Réouverture des frontières – Une date-annonce devient urgente, disent les hôteliers

La décision attendue en fin de semaine du Conseil des ministres n’a pas été annoncée. Et les spéculations quant à la date de réouverture des frontières — fermées depuis le 18 mars, sans compter la fermeture avancée pour certains pays, comme la Chine et Singapour — continuent. Or, la situation est urgente, disent les opérateurs du tourisme qui avancent que si l’industrie est à genoux et attend pour se relever, il s’agit aussi de relancer l’économie du pays en parallèle. Certes, tenant compte de la complexité de la situation sanitaire mondiale, la prudence doit être de mise avant de prendre une décision. Cependant, si les avis divergent quant au moment le plus propice pour rouvrir les frontières mauriciennes, les opérateurs, qui prônent une approche prudente, s’accordent à dire que le flou qui persiste quant à un calendrier travaillé fait perdre des parts de marché à Maurice. Actuellement, avec le manque de visibilité, Maurice se met en désavantage face à la concurrence, notamment régionale, tenant compte que les Maldives qui sont déjà opérationnelles, les Seychelles qui rouvrent à partir du 1er août, le Sri Lanka, prêt à ouvrir dans quinze jours et d’autres îles de l’océan Indien, d’ici la mi-septembre.

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Pour rester compétitive, avancer une date, peu importe laquelle, est primordiale, plaident les opérateurs qui souhaitent, quelle que soit la stratégie adoptée — tourisme ciblé pour les pays sans risques ou segmentation des opérations —pouvoir à ce propos enclencher les véritables mesures pour promouvoir la destination. Dans le flou, même si les mesures sanitaires internes ont été prises et renforcées, il est difficile d’attirer la clientèle, disent-ils.

Pour l’Association des hôteliers et eestaurateurs de l’île Maurice (AHRIM), l’annonce d’une date, quelle qu’elle soit, devient urgente. « Aussi longtemps que nous n’aurons pas cette date, nous continuerons à perdre des réservations, pas seulement pour les mois d’août ou de septembre, mais aussi pour la saison haute de novembre à janvier/février. Et quand on perd des réservations, elles vont forcément à la concurrence et cela n’est jamais bon, car Maurice y perd non seulement des parts de marché, mais aussi ses prescripteurs ayant déjà acquis des opinions favorables sur la destination », explique l’association.

2020 est une année difficile pour l’ensemble des acteurs de l’industrie touristique mauricienne, le défis est maintenant de redresser la situation sur le moyen terme, estime Jean-Jacques Vallet, Chief Executive Officer de Constance Hotels, Resorts & Golf. « Et il est primordial que Maurice mette en place une stratégie claire, rapide et sûre pour rouvrir les frontières au plus vite. Ce n’est qu’une fois la date de réouverture connue que les ventes sur la destination pourront redémarrer, notamment pour la haute saison. Sans date de réouverture, il n’y aura pas de vente et la destination Maurice sera mise de côté au profit des autres destinations, et ce par tous les réseaux de distribution. Si nous passions à côté des mois d’octobre et novembre, c’est toute l’année 2021 qui serait à risque », dit-il.

Utopique d’attendre le risque zéro

Les craintes sanitaires sont bien réelles dans le monde, mais les risques demeurent les mêmes si nous ouvrons le 1er août, le 1er septembre ou le 1er novembre, estime pour sa part Jean-Michel Pitot, CEO du groupe Attitude. « Le monde entier va devoir vivre avec la Covid pendant des mois encore. L’épidémie, nous l’avons vu, ne va pas disparaître du jour au lendemain. Mais tant que nous restons dans le flou, nous ne pouvons vendre la destination », dit-il. Si le pays a réussi à réduire au plus bas les risques de contamination et que Maurice est considérée comme Covid-safe, « il serait utopique d’attendre le risque zéro pour prendre une décision quant à la réouverture des frontières », dit-il. Il ajoute que si l’hôtellerie est affectée par cette situation, il faut réaliser les dommages économiques engendrés par la Covid, car l’hôtellerie est un pilier majeur de l’économie qui englobe différents autres secteurs, comme les PME, les fournisseurs qui souffrent en parallèle.

