Privy council – Transfert des droits de bail d’un terrain de l’État : L’acquéreuse désavouée par les Law Lords

Les Law Lords ont estimé que Sylvia Bathfield (la vendeuse) et Mala Devi Angteeah (l’acquéreuse) ont « eu tort » d’avancer que l’accord pour le transfert des droits de bail du terrain à Pas géométriques au Vale, soumis à une condition suspensive, est valable indéfiniment du fait qu’aucun délai n’ait été imposé. Une décision survenue après 10 ans de bataille juridique et qui vient faire jurisprudence concernant le contrat de bail entre le gouvernement et les locataires de terrain à Pas géométriques. Les Law Lords Reed, Lloyd-Jones, Briggs, Kitchin et Lady Arden ont ainsi désavoué Mala Devi Angteeah.

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L’acquéreuse avait été décrétée propriétaire légitime des droits de bail d’un terrain de 1 266,20 mètres carrés du lot No 1 à Pas géométriques, au Vale. Sylvia Bathfield, la détentrice du droit de bail, avait fait appel de cette décision et avait obtenu la restitution du droit de bail. Mala Devi Angteeah avait alors eu recours au Privy Council pour contester ce jugement. La décision du Judicial Commitee du Privy Council  est ainsi venue confirmer l’appel rendu en faveur de Sylvia Bathfield, notamment du fait que l’accord entre les deux parties avait été soumis à une « condition suspensive » avec l’effet de nouvelles provisions budgétaires permettant une extension du bail de 20 ans à 60 ans. L’accord de vente a été rendu caduc du fait que les exigences pour l’obtention d’une autorisation du ministère n’aient « pas été respectées ».

Dans leur arrêt, les Law Lords ont statué que la Cour d’appel a « eu raison » de conclure que l’accord de vente entre les deux parties « a expiré » après la non-exécution des exigences de la condition suspensive du ministère du Logement et de Terres. « It follows in the Board’s view that the Court of Appeal was entitled to re-examine the facts upon a correct application of the relevant law, and entitled to conclude, as it did, that the Sale Agreement lapsed due to the non-fulfilment of the condition suspensive by the time when these proceedings were commenced », ont soutenu les Law Lords dans leur arrêt.

Retraçant les faits dans ce litige, ils ont rappelé que Sylvia Bathfield était détentrice du contrat de bail sur le terrain à Pas géométriques, au Vale, depuis 2006, et ce pour une période de 20 ans, le contrat arrivant à terme le 20 décembre 2013. Le 18 avril 2006, suite à un accord par écrit, avec l’appui d’un notaire, Sylvia Bathfield avait accepté de vendre le terrain à Pas Géométriques à Mala Devi Angteeah pour une somme de Rs 11 500 000. Le prix de vente avait été réparti comme suit : Rs 5 M pour le droit de bail et Rs 6 500 000 pour l’achat de la propriété immobilière se trouvant sur le terrain.

Pour que le transfert des droits de bail sur la propriété soit conclu, les parties devaient obtenir l’autorisation du ministère du Logement et des Terres dans un délai de 15 mois. Si le délai est dépassé, l’acheteuse devait considérer que l’engagement à vendre la propriété n’a pas abouti et que la vendeuse doit rembourser toute somme qui lui aurait été payée. Les deux parties avaient en effet entamé les procédures pour la demande d’autorisation du ministère pour le transfert des droits de bail.

Les Law Lords de prendre ainsi note qu’il n’y « avait pas eu d’autorisation » rendue par le ministère, préférant suspendre l’accord entre les deux parties « en raison de nouvelles dispositions entreprises par le gouvernement pour revoir le contrat de bail à 60 ans, comprenant un prix plus élevé pour la location annuelle et un supplément (“premium”) de Rs 1 500 000 à payer ».

Condition suspensive

Avec cette nouvelle provision budgétaire, le ministère avait fait une offre à Sylvia Bathfield pour l’extension du contrat de bail. Trouvant qu’elle « ne pouvait satisfaire cette option », elle a décidé de signer un nouvel accord avec Mala Devi Angteeah, qui avait alors accepté de payer en avance Rs 5 M sur le prix de vente. Les Law Lords devaient toutefois statuer que la somme de Rs 5 M « n’avait pas été payée » et que l’acquéreuse « n’avait jamais été en possession » de ladite propriété. De fait, selon le verdict rendu par les Law Lords, cet accord n’était qu’un « arrangement oral » et « non une variation de l’accord de vente », qui ne tenait déjà pas la route car, la première étape, qui consistait à un paiement partiel sur le prix de vente, n’avait pas été franchie.

Sylvia Bathfield avait par contre sous-loué le terrain à un certain Michael Bourgeois, qui avait entrepris des travaux sur la propriété immobilière. Cependant, après une deuxième offre du ministère, Sylvia Bathfield avait accepté d’étendre son contrat de bail à 60 ans, prenant effet à partir de décembre 2010. Elle avait, selon les termes des nouvelles dispositions, la possibilité de procéder au transfert des droits de bail avec « aucune restriction » sur une éventuelle décision de vendre les droits de bail de la propriété.
Les Law Lords, dans leur interprétation des dispositions de la loi sous le code civil mauricien, ont toutefois trouvé que les deux parties « ont fauté », suggérant qu’un accord pour le transfert de bail, soumis à une condition suspensive, peut être entretenu indéfiniment du fait qu’aucun délai ne soit imposé. Les Law Lords ont ainsi statué qu’il y a « un délai raisonnable à respecter » selon les lois régissant le contrat de bail sur les Pas géométriques à Maurice.

« The Board is satisfied, notwithstanding the literal terms of article 1176, that there will readily be implied into a Mauritian contract for the sale of land subject to a ‘condition suspensive’ a provision that satisfaction of the condition will be deemed to be impossible if it has not been satisfied within a reasonable time, in the absence of any express provision as to time for the satisfaction of that condition », ont-ils statué.

Les Law Lords ont ainsi trouvé que les deux parties devaient bien « se plier à une condition suspensive » du ministère et non à un terme suspensif avec l’extension du délai à 60 ans, qui conférait ainsi différents droits à la vendeuse que ceux obtenus lorsque celle-ci avait accepté de transférer les droits de bail à l’acquéreuse, démontrant ainsi l’expiration de l’accord de vente car les deux parties ne s’étaient pas pliées aux nouvelles conditions du ministère.

Et au Law Lords d’ajouter : « The Sale Agreement contained an express time limit for the obtaining of permission upon the expiry of which the purchaser could treat the sale as having lapsed, but no express time limit enabling the vendor to do the same. It follows from the foregoing analysis of the law that the vendor could treat the sale as having lapsed if permission to assign was not forthcoming within a reasonable time. There is no suggestion that the vendor did anything to impede the grant of permission by the Ministry. »

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