SIR ANEROOD JUGNAUTH (29 AVRIL 1930-3 JUIN 2021) : Funérailles dans l’intimité avec écho à l’international

-Moments d’intenses émotions et de douleurs avec ce regard poignant de Lady Jugnauth à la levée du corps en la résidence de La Caverne
-Dix dernières minutes éprouvantes pour Pravind Jugnauth accompagnant la dépouille de son père au son de deux marches funèbres exécutées par la fanfare policière

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À 19h41, jeudi dernier, sir Anerood Jugnauth, ancien Premier ministre et ex-président de la République est décédé des suites de maladie. Dès lors, deux jours de deuil national, l’ouverture d’un livre de condoléances à Clarisse House et funérailles d’État, hier, mais sans la touche populaire vu la conjoncture de pandémie de coronavirus, ont été décrétés en mémoire de celui qui a servi le pays six fois en tant que Premier ministre. Toutefois, les funérailles d’hier, empreintes d’émotions, ont comporté une intimité des plus déchirantes, mais avec un écho sur le plan international. De ce fait, le Premier ministre de la Grande Péninsule, Narendra Modi, a pris la décision de décréter et d’observer un jour de deuil national en Inde (voir détails en page 12). De son côté, le gouverneur de l’État du Mahashtra, Bhagat Singj Koshyari, a mis en terre hier un plan de Lagestroemia speciosa, aussi connu comme la Pride of India et cela dans l’enceinte du Raj Bhavan Complex à Delhi. Il a souligné à cet effet que « sir Anerood Jugnauth has visited the Raj Bhavan several times in the past, the last being in 2016, and today’s plantation ceremony happened to coincide with the World Environment Day. »

De la journée d’hier, deux images reviennent en boucle, soit la séquence des moments d’intenses émotions et de déchirement dans ce dernier regard poignant de Lady Jugnauth à la levée du corps en la résidence de La Caverne. Et à la fin, les dix dernières minutes des plus éprouvantes pour le Premier ministre, Pravind Jugnauth, accompagnant la dépouille de son père dans l’allée centrale du Jardin botanique de Pamplemousses au son de la Dead March from Saul de Georg Friedrich Haendel, exécutée par la fanfare de la force policière et de la Funeral March de Frédéric Chopin. Et cela, pour accomplir son ultime devoir filial en apportant le feu au bûcher funéraire, dressé à côté du Château Mont-Plaisir. Il sera alors 14h28 ce samedi 5 juin avec les 60 ans consacrés par sir Anerood à la chose publique se transformant en mémoire.
La résurgence de la deuxième vague de Covid-19, qui se veut plus tenace que la première, a imposé des funérailles nationales sous contrainte pour l’ancien chef d’État. Les rites religieux se sont déroulés dans l’intimité familiale, même si tout au long du trajet de La Caverne au Jardin de Pamplemousses, en passant par Rivière-du-Rempart, couvrant une distance de 73 kilomètres en quelque trois heures et trente minutes, des Mauriciens, par milliers, en bordure de route, ont tenu à rendre hommage à celui qui a façonné à sa manière la destinée de l’île Maurice post-indépendance. Mais cette intimité, que ce soit en la résidence à La Caverne ou encore en pleine nature nature au Jardin botanique, n’a eu pour effet que d’amplifier ce sentiment de douleurs profondes intimes.
Si depuis le début de la première partie des prières dans la matinée d’hier Lady Jugnauth, soutenue par des proches et avec à ses côtés l’épouse de Pravind Jugnauth, et ses petites-filles, se tenant à droite de la dépouille exposée de sir Anerood Jugnauth, et son fils de l’autre côté, s’est battue contre elle-même pour maîtriser ses émotions, l’instant du dernier regard avant la levée du corps fut intenable. Elle ne pouvait plus rien, car au fond d’elle-même, elle savait que c’était la dernière fois, vraiment la dernière fois, qu’elle allait contempler le visage d’Anerood.
À partir de là, le poids de la douleur sur les épaules de cette épouse pour un partenaire, qui a su faire preuve de fidélité dans tous les sens du mot pendant plus d’une soixantaine d’années, l’a écrasée. Ses yeux hagards trahissaient son désemparement avec des gestes de la main comme pour faire comprendre cet état de désespoir. Le dernier rituel accompli, avec de l’eau versée à l’entrée de la résidence, fut encore des plus dramatiques, car la séparation était consumée. Des proches ont essayé en vain de réconforter Lady Jugnauth, celle qui a toujours été aux côtés de sir Anerood dans la vie.
Ultime
reconnaissance
Et l’heure du grand départ a sonné. Des membres de la Special Mobile Force en costume d’apparat se présentent et recouvrent la dépouille de sir Anerood du quadricolore mauricien, signe de l’ultime reconnaissance de la R épublique à un fils du sol. À partir de là, l’itinéraire de ce dernier grand voyage sur terre pour sir Anerood, qui se voulait tout un symbole, est enclenché.
Palma, lieu de sa naissance et de son enfance, avec toute sa charge émotive et familiale.
Ébène Cyber-City, la face de l’île Maurice moderne, dans laquelle il avait cru et avec l’un des initiateurs de cette transformation de la canne à l’informatique à Ébène, Bernard Mayer, se rappelant une des qualités de sir Anerood comme « un homme de devoir avant tout. Pour lui, si un projet est bon pour le pays, il l’approuve, même si vous n’êtes pas de so bann. »
La State House, lieu de pouvoir constitutionnel par excellence où il avait servi également en tant que président de la Républqiue.
Le Sun Trust, QG général du MSM, sa base politique, avec le convoi mortuaire atteignant ce point à l’heure de l’Angelus sonnant à l’Immaculée Conception.
L’Aapravasi Ghat, où ses ancêtres étaient descendus quand ils étaient arrivés à Maurice, ne sachant pas qu’un jour l’Inde reconnaîtrait un des leurs comme « the first Pravasi Bharatiya Samman Awardee », pour ensuite être honoré avec le prestigieux Padma Vibhushan Award.
Rivière-du-Rempart, son fief politique, et région témoina longue carrière politique et ;
Jardin botanique de Pamplemousses, destination finale pour la crémation, accueillant pour la deuxième fois les cendres d’un autre illustre fils du sol après sir Seewoosagur Ramgoolam en décembre 1985.
Néanmoins, cette dernière étape sera l’une des plus marquantes émotionnellement pour Pravind Jugnauth, qui tout au long de cette éprouvante journée aura affiché une stoïcité sans pareille. Le parcours à pied de l’allée centrale au Château Mon-Plaisir, avec le bûcher funéraire dressé à côté et en tête du cortège la fanfare policière et une haie d’honneur des membres de la SMF, et Pravind Jugnauth suivant la dépouille portée sur les épaules des membres de la SMF, couvert en dix minutes, paraissant une éternité, fut accompagné de l’exécution de deux marches funèbres de Haendel et de Chopin.
La partie protocolaire, comprenant trois salves de coups de feu tirées par des membres de la SMF avant que ne retentisse le Last Post, fut bouclée avec le quadricolore ayant recouvert la dépouille de sir Anerood remis au Premier ministre. Il est alors 14 heures 12.
Place au volet religieux de la cérémonie avec de prières dites par le pandit et Pravind Jugnauth « donnant du feu » à sir Anerood à la fin de ce dernier voyage sur terre…

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