« Opération « Caesar’s Wife » — Angus Road Saga : le « plan » du 28 janvier 2015 « Exposed »

  • L’ex-Attorney General, Ravi Yerrigadoo, acculé à expliquer les dessous de la correspondance au SFO de Londres imposant la fin de l’enquête sur le transfert de Rs 20 M à Londres par Alan Govinden
  • L’ICAC confirme qu’une investigation sur les transactions immobilières de Pravind Jugnauth avec Bel-Air Sugar Estate est toujours « In Abeyance » depuis le 8 mars 2013
  • Arvin Boolell : « Partant du cas Collendavelloo, le Premier ministre doit Step Down avec la consolidation des enquêtes annoncées par l’ICAC »

L’opération « Caesar’s Wife Above Any Suspicion », dans le cadre de l’Angus Road Saga, amorce en cette fin de semaine un tournant. Avec la confirmation officielle de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) qu’au moins une des trois enquêtes sur les transactions immobilières du Premier ministre, Pravind Jugnauth, avec Bel-Air Sugar Estate (BASE), initiées entre le 13 mars 2011 et le 20 octobre 2013, est encore « In Abeyance » – élément non révélé lors des échanges sur les trois précédentes Private Notice Questions du leader de l’opposition, Arvin Boolell –, le « plan » au plus haut sommet du gouvernement au lendemain des élections générales de décembre 2014 est « Exposed ».
Comme l’a révélé Week-End dans son édition du 15 novembre, la correspondance officielle adressée à la Central Authority du Royaume-Uni demandant au Serious Fraud Office de mettre un terme à l’enquête sur le transfert de Rs 20 millions sur le compte de Patrick Rountree à Londres, avec pour agent un dénommé, Alan Govinden, est en date du 28 janvier 2015. Cette correspondance formelle, sans la bénédiction de l’Office of the Director of Public Prosecutions, se trouve dans le Case File de l’ICAC avec pour référence ICAC/FIR/1356/13/C. Et le fait qu’à cette date, l’une de ces trois enquêtes de la série Angus Road Saga était et est toujours « In Abeyance », soit celle ouverte depuis le 8 mars 2013, place l’ancien Attorney General, Ravi Yerrigadoo, dans une potentielle position pénale des plus compromettantes dans une enquête de « Perverting the Course of Justice », voire même « Tampering with Evidence ». À noter que jusqu’ici, lors des échanges à l’Assemblée nationale, Pravind Jugnauth s’est gardé de faire état de cette enquête « In Abeyance », préférant mettre l’accent sur les deux « Discontinued Investigations » en date du 9 mai 2011 et du 27 juin 2014.

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À ce stade, tout semble indiquer que l’ex-Attorney General, qui avait dû soumettre sa démission dans le cadre du sinistre scandale de Bet 365, se transforme en tant que protagoniste dans l’Angus Road, car la question critique à laquelle il devra répondre est : qui a donné des instructions au lendemain de l’installation du gouvernement de L’Alliance Lepep après les élections de décembre 2014, de stopper sans aucune raison les procédures de Mutual Legal Assistance avec la Grande-Bretagne pour faire la lumière sur le transfert de Rs 20 millions sur le compte à l’étranger de Patrick Rountree en vue de compléter l’acquisition du Domaine de l’Angus Road ? Comme déjà mentionné, la lettre de Ravi Yerrigadoo à la Central Authority de Londres est en date du 28 janvier 2015, soit à peine un mois après la prestation de serment du gouvernement dirigé par sir Anerood Jugnauth.

La demande formelle de la Central Authority à Maurice, agissant au nom de l’ICAC pour la Mutual Legal Assistance, date du 2 juin 2014 alors que l’enquête dans ce dossier, connu à l’ICAC sous le code SN 2 de la série Angus Road, a été ouverte au titre d’une Further Investigation, remonte au 8 mars 2013. Dans des milieux avisés, l’on s’appesantit sur le point que « la Request pour mettre un terme aux procédures de Mutual Legal Assistance constitue la Undeniable Evidence of perverting the course of justice and tampering with evidence dans cette enquête avec le nom du Premier ministre cité en première ligne ». Dans la conjoncture, une enquête visant à élucider les dessous autour de l’injonction de la Central Authority de Maurice aux autorités britanniques en date du 28 janvier 2015 et les explications relatives de Ravi Yerrigadoo se révèle incontournable.

Ainsi, l’ICAC, bien qu’elle tente de corroborer les versions tenues au Parlement par le PM, établit sans aucun doute qu’il y a deux enquêtes « live » au stade de « Further Investigation », devant éventuellement être soumis au Directeur des Poursuites publiques. Dans une tentative de mettre les points sur les i, l’ICAC laisse entrevoir que Pravind Jugnauth reste au cœur de la tourmente d’Angus Road Saga étant sujet à deux enquêtes, dont une d’entre elles au stade de « further investigations ». L’une de ces deux enquêtes daterait de 2013, soit celle que le leader du MSM et Lakwizinn du Prime Minister’s Office, ont jusqu’ici tenté de faire en sorte de ne pas savoir.

