Post-Covid-19 : Revenus réduits pour un ménage sur trois

Pire contraction de croissance (-15,2%) enregistrée de ces 40 dernières années, soit depuis la double dévaluation de la roupie de 1979 et 1981 sous SVR

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Neuf mois après le Lockdown, le poids de la Covid-19 se ressent de plus en plus. Que ce soit au niveau des ménages que sur le plan macro-économique. La deuxième série de Rapid Continuous  Multi-Purpose Household Survey de Statistics Mauritius, dont les résultats ont été publiés juste avant la Noël, est sans appel. Un ménage sur trois doit conjuguer au quotidien avec des revenus nettement à la baisse comparativement à la situation prévalant avant le 20 mars dernier. Et pour cause, quatre chefs de famille sur cinq ne parviennent plus à joindre les deux bouts à chaque fin de mois. Ce qui fait que la consommation a pris un sacré coup en 2020 avec une réduction de 14,2% contre une croissance de 3% l’année dernière. Sur le plan  macro-économique, l’horizon s’est assombri davantage avec la pire décontraction de la croissance de ces quarante dernières années, soit de l’époque de la double dévaluation de 1979 et de 1981. Devant les incertitudes et l’absence de visibilité, la dernière édition des National Accounts Estimates, qui passe en revue la contre-performance économique en 2020, se garde de s’aventurer pour établir des prévisions économiques préliminaires pour 2021.

En cette fin d’année, pas un indicateur économique n’est au vert, voire même pas à l’orange. Ils sont carrément au rouge, les National Accounts Estimates de décembre soutenant sans ambages que “all industry groups, with the exception of information and communication and financial and insurance activities, are poised to remain in negative territory in 2020 as a result of COVID-19 containment measures”. De ce fait, la contraction de la croissance a connu une détérioration d’au moins deux points sur les précédentes prévisions pour s’afficher à 15,2% cette année, soit la pire performance depuis la double dévaluation de la roupie sous l’Economic Stewardship du regretté sir Veerasamy Ringadoo.
Au-delà des analyses économiques savantes, la réalité dans les ménages s’avère être des plus alarmantes. A ce titre, le rapport Monitoring the Socio-Economic Effects of COVID-19 on Mauritian Households est révélateur à plus d’un titre. En cette fin d’année, un ménage sur trois se retrouve avec des revenus inférieurs à ceux d’avant mars dernier, période marquant le début du confinement. Statistics Mauritius concède que “as a result of the COVID-19 pandemic, Mauritian households have been affected by various types of shocks, mainly job loss, reduction  in salary/income from business. Shocks translate into large changes in household income”.

Des répercussions  néfastes sont visibles à chaque fin de mois, avec notamment  quatre ménages sur cinq affirmant faire face à de sérieuses difficultés au titre des Household Basic Needs. Le rapport de Statistics Mauritius reconnaît que “to face food needs, households might adopt negative coping strategies, whereby they skip a meal or go without eating for an entire day”.

Mais la situation dramatique ne s’arrête pas qu’à l’assiette de repas. Les repaiements des factures mensuelles prennent du retard et s’accumulent. D’abord, la consommation d’énergie électrique, avec quatre familles sur cinq (39,3%) repoussant le passage à la caisse du Central Electricity Board (CEB) à la fin du mois et un sur trois (29,6%) n’étant pas en mesure d’être en règle avec la Central Water Authority pour la consommation d’eau.
Les opérateurs engagés dans le secteur du Hire Purchase doivent se prémunir contre les risques de contagion financière post-Covid-19. Un client sur cinq (22,5%) accuse déjà du retard dans le repaiement des mensualités sur des achats effectués avant mars de cette année. Une des premières mesures adoptées par les sociétés engagées dans la vente à crédit a été de reconstituer la banque de données personnelles de la clientèle, appelée à produire les dernières fiches de paie pour établir la “capacity to pay”.

Salaires inférieurs

L’amélioration de 6,7% dans le niveau des salaires de septembre comparativement à juillet de cette année ne se résume qu’à un trompe-l’oeil. A la fin de septembre, la moyenne des salaires était de Rs 20 600, variant dans la fourchette de Rs 12 000 dans le secteur agricole et Rs 22 000 dans les services. Néanmoins, trois salariés sur dix (28%) soutiennent que leurs salaires actuels sont nettement inférieurs à ceux qu’ils percevaient avant le Lockdown du 20 mars. Et encore, la baisse dans les chiffres d’affaires affecte huit entrepreneurs et employeurs sur dix.

Au tableau du chômage, la barre des 60 000 sans-emploi a déjà été franchie à la fin de septembre, soit 62 200, dont 20 500 pour les jeunes de moins de 24%, représentant une pointe de 31.7%, soit trois fois la moyenne nationale. La récente décision du gouvernement d’étendre au 30 juin de l’année prochain l’interdiction de licenciement devrait épargner l’économie des dérapages incontrôlés du chômage dans les prochains mois.

Mais l’évolution des principaux paramètres économiques en 2020 ne laisse pas entrevoir des fenêtres de relance pour l’année prochaine. Les dernières prévisions de Statistics Mauritius indiquent que les exportations de biens et services devront essuyer une baisse de 36,3% cette année après un précédent déclin de 4,1% en 2019. Le déficit des biens et services devra s’accroître pour s’approcher de la barre des 20% du PIB, une détérioration d’un peu plus quatre points.

Les investissements se sont littéralement écroulés, avec une réduction de 26,7% en 2020 contre une progression de 6,2% l’année dernière. L’une des raisons est que les investissements publics ont chuté lourdement de 33%, alors qu’en 2019 ils avaient progressé de 19,5%. L’effondrement des investissements privés est également au menu avec une baisse de 24,3%, contrastant nettement avec la hausse de 2% de 2019.
Au chapitre de la performance sectorielle, avec la fermeture des frontières depuis neuf mois déjà,  l’Hospitality Sector dégringole avec 67,4%, n’accueillant que 310000 visiteurs sur un potentiel de 1,4 million l’année dernière. Même ceux qui croient fermement dans la résilience de l’hôtellerie arrivent difficilement à se faire une raison sur une éventuelle relance au point où d’autres se mettent à se demander si le moment n’est pas venu de “Forget the Model”.

Le bâtiment avec un Relapse de 25,4% cette année, la manufacture, victime d’un plongeon de 20,1% et un Shrinking de 32,1% dans le textile et le transport avec une performance en berne de 28,5% ne présentent pas de dispositions à aspirer à assumer le rôle de locomotive de l’économie l’année prochaine.

Ce qui a poussé Statistics Mauritius à faire l’impasse en cette fin d’année sur toute projection de la croissance pour 2021…

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