François Eynaud, CEO de Sun Limited, abonde dans le même sens, rappelant que le tourisme est un secteur capital de notre économie et a un effet multiplicateur important sur les autres secteurs. « Nous comprenons qu’un protocole pour l’ouverture des frontières est en cours de préparation afin de mitiger les risques sanitaires. Le zéro risque sera impossible à obtenir. Il nous faut donc nous fier aux tests et à notre capacité sanitaire à traiter les quelques cas qui passeront à travers », dit-il.

Comme tous les opérateurs, il concède que rouvrir les frontières est un exercice très complexe dans lequel il faut trouver le bon équilibre entre risques et bénéfices, entre l’économie et la santé publique. « Il est vrai que ce qui se passe actuellement à l’étranger n’est pas très rassurant et le gouvernement veut absolument éviter un deuxième confinement, mais il faut aussi tenir compte qu’actuellement les réservations pour Maurice pour novembre, décembre et janvier sont faibles, comparées à celles des destinations concurrentes qui ont déjà annoncé la date de la réouverture de leurs frontières ainsi que leurs protocoles sanitaires », dit-il.

Conséquences désastreuses pour le pays dans son ensemble

L’ouverture de nos frontières est LA priorité pour notre industrie, souligne également le groupe Beachcomber. « Les conséquences d’une fermeture prolongée seront désastreuses pour l’industrie touristique, mais aussi pour le pays dans son ensemble », explique la direction. « Il y a un choix à faire et pour nous, une ouverture contrôlée, mais rapide, est essentielle si nous voulons préserver notre pays contre des conséquences socio-économiques graves », dit-elle.

Une date de réouverture permettra d’activer l’ensemble des opérateurs et des réseaux — l’aérien forcément, l’hébergement et les services au sol, la distribution, les tour-opérateurs et autres plate-formes — estime l’AHRIM. « En temps normal, les ventes se matérialisent de 4 à 6 semaines. Dans le cas présent, il nous faudra encore plus de temps pour effectivement accueillir les premiers touristes post-confinement », explique l’association qui rappelle que ces jours-ci les voyageurs ne se bousculent pas pour prendre l’avion. « En clair, cette date de réouverture est avant tout une date programmée qui assure d’abord le maintien de Maurice dans la tête des voyageurs et qui de manière évidente ne déclenchera pas des foules de touristes sur notre sol », ajoute-t-elle. Il est aussi important de considérer la position de Maurice face à la concurrence, rappelle les opérateurs. À titre d’exemple, cite l’AHRIM, « Emirates a relancé ses vols dans l’océan Indien et dans leur communication commerciale, les Maldives ainsi que les Seychelles y occupent une place trop importante, tout simplement parce que Maurice y est absente. « Cette situation, défavorable pour Maurice, même si elle n’est peut-être que temporaire, a tout de même des conséquences irréversibles chez de nombreux tour-opérateurs européens qui nous vendent depuis des années », note les hôteliers qui disent se battre non seulement pour les hôtels, mais pour l’ensemble des opérateurs du secteur. « Nous sommes les premiers à dire qu’un touriste confiné à l’hôtel n’est pas envisageable, et que l’idée n’est pas vendable de toute façon. Nous sentons l’urgence de la réouverture par rapport à nos employés et leurs familles, nos fournisseurs, nos prestataires de services, nos transporteurs ou encore les villages où se situent nos établissements hôteliers », indique l’AHRIM.

Conscients qu’il est question d’abord de protéger la population locale de tout risque de contamination par le virus, les hôteliers estiment néanmoins que ce risque est parfaitement maîtrisé en ce moment avec la formule de quarantaine imposée par le pays.

« Au fil des ans, la destination Maurice a su bâtir une image forte et fidéliser une clientèle de « repeaters » amoureux de notre île. Appuyons-nous sur ces atouts dans les semaines et les mois à venir pour relancer nos activités, et ne laissons pas notre clientèle fidèle se tourner vers d’autres destinations », plaide Jean-Jacques Vallet. Ce que soutient aussi le groupe Beachcomber qui avance : « Nous sommes convaincus que le plus tôt c’est, le mieux ce sera pour l’industrie. Cette ouverture devra bien évidemment se faire dans le respect d’un protocole sanitaire strict. Maurice a extrêmement bien géré la crise de la Covid-19. Nous devons rebondir dessus pour repositionner Maurice au plus vite sur la carte mondiale des safe destinations pour le tourisme.»

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