à l’initiative de Bruneau Laurette, le consensus qui se dégage est que c’est du JAMAIS VU. Toutefois, en précisant depuis 1982, année électorale du changement par excellence. Les principales artères entre la place de la Cathédrale Saint-Louis, début de la marche, à la rue John Kennedy devant Rogers House pour la clôture et les rues latérales de la capitale étaient si noires de monde que les estimations peuvent varier, avec la mention au-delà de la barre des 50 000, avec le chiffre de quelque 80 000 aussi cité. Le déplacement d’une foule de Mauriciens, représentant la nation arc-en-ciel, a été reçu à l’Hôtel du gouvernement comme un électrochoc d’impopularité politique à peine une année après les dernières élections générales et au lendemain du début des grandes vacances parlementaires. Le déferlement de la contestation s’est déroulé sous le slogan « fou li deor » à l’adresse du Premier ministre, Pravind Jugnauth.

Le message a-t-il été aussi bien reçu qu’aucun préposé au Prime Minister’s Office n’a voulu accuser réception d’une lettre signée des Zanfan de la Republik adressée au Premier ministre comme il est de coutume à chaque manifestation ? Ce manque d’élégance de la part du gouvernement a poussé à bout Ashok Subron, qui n’a eu d’autre chox que de déchirer la lettre devant le Parlement. Mais la remise de cette lettre devait être accompagnée d’une bouteille remplie de fioul déversé dans la mer par le MV Wakashio « parski ou antan ki Premie Minis ek Minis la defans ou ena responsabilite sekirite tou sitwayin ek tou so patrimwann natirel. »

Alors qu’avant le début de la marche citoyenne, la « kanpagn fer  pe r» orchestrée par Lakaz Mama en évoquant des risques de dérapage « kouma zafer Kaya », expression utilisée dans des milieux qui se reconnaîtront, le calme, la discipline et l’engagement des manifestants ont été exemplaires à plus d’iun titre. L’important déploiement des forces de l’ordre, avec éléments de la Special Supporting Unit, de la Special Mobile Force ou encore des Field Intelligence Officers en mission commandée sur le terrain n’aura servi à rien. En fin de journée, à la fin de la manifestation avec les participants se dispersant, les Casernes centrales confirmaient officiellement : aucun incident à déplorer ! Il n’y avait pas que cela comme obstacles pour décourager toute participation massive. La vente de produits hors-taxes de Mauritius Duty Free Paradise à Pailles et les difficultés du transport en commun n’ont pas pour autant empêché à la rue de faire entendre sa voix à l’appel de Bruneaiu Laurette, qui a gagné son pari, que les partis politiques auraient bien aimé réaliser.

Depuis très tôt, les rues de la capitale connaissaient une animation particulière pour un samedi matin. Un véritable réveil en sursaut, comme pour faire comprendre aux princes du jour que « trop c’est trop ». Petits et grands, en groupes ou encore en famille, sans oublier le quadricolore national, ils ont répondu à l’appel. Le cri de ralliement de la mache citoyenne est : « Fou li deor ! », comme pour démontrer leur mécontentement vis-à-vis de Pravind Jugnauth pour sa gestion du naufrage du MV Wakashio et certains dossiers relevant de ses responsabilités en tant que chef du gouvernement.
Mauricianisme

Depuis 10h, les premiers manifestants avaient déjà envahi la place de la Cathédrale Saint-Louis, où avaient été installés un écran géant et un podium. Graduellement, cette foule grossissait, avec la place de la Cathédrale, les rues Pope Hennesy et de l’Intendance menant jusqu’à Place d’Armes littéralement prises d’assaut. Les participants étaient vêtus de t-shirts noirs avec des messages « I love my country », « I’m ashamed of my government ». Dans cette foule dégageant un parfum de mauricianisme authentique tant rêvé, les commentaires allaient bon train quant à la pertience de cette démarche hors de l’ordinaire et surtout sans « political parties string attached ».

« Pena kominote, pena laz, pena kouler, pena blan pena nwar, morisien ki prezan isi la. Noun vin dir leta ki noun plin ek zot ban zistwar dormi dibout », s’exclame un jeune homme venu du sud-est devant cette ambiance toute en ferveur. Ils étaient d’ailleurs nombreux venus du sud pour se faire entendre contre ce qu’il qualifient d’amateurisme qui a prévalu durant l’épisode MV Wakashio. « Nou’nn ase ek sa zafer dir nou mo pa okouran la. Ou byen vin dir nou pa ti kapav fer ceci ou cela. Si pa kapav dirize, lev pake ale », affirmait cette vieille dame pour qui cette foule représente un sursaut sans précédent du mauricianisme. « Pa pe vin fer politik la. Mesaz la pou zot tou. Politisien bizin arete servi dimounn zis pou eleksyon ek asiz dan pouvwar », affirmait cet autre universitaire.
Sur le coup de midi, les manifestants ont écouté les discours brefs de Bruneau Laurette et de son homme de loi, Me Sanjeev Teeluckdharry. Une vidéo étalant les interrogations mises en avant par Bruneau Laurette sur l’affaire MV Wakashio a été diffusée sur un écran géant, le temps que les autres participants arrivent. Réglée comme du papier à musique, à 13h, la manifestation a débuté avec les manifestants marchant en direction de la municipalité de Port-Louis, le long de la rue Pope Hennessy, complètement envahie. Pas un seul « trou » était indentifié dans cette foule compacte, avec d’importants groupes s’y joignant encore. À ce rythme, ceux à la fin du cortège avaient déjà perdu de vue la frontline.

« Akot mo fine fote »

Dans cette foule, nombreuses ONG avaient mobilisé leurs troupes, dont des activistes de Rezistans ek Alternativ, de 100% Citoyens ou encore de syndicalistes, de politiciens de différents bords. L’impression était que la foule bougeait à peine sur le trajet. Vers 14h, le succès de la manifestation avait dépassé l’attente des organisateurs, car si la tête du cortège était déjà au coin de la rue Edith Cavell, ils étaient encore des milliers bloqués devant le poste de police de Pope Hennessy. Sans compter ceux qui rejoignaient la foule par la Place D’Armes ou encore à travers Marie Reine de La Paix directement ou la gare Victoria. Les policiers en uniforme et aussi ceux en civile concédaient qu’on ne pouvait nullement accélérer le tempo de cette marche car la foule était immense et compacte.

Ce n’est qu’aux alentours de 14h30 que la fin du cortège empruntait la rue Intendance, soit du côté du Parlement et du Prime Minister’s Office. Les manifestants tenaient des pancartes : « Lev pake ale », « Akot mo fine fote », « Nou pa zot maryonet » ou encore « Pra-20 Out », tout en scandant « Fou li deor ! » et aussi « nou oule laverite, manter nou pale ».

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