L’enquête en question, ouverte le 8 mars 2013 et qui selon le communiqué de l’ICAC était « kept in abeyance » dans les tiroirs de la commission jusqu’à ce que les affirmations du leader du Reform Party, Roshi Bhadain, viennent la réactiver en août dernier. Ce serait d’ailleurs dans le cadre de cette enquête, mise en orbite en 2013, que l’ICAC avait en juin 2014 eu recours à une sollicitation d’une Legal Assistance auprès des enforcement authorities britanniques, dont le Serious Fraud Office – l’affaire Angus Road prenant des allures transfrontalières avec notamment les Rs 20 millions versées par le dénommé Alan Govinden en 2001 au compte de Patrick Rountree, directeur de Bel Air Sugar Estate (BASE) pour l’acquisition de 7 023 mètres carrés de ces terres des hautes Plaines-Wilhems.
Le communiqué de l’ICAC ajoute que cette enquête, qui avait atteint le stade de « further investigation », avait visiblement été relancée par les affirmations publiques de l’ancien ministre des Services financiers et de la Bonne gouvernance. Le communiqué met également en perspective l’article 47 de la Prevention of Corruption Act, qui stipule que dès qu’une enquête passe à l’étape de Further Investigation, le directeur général de l’ICAC doit superviser les développements et que ce dernier doit éventuellement soumettre au Directeur des poursuites publiques un dossier complet contenant tous les éléments dont les dépositions et toutes les preuves.

L’ICAC fait comprendre que les enquêtes de mars 2011 et d’octobre 2013 ont été Discontinued à l’étape de Preliminary Investigation. Sauf qu’une enquête a été ouverte après la déposition de l’activiste social Bruneau Laurette, qui a remis des copies du Karne Resi de Patrick Rountree à l’ICAC et qui ont visiblement réactivé ces  « discontinued inquiries » de 2011 et de 2013. Ces affirmations de l’ICAC sont intervenues à la veille de la tenue du rassemblement politique du Parti Travailliste au cœur de la circonscription du Premier ministre à St-Pierre, soit cet après-midi, avec l’Angus Road Saga, l’un des principaux thèmes de ce rendez-vous politique.


Arvin Boolell : « L’on ne pourra
cacher la vérité éternellement »

« Le communiqué de l’ICAC confirme que j’avais raison en ce qui concerne les enquêtes de l’ICAC impliquant le PM. Mais l’on essaie de ‘decouple’ ces deux enquêtes alors que le tout concerne les acquisitions des terres d’Angus Road par Pravind Jugnauth. La manière d’opérer de Navin Beekarry à l’ICAC nécessite des interrogations, soit depuis son premier passage à la Commission entre 2002 et 2006. Les informations dont je dispose indiquent qu’il y a au moins 700 cas qui ont été ‘disposed of’ par le DG de l’ICAC à cette époque, sans avoir recours à des enquêtes poussées. Avec les affirmations, le Premier ministre devrait être entendu par l’ICAC sur les accusations de blanchiment auxquelles il fait face mais aussi des allégations de corruption. They have no place to hide et il ne pourra cacher la vérité éternellement ».
Poursuivant, le leader de l’opposition accentue la pression sur le Premier ministre. « Partant du principe Collendavelloo, qui a été révoqué par ce même Premier ministre avec une enquête de l’ICAC sur la St-Louis Gate, Pravind Jugnauth doit aujourd’hui, avec le communiqué de l’ICAC, Step Down pour que lumière soit faite en toute transparence ».


Roshi Bhadain : « Pe pran inpe letan
pou met lord dan tou sa manti la »

« L’ICAC confirme qu’il y a deux enquêtes impliquant un sitting Prime Minister. Que ce soit l’affaire des reçus ou encore les Rs 20 millions d’Alan Govinden. Il doit step down le temps qu’il soit interrogé. De plus, la situation est très particulière avec le nominé politique du Premier ministre, Navin Beekarry, qui doit superviser l’enquête de celui qui lui accorde son mandat à la tête de l’ICAC. Paret ki pe pran inpe letan pou met lord dan tou sa manti la. La vérité finira par éclater. »

 


Ismael Nazir (FLN) : « Ramgoolam a sa part de responsabilité »

Le leader du Front Libération National (FLN), Ismaël Nazir, estime que « Navin Ramgoolam a sa part de responsabilité dans l’affaire Angus Road ». Il a ajouté : « Il était Premier ministre en 2011 alors qu’une enquête de l’ICAC était en cours. Pourquoi n’a-t-il pas révoqué Pravind Jugnauth comme ministre des Finances ? » Néanmoins, il estime qu’il y a beaucoup « d’éléments dans le domaine du public » et s’interroge sur le silence du Premier ministre, Pravind Jugnauth, jusqu’ici.

Ismaël Nazir a été rejoint dans ses propos par Amika Bhujun, président du FLN, qui a dit soutenir la démarche de l’activiste Bruneau Laurette, qui a déposé une plainte pour complot durant la semaine au CCID contre le Premier ministre, l’ex-Attorney General Ravi Yerrigadoo et le directeur de l’ICAC. « Pour que l’enquête se déroule en toute impartialité, il faut que Pravind Jugnauth et Navin Beekarry démissionnent de leurs postes respectifs », a-t-il dit. Concernant le meurtre de la policière Dimple Raghoo mardi, lors d’une opération de “controlled delivery” à Beau-Vallon, le FLN dit « sympathiser avec les proches de la victime », ajoutant qu’ il « faut que justice soit faite dans cette affaire ». Ismaël Nazir a d’ailleurs lancé un appel pour que « l’émotion ne l’emporte pas sur la raison ». Il a poursuivi : « Que les coupables soient punis, mais que la police fasse son enquête selon les paramètres de la loi ! »

Par ailleurs, le leader du FLN en appelle aux autorités quant à la sécurité même de Simla Soopramanien, dont l’époux Kisnen est décédé, le mois dernier, dans des « conditions mystérieuses », dans un champ de cannes, à Telfair. « Apparemment, Kisnen Soopramanien voulait faire certaines révélations à l’ICAC. Des documents sont en possession de son épouse et il est donc impératif de la protéger », a-t-il fait ressortir. Et concernant les élections villageoises de dimanche, Amika Bhujun estime que les résultats montrent que « la population souhaite un changement dans le pays ».

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